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Charly va sonner, je n'en ai pas la force. Je viens de leur raconter la majeure partie de mon histoire, passant sous silence quelques moments de colère. J'ai veillé à ce qu'ils me prennent par pitié afin qu'ils acceptent de m'accompagner, et ça marche. Enfin au moins pour Lilou. Mais je crois que l'étincelle de folie que Charly voit dans mes yeux me discrédite un peu. De toute façon il a déjà accepté de me conduire, et en pleine connaissance de cause si mon impression est bonne. Donc je n'ai pas de soucis à me faire avec lui.

- Monsieur Hector Song ? Demande-t-il à l'interphone. Je m'appelle Charly Doukanah et je viens d'arriver dans le quartier avec mes deux sœurs. Nous aimerions vous rencontrer, pouvons-nous monter ?

J'imagine sans mal la surprise qui effleure l'homme du haut de son appartement, mais la voix très polie de Charly semble lui donner confiance.

- Je vous ouvre, accepte-t-il avec chaleur.

Un sourire cruel m'étire le visage. C'est trop facile.

La porte se déclenche et nous nous glissons dans l'immeuble. Nous prenons l'ascenseur pour le 5ème étage, apprenant là haut que l'appartement du meurtrier est le quatrième du palier. Son nom est écrit sur sa porte, c'est facile de se repérer.

- Bonjour les jeunes ! Nous accueille amicalement le trentenaire.

Il n'aborde aucune méfiance, mais à qui pourrions-nous faire peur ?

- Bonjour Monsieur Song, récite Charly d'un ton que je trouve moi-même adorable.

- Entrez donc, nous invite Hector avec bienveillance.

Je laisse mes amis passer, inspectant plus sérieusement le visage de l'homme. Un peu typé asiatique, ses yeux noirs brillent et son visage pâle est très lisse. Je peux distinguer quelques tatouages débordant de ses manches courtes et frisonnes en me demandant ce qu'ils représentent. Mais ce qui me déçoit c'est qu'à part ça, il respire la normalité. Et il fait pourtant partie de ceux qui ont tué mes parents.

L'intérieur de son appart est tout aussi banal. Il doit vivre seul, et tout est bien rangé. Encore une fois j'ai du mal à croire que cet homme est un ancien drogué.

- Vous voulez quelque chose à boire ? Demande-t-il en se dirigeant vers le minibar.

Mes deux amis prennent du jus d'orange alors que je dédaigne son offre. Non, aucun moyen que je boive à la table de cet assassin.

J'attends que l'homme soit dos à moi pour fouiller l'appart. Je trouve rapidement la cuisine, et surtout les couteaux qui y reposent. J'en prends un grand bien aiguisé, je passe mon doigt sous la lame et regarde mon sang couler de la blessure. Il coupe la chair comme du petit pain, c'est parfait.

Je retourne au salon où mes amis ont entamés une conversation amicale avec Hector. C'est Charly qui me voit arriver en premier, et il perd de suite son sourire. Mais l'inclinaison de sa tête me confirme son acceptation.

Lilou par contre, c'est une tout autre histoire...

- An' ! S'exclame-t-elle en me voyant arriver.

Mon amie bondit de sa chaise, esquisse un mouvement vers moi et Charly la retient. Les lèvres pincées, il pose une main sur son épaule et la tire en arrière.

Hector, lui, se retourne rapidement. Ses anciens réflexes sont toujours là, je songe avec un rictus de pitié. C'est mon homme.

- C'est quoi ce bordel ! S'exclame l'ex trafiquant d'une voix rauque en avisant mon arme.

- Vous vous souvenez du 15 février 2008 ? J'attaque glacialement, sans m'embarrasser de plus d'explication. Vous vous souvenez d'Échirolles ?

Ça lui suffit largement. Il s'en souvient oui, et il se raidit. Il n'a pas besoin de plus d'explications, il sait déjà ce qui l'attend. Je me force donc à continuer, comme un juge qui annonce les faits :

Jusqu'à la mortOù les histoires vivent. Découvrez maintenant