Chapitre 3

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Un soir, j'avais une livraison à faire. C'est ainsi que j'avais rencontré pour la première fois la lumière qui viendrait éclairer ma sombre vie.

On était vendredi. Après avoir quitté la fac, je me rendis chez le "boss", comme on l'appelait. Un surnom bien narcissique je vous l'accorde. Il m'attendait avec un sac de sport dans lequel se trouvait la marchandise à livrer. Je devais me rendre dans une ruelle d'un quartier pauvre peu stable. Dans le sac, le "boss" avait caché une arme que je pourrais utiliser si la situation venait à se gâter. C'était une livraison rapide. Je devais simplement déposer le sac dans une cachette dans laquelle une somme m'attendrait. Je récupérerais ensuite la liasse de billets ainsi que l'arme et je retournerais simplement chez moi en attendant que le Bras Droit du "boss" vienne tout récupérer. Le Bras Droit devait s'en charger car il s'agissait d'une marchandise importante qui rapporterait beaucoup, et je faisais parti des meilleurs éléments du "boss". J'avais en quelque sorte sa confiance que j'avais réussi à mériter en trois années à son service. Malgré les économies que j'avais pu me faire durant ce temps-là, je devais me contenter de mon taudis pour ne pas éveiller de soupçons sur l'argent que je gagnais illicitement. Je pris le sac et me rendis à la salle d'entraînement. C'était le plan. J'irais faire ma séance habituelle de boxe, en prenant bien soin d'enfermer le sac dans un des casiers à notre disposition, puis je me rendrais au point de rendez-vous de manière naturelle, comme si je rentrais chez moi. Malheureusement, tout ne se passa pas comme prévu.

Lorsque je finis ma séance de sport, je récupérai  le sac que je tins par la bandoulière sur mon épaule. Après une douche prise sur place, je me sentais bien quoique fatigué. Le sport était une chose indispensable à ma vie. Il me permettait de me défouler et d'extérioriser toute la colère et la frustration qui s'accumulaient pendant la journée. C'était un moyen de plus pour décompresser. En sortant, je sentis une pointe d'angoisse dont j'ignorais l'origine. Peut-être de l'appréhension ou du stresse. Je n'y fis pas attention et je poursuivis mon chemin. Après avoir pris le métro - la salle d'entraînement se trouvant proche de mon université - je poursuivis mon chemin jusqu'au pont. Le quartier dans lequel devait s'effectuer la livraison n'était pas très loin du mien. Je devais également emprunter ce pont pour m'y rendre. Il n'était pas très fréquenté, rares étaient les voitures qui le traversaient. De chaque côté il y avait un trottoir qui permettait aux piétons de le traverser. C'était en plein milieu du pont, là où on avait une meilleure vue sur le fleuve et ses alentours, que j'avais pour habitude de m'arrêter. Aujourd'hui ne fit pas exception. Vers les coups de 19h, après une marche de quelques minutes pour rejoindre mon emplacement favoris, je m'arrêtai face à l'eau. Le rendez-vous était fixé à 19h30 et je n'étais qu'à dix minutes à pied du lieu. J'en profitai donc pour faire une petite pause. Je pris appui sur la rambarde avec mes bras et j'y calai ma tête, le sac toujours accroché à mon épaule. Je fermai les yeux et profitai de la brise venant me caresser le visage, se mêlant à mes cheveux bruns plus longs au sommet de mon crâne que sur les côtés. L'espace d'un instant, j'imaginai ma mère m'ébouriffant les cheveux, avec son sourire chaleureux en coin comme elle avait l'habitude de le faire quand j'étais petit. Ça avait le don de me rassurer, de stopper instantanément mes pleurs. Car oui, pleurer était une chose que je faisais souvent à cette époque. Ma mère... Elle me manquait tant. Je sentais encore son odeur agréable de rose, propre à elle, qui avait le don d'effacer mes craintes. Je la sentais si proche... Attendez, j-je sentais réellement son odeur. J'ouvris subitement les yeux. C'était impossible, ma mère ne pouvait pas être là, et pourtant je voulais y croire. Je me retournai précipitamment, prêt à lui sauter dans les bras et lui crier combien la vie était dure sans elle mais je me stoppai net. A la place de ma mère, une jeune femme voilée, de 18 ans je dirais, venait de passer, cette odeur enivrante encrée dans ses vêtements portée par le vent. Elle marchait, écouteurs aux oreilles, sourire aux lèvres, insouciante. Comment osait-elle... Comment osait-elle sourire après m'avoir fait espérer et détruit cet espoir en un instant?! Comment osait-elle porter le même parfum que je croyais unique à ma mère, l'un des seuls souvenirs me restant d'elle?! Comment pouvait-elle se promener joyeusement alors que le monde continuait inlassablement de me faire souffrir et subir ses injustices?! Comment osait-elle montrer au grand jour qu'elle était heureuse pendant que la plupart des personnes souffraient?! Je fus soudainement pris d'une envie incontrôlable de lui sauter dessus et de lui arracher ce sourire hypocrite qu'elle offrait au monde. De la frapper jusqu'à ce qu'elle ne puisse plus jamais sourire de sa vie. C'était une nouvelle fois la putain d'injustice de cet univers qui se manifestait. Je dus prendre sur moi et tenter de me contenir, comme jamais auparavant, pour éviter de faire une connerie que je regretterais par la suite. Cette fille, sans même la connaître, je la détestais au plus haut point...

Ma Rédemption [En Pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant