Chapitre 2 : L'évasion

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L'explosion à Arkham avait été produite de telle sorte qu'elle fasse s'effondrer une partie des canalisations, créant là un espace suffisant pour se faufiler et suivre le petit dédale qui finissait par aboutir jusqu'à la civilisation. Après suivi ce chemin aussi sombre que malodorant le Joker avait débouché en plein cœur du centre-ville, surgissant d'une plaque d'égout, et s'était habilement glissé de ruelle en ruelle, tapi dans l'ombre, traversant toute la ville sans qu'âmes qui vivent ne le repèrent.

Alors oui, il avait bien mérité quelques secondes de répit pour reprendre son souffle, car après toutes ces péripéties il sentait la fatigue le gagner – fatigue accentuée par la quantité de sang qu'il avait perdu à cause de cette fichue balle qui avait cru bon de venir rencontrer son bras d'un peu trop près. Il avait pris quelques instants pour regarder la plaie, ce qui lui avait permis de constater qu'il n'y avait là rien d'alarmant. La balle avait simplement frôlé sa chair et, même si cela était peu agréable et relativement sanguinolent, au moins la balle n'était pas restée logée. Avec un bandage et du temps de cicatrisation, il serait à nouveau comme neuf.

Suite à l'inspection de sa blessure il s'était décidé à se remettre en route, toujours aussi discrètement. Il avait porté son choix de destination sur un endroit qu'il connaissait et où passer la nuit, voire même potentiellement quelques jours, histoire de reprendre des forces et de s'organiser un peu. Un endroit désert où il pourrait avoir tout le calme qui lui était nécessaire avant de préparer la tempête à venir.

A force de marche, l'endroit qu'il avait en tête apparut finalement sous ses yeux. Le Joker était à présent à l'autre bout de la ville, dans un quartier miteux et délabré presque entièrement abandonné. L'immeuble qu'il visait l'était en tout cas. Il s'agissait d'un ancien hôtel peu luxueux où les braves citoyens de la ville venaient à l'époque louer des chambres pour passer quelques agréables moments en compagnie des prostituées d'un mac' du coin. Lorsque le type avait été arrêté, environ un an plus tôt, le propriétaire de l'hôtel était tombé avec lui. Depuis, l'endroit avait peu à peu été laissé à l'abandon, tout comme le reste du quartier - qui devait peut-être se faire raser prochainement pour se voir être reconstruit à neuf.

Le Joker connaissait le bâtiment et savait que la porte d'entrée avait été condamnée, de même que la plupart des fenêtres. Mais dans l'arrière-cour se trouvait un petit passage menant à la cave, et la dernière fois qu'il y était passé il avait constaté qu'elle n'était fermée que par un simple cadenas. Avec un peu de chance, il trouverait bien dans le coin de quoi faire sauter le bout de ferraille pour pénétrer dans les lieux.

Sauf que, surprise : une fois arrivé dans la cour et devant la petite entrée de la cave, il constata que le cadenas n'était plus là. La voie était libre. Mais... si elle était libre pour lui, c'est qu'elle avait été libérée par quelqu'un avant lui – ce quelqu'un pouvant éventuellement se trouver à l'intérieur du bâtiment.

Le fugitif passa sa main sur l'arme coincée dans le bas de son dos par l'élastique de son pantalon de détenu, d'un blanc sale parsemé de tâches de sang. Il avait volé le flingue un peu plus tôt, durant l'émeute, sur le cadavre d'un policier à qui il ne manquerait plus. Au passage il avait également croisé un de ses camardes de détention à terre, conscient mais trop amoché pour se relever ; le clown en avait donc profité pour lui subtiliser le couteau qu'il avait eu en main.

Un flingue et un couteau. C'était plus que suffisant que se débarrasser d'un éventuel squatteur dans le vieil immeuble. Un squatteur, voire deux... Mais peut-être pas beaucoup plus. Car tout de même, le Joker devait admettre qu'il n'était pas au top de sa forme. Il faudrait donc qu'il se fasse discret en pénétrant dans l'immeuble et qu'il en inspecte absolument les moindres recoins pour évaluer au mieux la situation.

