Autre-Monde : Ambre Caldero

Chapitre 1. La Tempête

Ecrit par Anubis

Ambre claqua la porte et se mit à courir dans l'allée de sa maison. Dans son dos, elle entendit un bruit, certainement Lui qui allait tenter de l'intercepter. Elle prit alors de la vitesse et s'engouffra dans les rues vides de ce réveillon de Noël, refusant de se retourner pour voir s'Il la suivait.

Le vent faisait tourbillonner ses cheveux, et l'empêchait de voir où elle allait. Quelle idée avait-elle eu de sortir alors que ce que l'on qualifiait déjà de tempête du siècle tombait sur la côte est des États-Unis.

L'électricité avait été coupée peu après 18h, une aubaine pour elle car ce réveillon s'annonçait similaire aux autres. Mais pour une fois, il n'y avait pas d'électricité donc pas de four, et pas de repas. Sa présence avec sa mère et l'Autre ne serait pas indispensable.

Pourtant ça ne l'avait pas empêché de boire, et comme d'habitude d'une véhémence sur les conflits sociaux et la tenue du pays, sa violence s'était reportée sur sa mère, et son mépris sur elle-même. Ce soir, peut-être était-ce dû à ces conditions climatiques extrêmes, Ambre n'avait pas eu de self-control et avait réagi elle aussi à l'extrême.

Refoulant des pensées culpabilisantes ainsi que des larmes, elle déambulait maintenant dans les rues sombres où seule la lueur des bougies de toutes les familles de Stroudsburg lui permettait de se diriger. Elle hésitait d'ailleurs entre admiration et mépris pour toutes ces familles qu'elle voyait attablées ou en rond autour du sapin alors qu'elle même était dans le vent et le froid. Froid qui s'intensifiait d'ailleurs à moins que ce ne soit son corps qui commençait à lâcher prise.

Elle devint tout à coup consciente que son escapade nocturne n'était pas une bonne idée et qu'elle devait trouver rapidement un abri. Hors de question d'aller toquer chez une quelconque connaissance, de toute manière, il n'y avait personne dans cette ville en qui elle avait une confiance absolue.
Passant devant l'entrée d'une résidence, elle choisit de patienter un peu dans le hall à l'abri du vent et d'attendre que sa propre maison redevienne calme pour y rentrer sans bruit et sans éclat de voix.

Ambre se réveilla en sursaut lorsqu'une branche frappa contre la porte du hall où elle s'était recroquevillée. S'apercevant alors que la tempête ne faiblissait pas, elle regarda sa montre qui indiquait 3h du matin. Elle décida alors qu'il était temps de rentrer.

Luttant contre le vent, elle s'étonna de voir que l'électricité n'était toujours pas revenue, et la lueur des bougies s'était maintenant évaporée. La population entière devait être terrée dans les lits, espérant que la nuit passe vite.
Il semblait à Ambre que le froid était encore plus vif qu'en début de soirée et elle pria pour qu'il ne se mette pas à neiger. Soudain le vent redoubla et elle dut s'abriter sous un abri de bus pour ne pas être emportée. Regrettant alors d'être sortie, elle entendit un craquement suivit d'un bruit de verre qui casse. Elle se retourna et vit la baie vitrée de la bibliothèque municipale qui avait explosé lors de la chute d'un lampadaire, littéralement plié par la force du vent.

Y voyant un sauf-conduit, elle rassembla toutes ses forces et courut jusqu'à la bibliothèque. Elle fit attention à ne pas se prendre de bouts de verre et rentra dans le bâtiment. A l'intérieur, malgré la force du vent, elle fut à l'abri et entreprit de se trouver un endroit calme pour se protéger.
Passant devant l'espace des "tout-petits", elle emprunta quelques couvertures, parcourut l'une des pièces et passa les portes battantes pour arriver dans la salle "Histoire-Géographie."

Passant devant des rayons d'étagères qui étaient encore trop près de la tempête pour elle, elle s'installa au bout du rayon contenant tous les atlas de géographie, juste sous un planisphère du monde moderne. Là, elle se pelotonna dans les couvertures empruntées et tenta de se calmer, ce qui n'était pas facile car elle était bien d'accord, c'était définitivement la tempête du siècle.

Dans les minutes suivantes, elle eut l'impression que les rafales à l'extérieur s'atténuaient. Ce répit fut de courte durée car les bourrasques reprirent de plus belles et les portes battantes s'ouvrirent subitement.

Sous l'impulsion, des livres tombèrent tout autour d'elle et elle s'abrita sous ses bras pour éviter la chute de plusieurs atlas.

Terrifiée par ce qui se passait, son sang se glaça tandis que des lueurs bleues apparaissaient, accompagnées de crépitements semblables à ceux des feux d'artifice. Puis un coup de tonnerre résonna dans toute la rue, l'obligeant à se boucher les oreilles, et les lueurs s'intensifièrent. D'un coup, les éclairs furent sur elle, semblables à des doigts, fouillant ou cherchant quelque-chose, le vent s'engouffra à nouveau dans la salle et les pages des livres volèrent.

Tandis qu'un éclair frappa une Ambre recroquevillée, les livres et le planisphère prirent feu et les éclairs disparurent de la bibliothèque, comme si désormais, ils s'en désintéressaient.