4 : Jugement, Organisation

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Thèmes par salomebtn
Ici Will a 20 ans.

TW : La société est nulle, mentions d'abus

La juge le regardait d'un air accusateur, les sourcils froncés ; les jurés chuchotaient en lui jetant des oeillades rapides et remplies d'un sentiment qu'il ne pouvait pas décrire. Du mépris, probablement, comme lui en avaient témoigné la plupart des personnes qu'il avait rencontrées dans sa vie, à part quelques unes l'ayant aidé sans une once de pitié sans les yeux. Toutes des femmes, étonnamment. Si on lui avait demandé à ce moment ce qu'il pensait d'elles, il aurait dit qu'elles lui manquaient. Même celles qu'il n'avait vues qu'une seule fois. Si seulement sa mère comptait parmi elles.

Un raclement de gorge, puis une voix sèche se firent entendre, répétant ce que Will avait déjà entendu bien trop de fois ces derniers jours. Accusé de vol à l'étalage. Encore une fois. Mais il avait tellement faim. Si faim qu'il commençait à avoir peur de finir par supplier pour de la nourriture ou se contenter de fouiller les poubelles. Et il avait toujours faim. Est-ce que leur but était de le tuer avant qu'il se retrouve en cellule ? Il avait piètre allure, avec des yeux soulignés de cercles violets et des hématomes, des vêtements rapiécés et abîmés, une respiration encore sifflante après une vilaine maladie et la tête baissée, ayant du mal à supporter l'ambiance de la salle.

Son visage fit face au tribunal quand vint le moment du jugement. Il avait encore un peu d'espoir, une minuscule flamme, qui fut balayée avec violence par la sentence. Un an et six mois de prison dont un an avec sursis. Le condamné s'arrêta de bouger, ne s'autorisant presque plus à respirer. Ses mains vinrent couvrir son champ de vision alors qu'il poussait un cri silencieux, plein de haine et de rage pour cette organisation qui avait décidé qu'il devait être enfermé pour deux pauvres boîtes de conserve. Il avait envie de leur hurler dessus, mais il s'abstint par peur d'être puni plus sévèrement encore. Le cri enfla, gonfla dans sa poitrine, prenant toute la place entre ses côtes, repoussant ses organes contre celles-ci, se débattant, furieux de ne pas pouvoir sortir. Mais Will, pour une fois, tint bon. La mâchoire serrée, il fixait la femme assise sur son grand trône en bois avec un regard orageux ; on aurait presque cru que le bleu verdâtre avait tourné au gris.

Il lui fit ensuite intimé de se diriger vers la sortie, qui n'était qu'à quelques mètres ; la salle était petite, le procès s'était tenu très rapidement. En marchant d'un pas sec, il glissa un regard aux bancs sur sa gauche. Vides. Personne n'était venu le soutenir, et ce n'était pas comme s'il s'attendait à ce que quelqu'un soit au courant de ce qu'il se passait dans sa petite vie insignifiante. Enfin, sauf son père, évidemment. Il savait probablement pour l'arrestation et attendait avec délice un coup de téléphone lui annonçant que son bon à rien de fils allait en prison une nouvelle fois. Will n'avait pas besoin de voir ce sombre connard pour savoir qu'il l'observait toujours d'un œil presque amusé. Qu'est-ce qu'il avait dû se marrer, en voyant le jeune homme se traîner dans la boue sans réussir à joindre les deux bouts. Et bien que celui-ci essayait de ne plus penser aux dures paroles de son propre père, il devait s'avouer vaincu. Jonathan avait raison. Il n'était qu'un bon à rien et ne serait probablement jamais plus.

Writober 2019Où les histoires vivent. Découvrez maintenant