Lové, aimé, hanté.
La barque file sur les pelotes de laine, et derrière elle, du rouge, du vert, du bleu, du mauve.
A la proue, tu agites le bras, en proie aux embruns, aux mains du destin.
Tes lèvres se desserrent. Ton rire, tes mains.
Et tes doigts filent sur le piano où des fleurs ont poussé. Ils déplient des airs mariés aux arabesques arrangées : ta voix, ton chant, ambrés. Les après-midi s'allongent sur le divan de notre jeunesse. Les soleils d'hiver dorent nos rencontres, nos joies, nos caresses.
L'émoi brise le souvenir, les poings cognent contre les vitres étanches du passé : la bride abattue du regret a émoussé la fine pellicule qui tourne à rebours. Encore. Et Encore.
La barque file vers de nouveau continent. Et toi à la proue, tu salues gaiement tous les austères habitants.
Ta robe blanche tombe sur tes genoux écorchés, tes joues s'affaissent sur ta mâchoire abîmée : ta peau s'écaille, ta voix s'éteint.
Bientôt tu bascules, ton dernier bain.
Tes cheveux flottent un instant à la surface de l'eau, et ton cou, ton nez, tes joues.
Tous disparus. Tous avalés. L'amour vécu s'est envolé.
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Mots en nage.
Poezja[Poésie.] - Attends, j'ai perdu quelque chose, je reviens ! - Qu'est ce que c'est ? - Je... Je crois que je ne sais plus. Je crois que j'ai oublié... J'ai oublié les traits de son visage...