Chapitre 32 : ©

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C'est étrange de voir ma petite sœur évoluée dans mon environnement. Sa présence dans mon appartement me rend anxieuse. Je sais qu'elle m'en veut et qu'elle pourrait exploser en quelques secondes. Je sais que des centaines de questions tournent en boucle dans sa tête et qu'elle se retient de peu pour ne pas me faire passer ce qui serait le plus pénible des interrogatoires. Quand il s'agit de sortir les vers du nez à quelqu'un, elle peut-être aussi coriace que Jésabel. Voir pire.

Sans dire un mot, Mallory observe tout ce qui l'entoure. Je la laisse faire le tour de chacune des pièces et en profite pour sortir mon téléphone. Aucun nouveau message. Walter attendait sûrement une réponse de ma part, mais je ne sais pas quoi lui dire. Nous nous sommes mis d'accord pour qu'il me laisse deux semaines, le temps de m'occuper de ma sœur.

Ça ne t'empêche pas de répondre à son texto !

Je m'apprête à écrire une réponse quand Mallory revient dans le salon. Je reste silencieuse, ne voulant ni la brusquer, ni lui donner la sensation d'être oppressée. La seule chose que je désire, c'est qu'elle me fasse confiance et qu'elle me laisse l'aider du mieux que je le peux. C'est donc elle qui finit par ouvrir la bouche et prendre la parole.

– C'est sympa ici.

– Jésabel m'a aidé à décorer.

Mallory fronce les sourcils en attrapant un cadre photo. Nos deux sourires sont figés derrière la petite vitre. Elle n'avait que huit ans, peut-être neuf. Son visage n'était pas encore marqué par la tristesse et l'incompréhension. Notre famille n'était pas parfaite, mais elle tenait debout.

Je me souviens de ce jour comme si c'était hier. Maman et papa nous avaient emmenés à la fête foraine. Ma petite sœur ne tenait pas en place, désirant monter dans le plus de manège possible. Elle me traînait à travers le parc, me tirant par la main. Bien que je fusse légèrement agacée, je ne voulais pas lui lâcher la main. Je ne pouvais pas prendre le risque de la quitter des yeux plus d'une seconde. Elle était déjà ce que j'avais de plus précieux au monde.

Avant de quitter le parc, maman nous avait demandé si elle pouvait nous prendre en photo. Rayonnante, Mallory s'était accrochée à mon cou. Ce moment a été figé sur le papier photo, soigneusement glissé dans le cadre noir.

– J'ai l'impression que cela fait des années Katniss. J'ai parfois même du mal à croire que j'ai pu être aussi heureuse. Aussi naïve.

– Tu n'étais qu'une enfant. Tu étais parfois ingérable tellement tu allais dans tous les sens. Absolument tout ce qui t'entourait t'émerveiller. La vie était une grande aventure.

– Toi aussi Tu n'étais qu'une enfant. Cela ne les a pas empêchés de se déchirer. Ils ne nous aimaient pas assez pour essayer de coller les morceaux.

– C'est faux. Maman t'aime énormément, elle a fait de son mieux pour t'offrir une meilleure vie. Et je t'aime aussi, tu dois me croire. Toutes les décisions que j'ai prises ont eu pour but de te mettre en sécurité et de te permettre de grandir le plus normalement possible.

Elle repose la photo et se tourne vers moi. Mon cœur se sert lorsque je vois ses yeux humides s'accrocher aux miens. Elle a besoin de réponse. Besoin de comprendre.

Comment lui dire la vérité alors que tu ne la connais pas toi-même ?

– Je sais que tu aimerais tout savoir Mallory. Je sais que tu demandes pourquoi ils ont divorcés. Que tu veux savoir pourquoi maman est partie si loin de la maison en t'emportant avec elle. Pourquoi papa n'a jamais essayé d'arranger les choses. Pourquoi je ne suis pas venue avec vous. Et pourquoi j'ai arrêté de te donner des nouvelles de nous. Mais...

Leaps, lift and levitation [En pause d'une durée indéterminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant