Chapitre 3 ©

164 16 9
                                    

Nous avançons doucement jusqu'au grand hall. Je n'ai jamais vu de mur aussi blanc. Ni même de plafond aussi haut. Et encore moins autant de dorure ! Cet endroit sent l'argent à plein nez. Pourtant, la décoration est faite avec goût et finesse. Mais je suis bien trop habituée à ma petite maison délabrée au mur beige défraîchis pour ne pas me sentir alaise ici.

Les filles ouvrent grands leurs yeux et n'arrivent pas à garder leur bouche fermées lorsque nous entrons dans le salon. Le luxe est omniprésent, entre les canapés de cuir blanc et les œuvres d'art aux murs.

J'en aurais presque envie de vomir. Tout ce "m'as-tu-vu" m'a toujours dégouté. Comment peuvent-ils supporter d'exposer leur richesse de cette manière alors que d'autres sont constamment dans la misère ? Je suis certaine que je pourrais payer toutes les factures en retard rien qu'avec la vente de la table basse en verre aux pieds bien sculptés et ornés de dorure.

Contrairement aux autres filles qui s'avancent dans la pièce pour admirer l'ensemble, je ne perds pas de vu mon objectif. Je me tourne alors vers notre hôte et attire son attention en me raclant légèrement la gorge. Quand ses yeux verts se plongent dans les miens, mon cœur s'emballe. L'intensité de son regard me fait perdre mes moyens. À tel point que je ne suis pas capable de formuler une phrase correctement et avec la politesse normalement obligatoire lors d'une conversation.


– L'espace pour les danseuses ?


Il fronce les sourcils. Pas de « s'il vous plaît » ?

Tu peux faire mieux Katniss, ressaisie toi !


– S'il vous plaît.


Si cela ne risquait pas de me faire passer pour une déséquilibrée, je me mettrais volontiers une claque.

Tu as l'air d'une sacrée connasse hautaine Katniss ! Se moque ma conscience.

Un demi-sourire sur le visage, il me regarde de la tête au pied avant de me répondre.


– Premier étage, deuxième porte à droite, au fond du couloir.

– Et où est-ce que nous allons devoir travailler ?

– Je vous en prie, suivez-moi.


Je lui emboîte le pas, laissant les cinq autres continuer de s'extasier devant la somptuosité des lieux.

Nous arrivons finalement dans un plus grand salon et il me laisse passer devant lui.

Merde, mais il y a combien de pièce dans cette maison ?

La lumière est faible, rendant l'ambiance très intime. Peut-être trop à mon goût, mais cela me rassure de savoir que Jésabel sera avec moi. Des barres sont installées et je n'hésite pas une seconde à vérifier leur solidité. Pas question de me casser un membre !


– Est-ce que cela vous convient ?

– Oui, parfaitement.


Je me tourne vers lui et n'essaye pas d'être discrète quand je le scanne des pieds à la tête, en faisant en sorte de ne pas recroiser son regard. Hors de question de passer pour une pimbêche deux fois en à peine 5 minutes !


– Vous avez l'air méfiante.

– Toujours quand je dois danser chez un particulier. Encore plus quand sa maison se situe dans les quartiers chics et que son nom est Harrisson.

– Je vous rassure, c'est seulement une petite soirée entre ami. Pour un anniversaire.

– Le vôtre ?

– Non, celui de mon plus ancien ami. Je voulais faire les choses bien. Il a toujours adoré les danseuses.


Je fronce les sourcils.


– Les danseuses ?

– C'est votre métier, non ? Ne me dites pas que...


Comprenant que j'ai réussi à le mettre dans le doute, je secoue la tête pour l'arrêter et le rassurer.


– Je suis danseuse. Nous les sommes, toutes les six. Je n'ai juste...

– Pas l'habitude qu'on vous appelle ainsi ? Je comprends. Vous devez plus souvent entendre « stripteaseuse ». Mais je sais différencier les deux.


Je souris malgré moi et lui lançant un regard espiègle.


– Je n'en doute pas, monsieur Walter.


Il devine le fond de ma pensée et explose de rire.


– Ce n'est pas ce que je voulais dire. Je voulais plutôt... hé bien... vous pratiquez une discipline artistique et respectable. Vous vous entraînez dure, sûrement des heures par jours. Mais, votre métier est toujours dénigré.


Je croise les bras sous ma poitrine et souris. C'est bien la première fois que j'entends quelqu'un me dire ce genre de chose. Les clients habituels réfléchissent à l'aide du mauvais organe et se fiche de nous rabaisser, baignant dans les clichés et les préjugés que la société a sur les danseuses de pole dance.


– Continuez.

– Vous êtes des artistes. Or, je ne trouve pas que cela soit très artistique de se déshabiller sur de la musique de manière vulgaire. Après, toutes ne sont pas pareil, j'en suis conscient. Mais je préfère le côté artistique d'une danseuse que le côté sexuel d'une stripteaseuse.


Je ne dis rien. Je me contente de l'observer en souriant légèrement. Je ne peux pas le nier. Il me plaît. Il sait se montrer convaincant.

Le salop. Il sait exactement comment faire pour me mettre alaise


– Kat ?


Je sursaute et me tourne vers Jésabel, le cœur battant.


– Tu viens ? Il faut qu'on aille se préparer.

– Tout de suite.


Elle hoche la tête et me lance un drôle de regard avant de disparaître. Je sens alors que notre hôte s'est avancé vers moi.

Je me tourne une nouvelle fois pour lui faire face. Yeux dans les yeux, il me tend sa main en me souriant, faisant les présentations officielles.


– Walter Shaun Harrisson.


Je prends sa main avec quelques secondes d'hésitation. Un courant électrique traverse mon corps de haut en bas, me faisant frissonner.

Il sert doucement mes doigts dans l'attente d'une réponse. Ma bouche s'ouvre avant même que je ne m'en rende compte pour lui dévoiler ma véritable identité.


– Katniss Norton.

Leaps, lift and levitation [En pause d'une durée indéterminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant