16 : Confusion, Énigme, Saisons

21 3 8
                                    

Thèmes par salomebtn
Ici Will a 13-14 ans

TW : homophobie (sous-entendu), chantage...?

Ça faisait plusieurs récréations qu'il l'observait du coin de l'œil. Il n'avait rien d'autre à faire, de toute façon, vu qu'il n'avait pas vraiment d'amis. Juste des camarades de classe qui préféraient traîner avec leurs propres amis plutôt que lui. C'est pas comme s'il voulait traîner avec eux de toute façon. Mais celui-là avait l'air... mieux. Plus gentil. Et penser ça serrait le ventre de Will à un tel point qu'il avait l'impression de suffoquer. Ça aurait dû être une bonne nouvelle, de pouvoir se rapprocher de quelqu'un. Mais non. Vraiment, vraiment pas. Le collégien était terrifié. Il savait ce que son père en penserait. Celui-ci l'avait dit devant lui, d'une voix forte, de façon à ce qu'il soit entendu. Mais le petit blond avait tout de même envie d'aller vers l'autre garçon, malgré le rouge lui montant aux joues dès qu'il y pensait. Car il avait l'impression que même si plusieurs saisons passaient, ce qu'il ressentait ne changerait pas. Alors autant être honnête maintenant, non ?

"Qu'est-ce que tu regardes ?"

La remarque, lancée d'un ton agressif, le sortit de ses pensées alors qu'il se tourna vers le possesseur de la voix, ou plutôt la possesseur. Elle le fixait avec des yeux plissés, entourée de sa bande d'amis.

"Qu'est-ce que ça peut te foutre ? répondit-il d'une voix toute aussi sèche, les bras croisés.
- Ça m'intéresse, c'est tout. Tu le regardes depuis cinq minutes. C'est bizarre, quand-même..."

Will sentit une pierre tomber sur son estomac. C'était pas bon. Pas bon du tout. Il fallait qu'il fasse attention ; il était dans un collège privé parce que son père l'avait voulu, et ça... Ça ne passerait pas.

"Je m'ennuyais juste, balbutia le blond, la voix remplie de confusion, ne sachant pas comment se défendre.
- Et donc tu mates les gens quand tu t'ennuies ? C'est... suspect.
- Non. Ça l'est pas. Laissez-moi tranquille."

Il essayait de reprendre un peu d'assurance, malgré le regard énigmatique de la jeune fille devant lui, et les yeux curieux braqués sur lui. Voyant qu'on ne cesserait pas les questions tant qu'il resterait ici, il se leva en lâchant une injure, ramassa son sac qui traînait par terre et s'éloigna à grands coups d'épaule. Il serra les dents quand une main l'attrapa pour le retenir.

"Quoi ? Qu'est-ce que vous me voulez, merde ?!
- Pourquoi tu mens ?
- Je mens pas !"

Will tenta encore une fois de se dégager avec violence, mais son sac frappa malencontreusement la jeune fille qui l'avait abordé. Elle poussa un cri et il se figea. Il avait merdé, et pas qu'un peu.

"Pourquoi tu l'as frappée ?!
- J'ai pas fait exprès ! se défendit le blond d'un ton désespéré."

On lui lança des regards noirs et il fut poussé au sol tandis qu'on se regroupait autour de la collégienne, qui n'aurait probablement rien de plus qu'un bleu sur l'épaule. Will resta sur le gravier, les mains écorchées. Ce n'était pas la peine de fuir. Ils allaient l'accuser, de toute façon, vu les larmes que versaient la fille. Quelqu'un se rapprocha pour lui adresser la parole :

"T'as pas intérêt à dire que t'as rien fait.
- C'est pas ce que je-
- C'est ta faute. Donc si tu essayes de te défendre... Souviens-toi qu'on a des trucs sur toi.
- Quoi ?
- Tu sais très bien !
- Mais..."

La voix étouffée de Will ne parvint pas à finir la phrase et mourut au fond de sa gorge. Son interlocuteur avait raison : il savait ce qu'ils avaient sur lui, mais préférait ne pas y penser. Il déglutit en foudroyant le sol noir d'un regard sombre, commençant à sentir monter plus la colère que la peur. Parfois, il avait l'impression qu'absolument tout était contre lui. Même son père. Qui allait sûrement l'engueuler dès qu'il rentrerait à la maison, et ne le laisserait pas s'expliquer. Mais il ne pouvait pas se plaindre, si ? C'était son père. Il l'avait recueilli. Il s'occupait de lui, ou du moins c'est ce dont Will essayait de se convaincre, car ses sentiments vis-à-vis de l'homme aux yeux gris étaient de plus en plus conflictuels. Il n'eut pas le temps de plus réfléchir : une surveillante arriva et il fut emmené dans le bureau du CPE sur le champ, en sentant peser sur lui les regards amusés du petit groupe de collégien à qui il devait cette humiliation.

Writober 2019Où les histoires vivent. Découvrez maintenant