19.

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elle n'eut pas le temps de retirer ses chaussures que sa mère la submergea de questions.

- j'étais au parc. j'avais besoin de prendre un peu d'air.
- t'es sûre que ça va ? s'inquiéta sa mère. ton établissement a appelé tout à l'heure, tu as des problèmes à l'école ?
- je suis un peu fatiguée là mais je vous raconterai demain, promis !
- bon... dit sa mère d'un air déçu. d'accord. va te reposer.

émilie sourit à sa génitrice en guise de remerciement. elle jeta ses affaires dans sa chambre et prit une douche histoire d'enlever les mauvaises ondes.

le ciel avait déjà commencé à laisser paraître quelques étoiles mais émilie préférait observer le plafond. c'était la première nuit qu'elle allait passer sans sa baleine. pourtant elle n'avait pas l'impression qu'elle était partie. elle se sentait ni triste, ni heureuse. juste vide. en se tournant, elle aperçut son sac. elle pensa à la lettre d'Alex, elle l'avait emmenée avec elle sans savoir pourquoi. c'était peut-être pour la donner à son amie, mais elle n'était plus là... elle voulait la lire mais elle ne devrait pas, ce n'est pas pour elle. elle se retourna pour enlever cette idée de sa tête. il a suffit quelques minutes pour qu'elle craque et que sa curiosité prenne le dessus.

elle lut la lettre.

elle constata deux choses; son écriture s'était améliorée - peut-être à force d'écrire. et la seconde chose; ça apaisait son âme. elle se sentait humaine et vivante - non pas comme un gros tas qui se déplaçait.

puis tout à coup, elle eut une idée. elle se redressa. elle se précipita vers son tiroir et sortit des feuilles blanches. elle aussi elle allait lui écrire une lettre. elle prit son plus beau stylo, sa meilleure écriture et elle commença.

à réfléchir.

c'était comment d'écrire une lettre ? elle ne l'avait jamais fait. après plusieurs tentatives ratées qui lui couta une dizaine de minutes, elle décida de foncer tête baissée et d'écrire tout ce que son coeur lui dictait.

billie ma petite baleine,

elle inspira avant de continuer

je sais que t'es toujours là.

les mots s'écoulaient d'eux-mêmes

pourtant je t'écris cette lettre comme-ci tu étais partie. ta petite bouille et ta voix me manquent.

quand elle eut fini la lettre, elle enroula feuille sur elle-même.

dans ces moments-là, il me suffit de lever ma tête vers le ciel pour consoler ma nostalgie. je ne sais pas encore si je suis triste, aujourd'hui j'ai dû retenir plusieurs fois mes larmes. tu as tellement comblé ces dernières années de bonheur que je me vois mal les noyer dans un océan de chagrin. - et puis comme je l'ai dit, t'es toujours là, n'est-ce pas ?

elle fit de meme pour la lettre d'Alex.

tu sais, ça m'a fait du bien. de le frapper. je ne devrais pas dire ça mais il le méritait vraiment. après tout c'était à cause d'eux si t'étais...

elle les entra sans difficulté dans la bouteille en verre que son grand-père lui avait donné.

enfin bref, je ne sais pas ce que le futur me réserve. je ne sais pas s'ils m'embêteront encore. en tout cas, si je peux te promettre une chose; c'est qu'ils ne m'auront pas. je ne leur donnerai pas ce plaisir.

il était vingt-trois heures quarante-sept. ses parents n'allaient pas tarder à dormir.

d'ailleurs tout à l'heure je suis partie te voir. y'avait alex. après toutes ces années, il te visite encore... c'est fou non ? je me demande pourquoi. le regret ? peut-être, je ne sais pas. au fond, on est un peu seules dans ce combat. qui vient nous aider après tout ? bon je peux pas leur en vouloir, au fond, qu'est-ce qu'ils les obligent à nous sauver ?

elle s'habilla et mit la bouteille dans son sac.

en rentrant, et tu m'excuseras parce que j'ai pas pu rester longtemps, je suis passée devant un magasin. dans la vitrine, j'y ai vu mon reflet. et tu sais, j'ai pas pu comprendre tout cet acharnement. je me suis trouvée normale.

quand ses parents ne montraient aucun signe de vie, elle descendit les escaliers aussi silencieusement qu'elle pouvait. dans la cuisine, elle prit quelques snacks et une bouteille d'eau.

et toi aussi tu l'étais. ça me met en colère de savoir que tu es... pour ça. bon, à l'origine je ne voulais pas prôner de la négativité. non en réalité je voulais te remercier. pour tout. les rires, le soleil, puis ce voyage sous-marin dans tes larmes. c'était tout ce que tu avais pleuré, n'est-ce pas ?

elle enfoura son vélo, et roula vers la lune.

en tout cas, j'espère que tu es heureuse maintenant. j'espère que tu nages bien là-haut. j'hésiterai pas à te regarder, alors n'oublie pas de regarder en bas aussi ! même si je pense que tu es trop occupée à jouer avec les autres anges.

arrivée à la plage, elle déposa son sac sur le sable.

bon... c'est la fin de la lettre, je suis un peu nulle en ça. comment on fait pour terminer une lettre ? ah ! j'en sais rien... euh.. je vais faire comme on me l'a appris à l'école.

elle y retira sa bouteille.

je t'aime,
ne m'oublie pas s'il te plaît
émilie.

elle avança vers la mer un peu agitée.
et y déposa ses mots.

elle resta un moment dans l'eau froide, elle voulait être sûre que sa lettre allait rejoindre le ciel

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elle resta un moment dans l'eau froide, elle voulait être sûre que sa lettre allait rejoindre le ciel. quand elle fût assez loin, elle recula pour allez s'asseoir sur le sable.

les pensées vides, elle laissa nager ses larmes sur ses joues. contemplant la mer, elle ressentit soudain une vague de chaleur à sa main droite, quelque chose s'était insérée dans sa paume; c'était un pendentif qui avait la forme d'une baleine bleue.

elle pensait ne plus pleurer - au moins ce soir mais finalement les sentiments ont eu raison d'elle. la mer coulait de son visage.

─ 𝐛𝐢𝐥𝐥𝐢𝐞 𝐥𝐚 𝐛𝐚𝐥𝐞𝐢𝐧𝐞.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant