Chapitre 6

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L'odeur.
Ce fut la première chose qui me frappa en pénétrant dans la structure. Je ne savais depuis quand il était inhabité mais la forte odeur de poussière et de moisissure laissait deviner que ça ne datait pas d'hier. A en croire les quelques vieux meubles restants qui croupissaient dans la pièce, j'avais atterri dans une cuisine. Je jetai un rapide coup d'œil et mon regard se posa sur une vieille armoire en bois. Elle était située à droite de la fenêtre et semblait presque la garder. J'eus soudainement une idée pour retarder la progression de mes ravisseurs. Son état était assez déplorable mais elle ferait l'affaire tant qu'elle tenait debout. Je me dépêchai de me positionner à sa droite et je poussai le plus fort possible pour la déplacer. Quelques secondes plus tard, elle recouvrait entièrement la fenêtre et y empêchait l'accès par la même occasion. Au moment où je finis de pousser je sentis un coup qu'un des hommes venait de donner dans l'armoire. On peut dire que je l'avais échappée belle, une seconde de plus et il réussissait à entrer. J'eus des frissons de peur rien qu'en y pensant. Il ne fallait pas que je tarde ici, l'armoire ne tiendrait pas longtemps. L'ennui était que je ne voyais plus rien, le meuble ayant bouché la seule source de lumière de l'appartement. Me souvenant de la position de la porte, je me dirigeai vers elle à tâtons, prudemment. Lorsque je la trouvai, j'aperçus la porte d'entrée - heureusement entrebâillée - qui laissait passer la faible lumière d'un lampadaire éclairant une fenêtre de la cage d'escalier. Je marchai rapidement vers celle-ci et j'arrivai au niveau des escaliers de l'immeuble. J'allais descendre mais j'entendis le bruit de la porte extérieure qu'on tentait d'enfoncer. Ils n'avaient pas mis beaucoup de temps à changer de tactique. Je décidai donc de monter en direction du toit.

Après plusieurs minutes à gravir ces escaliers interminables, marche après marche, je parvins enfin à une porte blindée qui devait donner sur le toit. Pendant que je montais, des bruits de pas précipités m'étaient parvenus, ce qui voulait dire qu'ils avaient réussi à entrer. Je devais quitter ce bâtiment au plus vite. J'ouvris la porte, par chance déverrouillée, et je m'aventurai sur le toit en courant. L'air me frappa le visage de plein fouet. Je dus plisser les yeux pour voir où je mettais les pieds. J'atterris rapidement à l'extrémité du toit où je dus me stopper brusquement pour éviter de tomber. Etant en pleine course poursuite digne d'un film d'action cela aurait était bête de mourir ainsi, même si l'idée de mourir d'une quelconque façon ne me déplaisait pas. En face on pouvait voir, malgré le vent coriace qui semblait ne pas vouloir se calmer, le toit d'un immeuble adjacent à deux mètres environ. 

C'était faisable.

Ça paraissait peut-être fou, mais je ne voyais aucun autre moyen de semer mes poursuivants. Il fallait que je saute, que je traverse ce vide me séparant de mon seul échappatoire. Que je me sauve et que je survive un jour de plus. Je fermai les yeux, inspirant un bon coup par le nez, et je rassemblai tout le courage que je pus. La distance séparant les structures n'était pas énorme mais un seul faux pas suffisait pour rater le saut et s'écraser en bas. Je n'avais pas droit à l'erreur, ce qui ajouta une pression de plus à celle déjà présente. Je reculai de trois pas pour prendre mon élan et je courus aussi vite que je pus. Je fermai les yeux par réflexe au moment de sauter le plus haut et loin possible. Il ne me restait plus qu'à attendre d'atteindre le toit du bâtiment voisin, ou de m'écraser lamentablement  contre sa façade pour finir ma course inanimé, à l'image de l'homme que j'avais laissé derrière moi. La vie oserait-elle me faire payer cet acte maintenant? L'attente de ma sentence ne fut que de courte durée puisque je sentis quelques secondes après une chose dure sous mes pieds avant de m'écraser en avant de tout mon long. J'avais finalement réussi à atteindre le toit. La vie se montrait clémente aujourd'hui. Une clémence hypocrite bien évidemment, puisque mettre un terme à ma vie aurait été ce que j'aurais souhaité. Elle le savait et j'étais sûr qu'elle en jouait. Je me mis à courir, il ne fallait pas oublier ceux qui me pourchassaient. Je trouvai facilement la porte donnant sur l'intérieur et je m'empressai de l'ouvrir. Je poussai plusieurs fois dessus tout en abaissant la poignée mais elle ne s'ouvrit pas. Je tentai de donner plusieurs coups de pieds, pour casser la serrure et me permettre d'entrer, mais elle ne semblait pas vouloir céder. Là j'étais mal. Je jetai un regard au toit de la bâtisse sur laquelle je me trouvais quelques instants plus tôt, et je vis un des hommes passer le seuil de la porte. Je retrouvai la panique désormais familière que j'avais déjà ressentie plusieurs fois en l'espace d'une seule soirée. Je me précipitai vers le toit suivant et sautai sans réfléchir. Cette fois-ci je ne fermai pas les yeux, trop occupé à sauver ma peau. Je me dirigeai vers la porte tout en priant intérieurement pour qu'elle soit ouverte. Le toit d'après était trop éloigné pour que je puisse franchir le vide aussi aisément que les fois précédentes. Si cette porte était fermée, j'étais perdu. Je poussai dessus et elle s'ouvrit lentement. Un espoir se forma en moi mais disparus instantanément lorsqu'elle se stoppa d'un seul coup. Elle n'était ouverte que de moins de dix centimètres, ce qui ne me permettait pas de passer. Une chaîne située à l'intérieur la maintenait fermée. J'introduis ma main et la tâtai à l'aveugle. Elle était robuste et ne céderait pas en quelques coups de pieds c'était certain. Mais en la touchant, un détail me frappa. Il n'y avait pas de cadenas. Je continuai à la frôler du bout des doigts, la parcourant entièrement, mais je n'en trouvai aucun. Se pourrait-il que... Parfait! J'avais réussi à défaire la chaîne à l'aide de ma main gauche, aucun cadenas n'empêchant cette action. C'était très stupide de ne pas en mettre un pour empêcher une possible intrusion mais je ne pouvais que m'en réjouir. Grâce à ce manque d'attention, mon sort n'était pas scellé. Je m'aventurai dans l'immeuble et, à ma grande surprise, les lumières des escaliers s'allumèrent automatiquement. Enfin un immeuble en bon état. Je les descendis rapidement, les bruits de mes pas résonnant à travers le bâtiment endormi, et après quelques minutes ceux de mes poursuivants me parvinrent. J'accélérai le rythme et je me retrouvai devant la porte de sortie. Je m'apprêtai à l'ouvrir mais je me souvins que d'autres hommes attendaient certainement dehors. Je jetai un coup d'œil autour de moi et vis un couloir menant à l'arrière du bâtiment, d'où une lumière semblable à celle des lampadaires jaillissait. Je le longeai et trouvai avec satisfaction une porte donnant sur l'extérieur. Sans réfléchir plus longtemps je la passai. 

Ma Rédemption [En Pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant