21. Donnant donnant

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Je me suis toujours demandé ce que ressentent les condamnés en entrant dans la salle où ils pousseront leur dernier souffle...

Bon, c'est vrai que j'avais tout de même une vague idée du sentiment qui les habite, mais cette fois-ci, j'ai vraiment l'impression de vivre la même chose qu'eux. À faible échelle évidemment. Je sais faire la différence quand même !

Alors que la pause de midi est déjà bien entamée et que je pianote sur mon portable pour répondre au message de mon frère (genre, après il veut me faire croire qu'il bosse ? Et mon cul, c'est du poulet ?), j'entends soudainement un raclement de gorge. Légèrement agacée d'être interrompue, je relève la tête et mes yeux croisent ceux de ma meilleure amie.

Elle a arrêté de manger. Parce que oui, nous sommes au self. Pire encore, elle donne un coup de menton sur le côté. Et j'ai le malheur de suivre la direction qu'emprunte ce dernier.

Non mais c'est une blague ? Pincez-moi ! Qu'est-ce qu'il fout là Gontan truc muche ?

— J'ai reçu ton SMS, m'apprend-il.

Je crois qu'il a compris que je ne pige pas ce qu'il attend de moi.

— T'es libre à qu'elle heure ?

Non mais parce qu'en plus il compte squatter pour le déjeuner ? Vu qu'il a piqué une chaise à la table d'à côté et vient de s'asseoir, je crois qu'il ne s'agit plus vraiment d'une question mais d'une affirmation.

Il ne semble pas vraiment savoir quoi faire de ses longs bras et les pose finalement sur le bord de la table.

— Comment ça je suis libre à quelle heure ? Puis qu'est-ce que tu fous à t'inviter là ?

Mon haussement de ton vaut quelques regards dans notre direction. Enfin disons que ceux qui ne nous observaient pas encore le font désormais. Tout ça, c'est de sa faute. Ils veulent sûrement tous savoir pourquoi le nouveau bad boy du bahut est assis avec celle dont personne ne connaît le prénom.

— Bah...

Il semble hésiter.

— Euh... J'avais cru comprendre que tu allais m'aider finalement pour la théorie théâtrale.

— J'ai dit que j'allais voir si je peux faire quelque chose pour toi, nuance.

Pourquoi est-ce que je lui ai envoyé un SMS ce matin, moi ? O.K., c'est vrai que je me faisais chier en cours et que je venais de me créer un film à propos des représentations de février. Dans mon esprit un peu trop imaginatif, je venais de voir une scène affreuse. Le regard des visiteurs, posés sur nous, étaient durs. On nous traitait de timbrés. On disait que le talent ne nous avait pas touchés. Bref, c'était un véritable cauchemar.

Rah Madeleine, il va falloir que tu calmes ton impulsivité ma fille.

— C'est pareil, tu vas m'aider quoi. Je finis à 16 heures aujourd'hui et...

— Ah ouais ? Et tu te barres pas pour une fois ? ironisé-je.

Je comprends à son soupir qu'il prend sur lui pour ne pas s'énerver. Apparemment, du moins d'après Émile, je peux être chiante parfois.

— Bon, tu sais quoi ? Je me ca...

— Non, c'est bon, soupiré-je en le voyant reculer sa chaise.

Ça va, je voulais juste un peu l'emmerder. Ce n'est pas tous les jours que l'on peut mener un bad boy par le bout du nez alors il faut savoir en profiter un peu. Sinon ce n'est pas marrant !

— Je finis à 17 heures. Normalement, j'avais prévu d'aller étudier à la bibliothèque, parce que je me suis lancée dans l'autodidacte et qu'il faut beaucoup de sérieux pour apprendre l'allemand, mais je veux bien faire une exception.

Près de toi 1 - Madeleine Petit (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant