Alliance de taille

96 7 6
                                    

|| CHAPITRE TROIS ||

🌲


Le jeune homme avait enfin terminé sa journée de travail. Après avoir fait un compte-rendu à son maître, il put quitter tous ces bureaux remplis de matériaux électro-magiques qui n'en finissaient pas.

Téofil, tel était le nom de cet élégant humain au sang royal qui martelait de ses bottes vers la forêt toute de blanc vêtue.

Sa sombre silhouette se découpait dans la pénombre des bois. Chacun de ses pas dans la neige produisait un crissement sourd, se répétant en le rythme taillé de l'immense infini. Le jeune magicien s'enfonçait peu à peu dans la pénombre, si bien qu'il en fût obligé de faire usage de la magie :

— Lumière, allume-toi.

Son souffle se mêla à celui du vent, dansa quelques pas avec ce dernier puis finit par s'estomper, laissant place au silence pesant de la forêt de glace.
Cependant, une vive lumière jaillit à l'intérieur de la paume de l'adolescent, avant de monter dans les airs et de suivre la trace de son géniteur, éclairant considérablement ses environs, tandis qu'il continua sans ciller son long périple nocturne.

Au bout d'un laps de temps pendant lequel il avait laissé ses pensées divaguer au loin, l'individu reprit ses esprits, frappa des pieds contre la maigre parcelle de terre qui régnait désormais sous ses pieds et frotta énergiquement ses mains l'une contre l'autre. Il était frigorifié, et son corps le lui faisait bien sentir. Enfin, pas tout à fait, à vrai dire, chacun de ses membres se contentait de sombrer dans un sommeil profond, qui dépassait le stade du repos. L'humain se doutait bien que sa conscience aussi ne tarderait pas à le lâcher.

Maudit soit son costume, il lui aurait fallu une énorme doudoune, chaude et épaisse, afin de lui garantir la survie dont il avait besoin en ce moment.

— Pourquoi ne suis-je pas sur une île paradisiaque bon sang, grogna l'adolescent en se frottant les mains, lui qui pourtant connaissait fort bien la raison de sa venue dans cet endroit.

« Il m'avait indiqué le chemin à prendre quand le moment serait venu ; je ne dois pas le décevoir », songea-t-il en se remémorant la figure sévère de son paternel.

Sur ces dernières cogitations, il entreprit de lancer une nouvelle formule magique, dirigeant son bras droit vers l'un des arbres de la forêt, main tendue. Ce cèdre se démarquait franchement des autres, de par sa hauteur mais aussi par le tracée parfait de chacun de ses traits, qui le faisaient paraître irréel. C'en fut bien le cas, car aussitôt une formule prononcée d'une voix modulée, l'arbre se dématérialisa sous les yeux du sorcier pour laisser place à une petite serviette de pique-nique.

Le tissu à carreaux semblait presque minuscule, trônant parmi ces grands arbres qui l'entouraient, mais projetait une aura de rouge, contrastant désagréablement avec le blanc si lumineux de la neige.

C'est alors que l'individu s'approcha de la serviette, puis bondit abruptement sur sa surface, se faisant alors aspirer dans le portail de magie. Les arbres, ayant passé le serment de veiller sur chacun des gestes qui survenaient au sein de leur forêt, demeurèrent irrémédiablement pris au dépourvu alors que l'humain disparut soudainement, ne laissant aucun signe de son passage dans les bois.

* * *

Un silence pesant accompagnait le combat de regards entre les deux colocataires.

Les naseaux de la Créature notaient bien cette tension, elle qui découvrait peu à peu les expressions farouches des visages humains – d'abord le désespoir avec l'élève dont elle avait fait disparaître la valise, et maintenant, une haine pure de la part de cette fille qui lui était encore inconnue.

ROCHELOINOù les histoires vivent. Découvrez maintenant