𝙎𝙄𝙉𝙂 𝙁𝙊𝙍 𝙈𝙀 ; 𝐣.𝐣𝐤

❝8 ꒰ 𝐬𝐦𝐢𝐥𝐢𝐧𝐠

✿ · ✿ ଽ 𝘧𝘰𝘳 𝘺𝘰𝘶 ; ; ; 咲く】𖧷

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Installée sur la selle de son vélo, Se Ra pédalait avec rudesse. La sclère liliale de ses yeux était épinée par des ronces pourpres. Les poches sous ses cils traduisaient une crise de larmes rugueuse et vespérale. Ses yeux étaient bouffis, et son estomac était tordu. L'adolescente n'avait pas pris son petit déjeuné, de peur d'affronter le regard de ses parents. Elle leur en voulait pour être inlassablement exigeants. A la place, ses mains s'étaient attardées sur un peu d'argent. Juste assez pour profiter des biscuits et boissons d'un konbini. La jeune brune zigzaguait dans les rues tortueuses de Séoul, avant de poursuivre tout droit sous les fleurs de cerisier. Elle était obligée d'emprunter le chemin le plus long pour aller à l'école si elle souhaitait s'arrêter à un konbini.

Le soleil évanescent brûlait derrière les nuages gris. Encapuchonnée par l'écharpe d'étain oxydé, la perle des cieux balaya toute forme d'obstacles et se fraya un passage jusque sur le bitume rugueux. Les rayons diurnes effleurèrent la peau laiteuse de l'arrogante rieuse aux yeux épineux. Des fleurs disséminaient l'accueil du jour par l'éclosion de leurs pétales. Des bouquets de pétunias et lantanas habillaient le bord de plusieurs fenêtres. Les orbes de la brunette étaient saturées des mille et unes couleurs qui s'offraient au firmament. Et lorsqu'elle arriva devant la supérette, la vue chaude de la rue ne se ternît point. Se Ra déposa rapidement son vélo de côté, tout en s'assurant de le cadenasser. L'adolescente s'empressa de pénétrer dans le konbini. Elle plongea sa main dans son sac à dos et attrapa deux billets en se dirigeant rapidement vers le rayon biscuits. L'affamée n'hésita pas plus de trois secondes avant d'attraper un petit paquet de cookies. Son estomac savait exactement quel type de sucrerie il nécessitait. Se Ra chopa ensuite du lait à la banane et alla payer.

L'adolescente ne fit pas attention au regard un peu trop curieux du caissier. Elle avait remarqué ce soupçon d'interrogation dans les iris du vieillard, cette persistance qui fixait ses yeux bouffis. Cependant elle n'en fit rien et esquissa un sourire poli. La brunette savait qu'il était facile de remarquer sa crise de larmes. Elle avait aspergé son visage sous de l'eau plusieurs fois lorsqu'elle eut pris sa douche après s'être réveillée, pourtant, la preuve était là. Alors que le vieillard scannait tranquillement les deux articles, celui-ci demanda :

── Tu es blessée quelque part petite ? On te maltraite chez toi ?

Se Ra ne put retenir un gloussement d'embarras, touchée par l'inquiétude du vieux monsieur. Elle secoua négativement la tête, certifiant qu'elle n'avait aucune blessure physique, et que ses parents ne la frappaient pas. Le vieillard lui sourit en retour et lui confia que si par malheur, elle se faisait battre par qui que soit, l'adolescente pourrait venir le lui rapporter. Derrière les rides burinées du vieil homme se cachait une douleur insondable. Sa fille adorée était décédée depuis une trentaine d'années. Une maladie ne l'avait pas emporté. Ce furent les coups de son mari qui l'avaient engouffré dans le sillon de la mort. Et le vieux monsieur Shin ne pouvait pas s'en remettre. Il n'avait pas uniquement vu sa fille mourir avant lui. Il n'avait jamais remarqué les faux sourires de son enfant, les fausses excuses pour éviter de le rencontrer, et cette distance alarmante qui s'était installée à son insu. Il n'avait pas su décrypter les signes, et il s'en voulait. Sa fille avait souffert, seule. Monsieur Shin s'était longtemps réfugié dans l'alcool. Il avait littéralement craqué et avait même voulu tué le monstre qui lui avait pris son enfant. Il aurait pu finir par être un meurtrier à son tour. Cependant, le vieillard ne voulait pas retirer la vie, pas comme ce monstre. Il préférait détailler les clients, vérifier si aucun signe de maltraitance les marquait, et leur proposer de l'aide. Il savait désormais reconnaître les sourires forcés, les voix monocordes, les yeux vides. Alors, lorsqu'il regardait les yeux rougis par le larmoiement de Se Ra, il revoyait les expressions falsifiés de sa fille. Il entendait sa voix faussement enjouée, et son amaigrissement inquiétant.