Il ouvrit précautionneusement la petite double-porte incrustée dans le béton qui donnait sur la cave. Une fois entré, le Joker fit quelques pas et rencontra assez rapidement les escaliers menant au rez-de-chaussée. Il gravit les marches doucement, répartissant son poids du mieux possible pour ne pas faire grincer le bois sous ses pas. Une fois devant la porte en bois, il sortit son arme et pénétra lentement dans le hall.

Là aussi, l'obscurité régnait. Il lui fallut quelques minutes pour que sa vue s'acclimate puis, peu à peu, il entreprit d'explorer les lieux. Il passait de pièce en pièce furtivement, prêt à rencontrer une éventuelle personne qui n'aurait pas dû se trouver là. Mais, pour le moment, l'endroit était désert.

Il fit de même pour le premier étage, inspectant les chambres une à une, se déplaçant telle une ombre glissant dans la nuit. Là non plus il ne rencontra rien d'autre que de vieux meubles poussiéreux, des toiles d'araignées et de la moisissure.

Le deuxième étage était semblable au premier, à la différence près que les fenêtres n'y avaient pas été barrées par des planches en bois. Sûrement que la mairie n'avait pas voulu se ruiner en bouts de bois inutiles et avait jugé suffisant de barricader les ouvertures du rez-de-chaussée et du premier étage. Le Joker y voyait donc un peu plus clair grâce aux rayons de lune qui passaient au travers des vitres ; mais, pour autant, il ne vit pas de trace d'être vivant où que ce soit.

Il ne restait donc plus que le troisième et dernier étage à inspecter.

Il savait qu'à l'époque c'était là que le proprio de l'hôtel habitait, préférant résider directement sur place pour percevoir ses petits loyers. Le Joker y avait été invité une fois pour magouiller avec l'ancien proxénète, en compagnie dudit proprio qui lui avait servi un agréable petit cognac. Dans ses souvenirs, l'appartement de l'étage était relativement grand et était même équipé d'une cuisine – ce qui n'était pas le cas des chambres situées dans les étages au-dessous. L'appartement serait donc le lieu idéal pour que le Joker s'y établisse quelques temps. Son arme toujours en main, bien qu'agitée de quelques tremblements du fait de sa blessure au bras, il la pointa néanmoins bien droit devant lui. Car si squatteur il devait y avoir, ce serait sûrement là aussi qu'il aurait pensé trouver refuge.

Il gravit donc lentement le dernier escalier et arriva devant l'unique porte de l'étage, donnant sur le grand appartement. Le Joker s'arrêta quelques instants et écouta avec attention ; seul le silence lui répondit. Alors, délicatement, il entreprit d'entrouvrir la porte. Celle-ci émit malgré tout un faible grincement, qu'il stoppa d'un geste. Il ne bougea pas d'un pouce, sur ses gardes, tout en inspectant l'intérieur des lieux du regard.

Depuis le pas de la porte il avait vue sur une partie du salon. Il n'y avait là rien d'extraordinaire, mais il fut interpellé par une faible lumière qu'il voyait émaner d'une autre porte au bout de la pièce. Il y avait donc bien quelqu'un là dedans...

Il resserra la prise sur son arme en voyant que, justement, la porte du bout de la pièce s'entrouvrait peu à peu, laissant passer un peu plus de lumière dans le salon. Et là, dans l'embrasure de la porte qui menait probablement à une chambre, il vit se découper une silhouette. Une toute petite silhouette.

Puis, dans la lueur de la lumière blafarde, se révélèrent à sa vue deux petits yeux noisettes teintés d'innocence et de surprise.

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Voici donc la suite directe du chapitre précédent, j'espère qu'elle vous donnera envie de découvrir les événements à venir !

Je garde le rythme d'une publication par semaine ; je vous dis donc à samedi prochain pour le chapitre suivant :)

L'ange et le JokerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant