Cases

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J'ai changé.
J'ai énormément changé, depuis le collège. Juste par l'idée que personne ne me connaissait, que je pouvais changer de personnage, de masque.
Il a suffi d'un jour de septembre pour que je devienne joyeuse, énergique, que je rie trop fort. De toute façon, le lycée est dans cet esprit.

J'ai changé. J'ai changé plein de parties de moi-même, pour mieux rentrer dans les cases. Elles sont pas très modifiables, les cases, je déborde encore de la mienne. Mais c'est beaucoup plus confortable d'être dans une case que d'essayer d'arrondir les angles lorsqu'on est carré. Les cases, ça fonctionne bien, alors tout le monde rentre dedans.
Mais je dépasse encore de trop. Pas que je sois une "artiste", non, c'est une case différente, plus élastique, mais une case quand même.
Non, j'ai une bosse qui dépasse, que je n'arrive pas à ranger. Quand je parle, j'essaye toujours de me prouver. Il faut toujours maintenir l'attention de l'interlocuteur. Et avec les anecdotes pourries que j'essaye de raconter, c'est pas évident.

J'ouvre des tiroirs, à l'infini, des heures plus tard je me dis que je n'ai toujours pas dit à Machine ce truc urgent parce que ça m'avait fait penser à une blague. À l'oral, je n'arrive même pas à ce que mes amis m'écoutent, alors imaginez mes profs... Je dois être rare : une intello qui commence l'année avec des 2.

Alors voilà, je ne sais pas raconter. Mais dans mon nouveau rôle, il y a la caractéristique "bavard". Alors quand il y a un blanc, je parle. Je ne dis rien, mais je parle. Un mot imaginaire qui revient, neu, beu, bou, bu, zibobo selon les années; ou bien un bonjour, une poignée de main, ça fait mieux en société.
Je peux ne même pas écouter. Je peux être au téléphone : je n'écoute pas l'autre, je regarde autre chose, puis quand il a fini, je dis beu, comme ça, parce qu'il faut bien que quelqu'un parle.

Vous me direz, facile de se plaindre que les autres n'écoutent pas quand on n'écoute pas soi même.
Ben vous avez raison. Je ne me plains pas des autres. C'est juste moi : quand je parle, c'est pas clair, quand on me parle, je n'écoute pas. Ou pire, on me parle d'un truc sérieux, je n'écoute pas, et je comble le vide avec un running gag.

Edgy me.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant