A La Lueur Des Autres

* 16 *

Ces nouveaux jours de congés furent l'occasion pour le petit groupe d'organiser une nouvelle soirée avec plus de monde cette fois pour, selon eux, fêter l'été bien qu'il était largement entamé. Il leur en fallait peu pour se retrouver et l'ambiance était au beau fixe malgré l'absence remarquée de Raphaël ou de Joseph et Chloé et la distance qui s'était installée entre Alan et Mélanie, et sur ce point, seuls les deux concernés, le percevaient.

Depuis qu'elle était venue au café, Mélanie n'avait pas montrer d'intérêt ou d'attention envers Alan et il s'était souvent rendu dans leurs lieux de rencontre habituels, seul. Lorsqu'on lui demandait pourquoi il parlait peu ou paraissait si fatigué, son regard se portait souvent soit sur Mélanie soit sur quelque chose qui la lui rappelait ou sur un point vide de sens dans l'horizon. Il ne répondait rien ou fuyait la question, mais il ne pouvait cacher la tristesse que cette solitude créait en lui ; il voulait voir Mélanie. Il l'attendait souvent assez tard dans la nuit, en espérant qu'elle le rejoindrait mais elle s'enfermait dans sa chambre ou passait encore plus de temps dehors, avec Jimmy supposa-t-il.

Alan n'avait pas compris ce volte face de la part de Mélanie mais n'avait pas vraiment insisté ni poursuivi la jeune femme, ce qui eut l'effet contraire à ce qu'il escomptait. Il croyait qu'en la laissant en paix quelques temps, elle reviendrait d'elle-même vers lui, qu'en peu de solitude lui permettrait de se retrouver, mais Mélanie vit dans cette attitude un manque d'intérêt qui la conforta dans l'idée qu'Alan ne souhaitait pas s'engager plus loin avec elle. Mélanie ne s'étonna pas de constater les dégâts qu'avaient créés ce qu'elle considérait comme de la manipulation affective qui consistait en l'appropriation de l'attention de quelqu'un sans donner en retour ou de suite aux liens ainsi créés. Elle avait déjà connu cela, par des amis, des hommes ou encore de la famille, et se savait totalement vulnérable à ce genre de comportement. Lorsqu'on gagnait son affection, c'était souvent pour toujours et il lui était difficile de renoncer à cela surtout s'il s'agissait d'affection amoureuse. Elle se persuada de l'indifférence d'Alan et bien qu'elle s'en attristait, elle se disait que c'était pour le mieux et redoublait d'efforts pour paraître intacte aux yeux de ses proches.

Mais ce manège ne dura pas longtemps, deux jours après l'engagement de la jeune femme au café et un tôt dans l'après-midi qui précéda la soirée, Alan qui lui, ne pouvait et n'avait aucune raison de renoncer à Mélanie, décida de couper court à ce froid jeté futilement entre eux. Il la retrouva dans sa chambre et entra sans prévenir, Mélanie eut un moment de surprise en se retournant immédiatement et se tendit encore plus lorsque son regard croisa celui d'Alan. Il l'observa quelques instants et encore une fois, elle fuyait ses yeux trop perspicaces pour leur faire face.

« Je peux m'asseoir ? - il désigna le lit d'un geste évasif et elle acquiesça sans le regarder. - Tu ne veux pas qu'on sorte, un peu ? - elle secoua la tête pur toute réponse et passa devant lui pour atteindre le placard qui se trouvait à l'opposé de sa chambre mais Alan attrapa sa main et comme cela était devenu une habitude, guida doucement Mélanie à son côté. - Assieds-toi avec moi... S'il te plaît. - devant le ton presque plaintif d'Alan, Mélanie ne pût refuser cette demande, et il la pressa un peu plus contre lui. - Quelque chose ne va pas ?

- Non, tout va bien. Il faut que j'aille aider Alexis. - elle tira doucement pour se retirer de son étreinte mais mi-amusé, mi-dubitatif, il la retint.

- Il est parti, rendez-vous à la banque.

- Jimmy doit passer.

- Je crois pas, hier, il a dit qu'il irait chez son père pour la journée. - ses mensonges désespérés étaient à la fois enfantins et risibles, mais il se contint de rire, il ne voulait pas la froisser.

- Nolan...

- Il dort. - Mélanie capitula en soufflant.

- Donc on est seuls ?