Perce-neige

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Nous avons convenu avec Valentin d'un lieu où nous retrouver. C'est lui qui l'a choisi et lorsque je découvre la vitrine de ce magasin espagnol, je ne peux pas cacher un rire. Il s'agit de la marque la plus colorée que je connaisse, tout comme mon arc-en-ciel d'ami. Celui-ci arrive par le bus et semble de très bonne humeur, à la vue de son sourire lumineux.

— Salut petite fleur ! Comment va ? Prête à affronter Clear Lake pour les trois années qu'il nous reste ?

— Complètement prête. Mais, et toi ? T'as l'air heureux comme tout.

— J'ai reçu un message ce matin. Un message vraiment très très mignon.

— Oh, fis-je, soudainement très intéressée et laissant les voyelles s'allonger dans ma bouche.

— Ca vient de Curtis et il me souhaite une bonne journée, en me disant qu'il est super déçu qu'on soit pas ensemble et tout. Il ne comprend pas trop pourquoi on a voulu changer de lieu d'étude, et pourquoi on a pas passé les examens du GCSE dans notre middle school.

— Parce que Clear Lake a un bon niveau, que son nom fait très bien sur un diplôme et qu'il est statiquement prouvé qu'il est plus facile d'y entrer avant la Sixth Form. Tout simplement. C'est exactement ce que les professeurs nous ont expliqué à la fin de l'année dernière.

— M'enfin bon, c'est très chou. C'est dommage que tu ne sois pas encore docteur, tu pourrais écouter mon coeur avec ton stéthoscope pour voir comment il bat vite.

Je n'ai jamais vu mon meilleur ami dans un état pareil. Il est tellement mignon que je pourrais le serrer tout contre moi comme une peluche, pour le protéger de ce monde cruel.

— Et toi, qu'est-ce que tu lui as répondu ?

— Un truc nul je crois, parce que c'est silence radio depuis que j'ai envoyé mon message. J'espère qu'il ne va pas se rendre compte que je n'ai strictement aucune expérience dans les relations de couple.

Il semble presque avoir honte de cette part de lui-même. Je le rassure en posant une main sur son épaule, alors que nous marchons jusqu'au lycée.

— Ne t'inquiète pas. Avec tout ce que tu m'as raconté, il ne risque pas de te faire un truc pareil. Ce serait vraiment horrible en plus, parce que tu as le droit d'apprendre. Surtout que tu découvres tout ça, alors que lui semble avoir plus d'expérience dans tout ça.

— Ouais, je vois...Merci de me rassurer Daisy, si tu savais comme ça fait du bien d'en parler à quelqu'un qui ne me juge pas...

— Bah, tu sais Vava, je suis tout aussi inexpérimentée que toi là-dessus.

— Je ne parlais pas de ça. Mais du...reste.

Le reste. Le fait que Curtis soit un garçon. Je ne pourrais jamais comprendre la difficulté de la chose parce que jusqu'à présent, je n'ai jamais été attirée par des filles. Mais j'essaie de soutenir mon ami autant que je puisse. Surtout que sa relation doit rester secrète.

— T'inquiète. Si je change, tu as le droit de m'assommer avec un des bouquins de poésie de ta mère, d'accord ?

Il rit et je suis rassurée de voir son sourire. Surtout que nous arrivons au lycée, entourés d'autres élèves. Je commence à scanner les foules à la recherche de Tanaka, ce qui n'échappe pas à mon voisin, qui pouffe dans sa veste d'uniforme.

— Tu te mets déjà au travail ? Bah dis donc, tu perds pas de temps.

— Ce mec est le plus mignon de la Terre, on peut très facilement me le piquer. Alors oui, je ne perds pas de temps.

— N'empêche, je suis pressé de le voir, ce fameux mec qui t'as volé ton coeur. Premièrement, pour le jauger et découvrir ce qu'il a de plus que moi. Et deuxièmement, pour définir si oui ou non, il s'agit du mec le plus mignon de la Terre.

Je sais qu'il se moque légèrement de moi en disant cela, c'est pour cette raison que je lui donne un coup de coude dans les côtes, pour le faire taire.

— Vache, tu es douloureuse. Faudra que je le prévienne le pauvre, qu'il ne se moque pas de toi.

— Je suis certaine que sa personnalité va de pair avec son physique. Il doit être tout simplement parfait.

— C'est quand même un mec, Daisy. N'oublie pas ça. On est carrément loin d'être parfait.

Nous sourions en arrivant près des panneaux d'affichage du lycée. C'est un peu le moment de vérité. Pendant une bonne partie de ma scolarité, j'ai été dans la classe de Valentin. Je ne me vois pas faire cette aventure sans lui, et je redoute le moment où nous serons séparés.

— Alors alors, les year 12...Trois classes...Je suis dans le deuxième, désigne-t-il, en pointant son nom. Et toi ?

Et là, c'est la douche froide.

— Je suis dans la première. On est pas ensemble Vava. 

Ciel fleuriOù les histoires vivent. Découvrez maintenant