19. Quand la poisse se transforme en chance

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Généralement, la poisse ne se transforme jamais en chance. Puis de toute façon, je suis loin d'être née avec une cuillère d'argent dans la bouche. Mais bon, parfois, peut-être que l'espérance peut contrer la guigne. Un peu comme le prince qui vient sauver sa princesse, cette donzelle, dans sa tour.

Après tout, on dit bien que l'espoir fait vivre, non ? Bon O.K., ce n'est qu'une expression et justement, elle est plutôt moqueuse mais... Un soupir m'échappe. Quand il faut y aller, faut y aller.

C'est dans une grimace que je me retourne vers celui qui vient de parler. Assis par terre, le mec a les bras croisés. Ses lunettes qu'il a sur le bout du nez lui donnent un air de geek-intello, le genre de personnes clichées que je mettais bêtement dans la bibliothèque avec mon esprit de fille qui catégorise tout.

— Désolée, m'excusé-je.

Je n'avais pas pensé à la possibilité qu'il y ait quelqu'un.

Le binoclard soupire puis reporte son attention sur le livre qu'il lisait. Alors pour ma part, je retourne à mon observation de Jocelyn. Sauf que je réalise rapidement que mon camarade de classe arrive vers ma cachette.

Dans un état de panique totale, je recule et attrape le premier bouquin que je trouve. Ensuite, je m'enfonce un peu plus dans l'ombre, rejoignant pratiquement l'intello que j'ai embêté quelques secondes plus tôt.

Mon cœur est sur le point de se rompre lorsque je sens une présence, alors que mes yeux sont rivés sur la page de mon livre. Non, ce n'est pas possible. Ne me dîtes pas que Jocelyn s'est arrêté dans le même rayon que moi ? Oh la poisse !

— Je ne savais pas que tu faisais de l'allemand.

Je relève la tête et mes yeux croisent des iris bleues. Jocelyn, évidemment. Parce qu'il me voit froncer les sourcils, il montre mon bouquin du doigt.

— Moi aussi. J'ai toujours préféré l'allemand à l'espagnol.

Oh la bourde. J'étais tellement pressée que je n'ai pas fait attention au livre que je prenais.

— Euh... non, je... je fais LV2 espagnol.

Je maudis le silence qui suit mon annonce. Jocelyn me regarde en souriant puis attrape un bouquin à son tour.

— Mais je songe à apprendre en autodidacte, ajouté-je.

Je le regrette aussitôt.

— C'est courageux.

Ouais, et complètement faux aussi.

— Hum, si tu le dis.

— Non, c'est vrai. Je suis sérieux. L'allemand n'est pas facile. Si je n'avais pas eu une super prof au collège pour apprendre cette langue, je me serais certainement découragé avant même de réussir à faire une phrase.

Je crois que c'est la conversation la plus longue que j'ai tenu avec lui. C'est certain même puisque j'évitais aussi le bonjour les autres fois.

— Ouais, l'importance des professeurs dans l'apprentissage d'une matière... Toute un roman !

Mais qu'est-ce que je raconte ?

Je suis partagée entre l'envie de prendre mes jambes à mon cou ou rester ici pour parler bêtement avec lui. Parce que je vais être honnête, je n'y connais absolument rien en allemand et que je n'ai pas envie de disserter sur le sujet que j'ai énoncé.

Un nouveau silence s'installe. Je crois durant une fraction de seconde que c'est parce que Jocelyn a compris mon petit manège et me prend désormais pour la plus grosse menteuse de la Terre, mais c'est uniquement car il cherche quelque chose sur l'étagère.

Près de toi 1 - Madeleine Petit (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant