Partie IV - La Décision

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Après de longues heures passées à chevaucher parmi les terres arides du désert, une cité tout entière nous est apparue. La différence frappante de richesse entre mon village natal et cette ville neuve me surpris. Elzeihmos avait été construite par Shiroff, après avoir pris le pouvoir. Il avait rasé l'ancienne cité existante pour en édifier une à sa manière. Des pavillons ocres avaient été rangés autour d'un magnifique palais orné de pierres précieuses et de gigantesques fresques colorées. Il était complètement disproportionné: une hauteur démentielle, des tours incalculables, des fenêtres immenses, et tout cela ravivé par des dorures. Voilà à quoi lui servait l'argent de son peuple: à assouvir ses moindres désirs matériels. Ces ornements étaient payés par un argent sale, issue du pillage, des impôts trop importants et des amendes abusives. J'ai eu un haut le cœur devant ses richesses trop éblouissantes.

L'argent, le pouvoir et la gloire étaient-ils les seuls biens dont on se devait de se préoccuper?
Une bonne vie se résumait-elle à posséder toujours plus?

Je n'avais pas été élevée de cette manière, et je connaissais la valeur des choses et des hommes. Maman m'avait appris à toujours faire passer les autres avant moi et de me détacher de la matérialité.

Nous étions pauvres dans notre village, désargentés par la Guerre d'Argentia, mais cela ne nous empêchait pas de grandir spirituellement et d'éprouver de la joie.

Quel gâchis de voir tous ces bâtiments excessivement brillants! On aurait pu nourrir tout Argentia avec cet argent.

On pénètre dans les jardins du palais très verdoyants, trop verdoyants.
Oui, il y avait de vrais palmiers qui dansaient face au vent près des chemins sablonneux, mais tous les arbustes était en réalité des faux.
C'était une cité de rêve et d'illusion fondée sur le paraître.

Il n'en était pas moins que la cité avait été construite en plein milieu du désert de Kaahlos, lieu de végétation quasiment inexistante, où les températures sont brûlantes la journée et glaciales la nuit. J'avais lu plusieurs livres à propos de l'histoire et de la géographie d'Argentia, ce qui me permettait de connaître quelques caractéristiques de la région. Il y avait aussi un lac voisin qui ravitaillait la cité en eau et se transformait de temps à autre en lieu de loisirs et de détente.

Mais hors du centre de la cité autour du palais, Elzeihmos avait la particularité d'être un lieu de corruption, abritant vices et injustices. Vols, prostitution, arnaques, trafics, la ville était livrée aux plus sombres affaires. Cela s'expliquait du fait que le seigneur Shiroff s'occupait d'étendre son royaume hors des frontières en semant le chaos à l'extérieur. Ainsi, il délaissait la mise en place de réforme de sécurité dans les villes déjà conquises. Tant qu'il pouvait accumuler les richesses de son peuple, le bien être et la justice ne l'intéressait guère.

Rurk me fait descendre de son cheval, brusquement, en me prenant par les cheveux, et les guerriers font de même. Deux hommes récupèrent les purs-sangs de Shiroff et de mon ravisseur, et je suis emmenée dans l'enceinte du palais par les deux guerriers.

L'intérieur du bâtiment est encore plus époustouflant. Le style oriental de l'édifice apporte une touche d'exotisme. se mariant parfaitement bien avec les palmiers des jardins. Les plafonds sont très hauts et les sols, s'ornent de mosaïques colorées. Les bottes en cuire des deux hommes claquent sur les dalles, et le son résonne de façon solennelle.

On rentre dans une salle munie d'une grande table. Plusieurs hommes sont assis, et se retournent vers nous à notre arrivée. Je sens des regard insistants et mal placés se poser sur moi. Il faut dire que je ne suis pas très couverte: je porte un débardeur noir et une veste beige légère, trouée par la violence de mes enleveurs. Il y a une seule femme, qui semble bien s'affirmer devant tous ces hommes. Rurk s'assoit au milieu de la table et me place à côté de lui, et Shiroff, en tant que maître, domine à la place du bout. Je remarque qu'une chaise demeure vide à sa droite.

L'Elue  [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant