La belle étoile

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Ben non, jpeux pas, va y avoir Armelle.
C'est sûr. Va y avoir Armelle
Ben oui évidemment qu'il va y avoir Armelle
Et pis elle va s'inquiéter, non, je peux pas, y va y avoir Armelle.
Non vraiment, va y avoir Armelle alors c'est sûr.
Va y avoir Armelle.
C'est sûr, je peux pas.

Bon.

Je devais pleurer aujourd'hui.
C'était annoncé à ma météo de toute façon, et puis cette femme toxique n'aura fait qu'accélérer le processus. Étonnamment, cette mère n'était pas la mienne.
Et puis mes neurormones ont encore voulu me faire tourner en bourrique, mais cette fois c'était trop loin. Je me suis dit que l'année prochaine, encore, ils me feraient tourner la tête et qu'encore une énieme fois je ne me croirais plus moi-même.

Ce soir, je n'avais lâché qu'une larme, à une blague de trop qui, enfin, refermait le clapet de cette affreuse bonne femme.
Je n'allais pas être satisfaite de ça.

Cela fait sept jours. Sept minuscules petites séries de vingt-quatre heures. Ça peut être une seconde. La suivante serait pleine de bosses, et les suivantes bourrées de crises, mais qui n'éclateront jamais, de peur de n'inquiéter une soeur ou deux.
Sept jours seulement, et pourtant me revoilà dans une maison que je connais, enfin, un appartement que j'ai déjà vu.

Je retrouve une famille, pas la mienne. Elle m'adopte, la belle affaire. Les chats ne sont pas partis et pourtant ce ne sont pas les mêmes sur le devant de la scène, les classiques sont déjà en coulisse.
Me voilà dans une nouvelle maison. Puis un parc, un hôtel. Enfin la pure liberté, même les clés, mais non, on est trop fatigués.
Évidemment.
Puis la nouvelle maison. Puis une voiture, que je commence à connaître. Puis la maison que je reconnais, enfin, celle que j'avais déjà vue. Une virée chez un danger, et nous revoilà, pour un jour ou deux. Après demain nous repartirons, encore, mais même si je sais que je rentre chez moi, j'ai juste l'impression de vagabonder une fois encore.

Quelle est ma maison ? Je ne la reconnaîtrais plus.

Je l'imagine. Sa familiarité m'agace. Cette maison me manquerait et m'énerverait en même temps.

Ce soir, je n'avais pleuré qu'une larme, fluide, qui descendit ma joue comme si la peau n'était pas un obstacle.
"Bonne nuit" ai-je entendu. Familier, encore. Ce bonne nuit, qui n'en est pas un, qui veut dire "je vais dormir, tais-toi".

Ce bonne nuit c'était le même au bout du fil, lorsque dormir c'était se retrouver face à un fusil d'assaut, être seul, seul, terriblement seul à attendre la mort, et ne pas se réveiller.
Ce pauvre bonne nuit, sans volonté.

Alors j'ai regardé le plafond. Je me suis dit que je n'allais pas dormir. Plus que ça, que merde, j'allais écouter ma musique. Que j'allais me relever, et même sortir de la chambre.

Cela fait sept jours que je ne vois pas ma maison, que je n'entends pas ma musique, que je ne vois pas mes invisibles, que je ne parle plus aux meilleurs de mes amis. Et bien quatre ans que je ne me reconnais plus dans une glace.

Alors j'ai attendu. Je me suis fixée ce qu'il fallait que j'écoute.
Je me suis relevée le plus silencieusement possible, j'ai pris mon téléphone et son câble, mon casque.

Et mon copain a bougé.
Évidemment, il s'est réveillé. Il ne dormait pas aussi promptement. Évidemment il a oublié ce que je lui ai tant répété : si je pleure, s'il faut que je pleure, surtout partir. Si je ne veux pas parler, surtout partir. Si je veux penser, surtout partir.
Il a voulu me retenir, me mettant sur sa conscience. Tout de suite il n'était plus fatigué, non. Là, il pouvait m'embrasser, m'enlacer pour que je reste.
Pour que je soie là, allongée comme un squelette à côté de lui? Jamais, il n'allait pas m'interrompre cette fois. Il savait que je partais, la belle affaire. Tant pis pour lui.

Je lui ai fait comprendre qu'il ne me ferait pas rester. Je suis partie dans le salon, ai mis mon casque.
Les premières larmes n'ont pas tardé.
Cette musique a-t-elle déjà été aussi vraie...?

Jvoudrais partir d'ici/ si personne me comprend, car j'ai moins peur du vide/ que de faire semblant.

En grand fracas, je suis sortie.
Ça fait du bien. Tellement de bien.
J'ai griffonné un peu sur une page, pour voir qui j'étais.
Me suis allongée. J'étais bien. J'aurai bien dormi là. Ç'aurait inquiété mon copain et les parents, la belle affaire ? Au moins les miens m'auraient enfin crue quand je demande un psy.

Non, sinon les passants, c'est vrai qu'une fille en pyjama dans le jardin d'un collège ça fait étrange.
Mais ce n'est pas comme si j'allais les revoir. Je n'aurai pas pu faire ça, car Armelle se serait inquiétée. Et puis on ne me croirait plus pour rien.
Pourquoi.....?

Mon mouchoir se fit court, je suis rentrée. Je ne suis pas prête à revenir dans un lit avec quelqu'un d'autre dedans. J'allais dormir dans le canapé, mais pareil, Armelle se serait inquiétée, elle pensera qu'on s'est disputés, et lui aussi penserait ça.

Ce n'est pas à lui de me réparer.














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Il doit dormir maintenant. Ce sera mon lit, avec quelqu'un dedans, mais tant pis. Je ne veux pas qu'il m'accueille, j'en ai marre qu'il s'inquiète parce que je suis moi. La paix.



Bonne nuit.

Edgy me.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant