6 •

109 12 1
                                    


— Sacha !

Linda s'approche de moi toujours avec sa fidèle queue de cheval et ses yeux bleus perçants.

— Ça va ? demanda-t-elle en posant une main sur mon épaule.
— Ouais ça va et toi ?
— Maintenant oui puisque tu es là.

Elle me sourit, je le lui rends timidement.
D'accord, Linda a un crush sur moi apparement, mais ça ne changera rien à notre relation. Je n'éprouve que de l'amitié pour elle et je ne peux pas me forcer pour plus. Ça ne mènerait à rien de toutes façons.

— Alors, où étais-tu ? Tu as raté deux heures de cours ce matin. En plus je constate que tu as des cernes. Tu n'as pas bien dormi ?

Elle touche mes cernes avec ses doigts, je recule mon visage.

— Ne t'inquiète pas Linda, tout va bien, j'ai juste eu une panne d'oreiller puis quand j'ai voulu venir en deuxième heure, la psychologue m'a interpellé car elle souhaitait me voir.
— Qu'est-ce qu'elle te voulait ?
— Oh rien de spécial.
— Ne me roule pas, Sacha. La psychologue ne s'entretient pas avec n'importe qui comme ça.
— T'es déjà allée la voir toi au fait ?
— On ne parle pas de moi là, Sacha, lâcha-t-elle en levant les yeux au ciel.

J'ai craqué un petit rire.

— C'est juste que quand tu es sorti brutalement de la salle le jour de l'annonce du décès... la CPE et la psychologue ont dit que tu savais peut-être des choses mais que tu n'étais pas prêt à en parler. Ah et que tu étais sous le choc aussi.

C'est le moins qu'on puisse dire.

— Écoute Linda, je ne peux pas te parler de ce qu'on s'est dit avec la psy.
— On est meilleurs amis depuis la 6e, Sacha, tu ne me fais pas confiance ? fit-elle en se rapprochant de moi et en posant ses mains sur mon torse.

Elle me regardait avec ses yeux de chien battus. J'aime pas quand elle fait ça, surtout que ça ne marche pas sur moi. Je ne sais pas si elle pense que ça va me séduire ou quoi mais si c'est ça, elle a tout faux.

— Linda, force pas s'il te plaît.

Je me recule et je me retourne en la laissant en plan sous le préau.
J'allais à la quête de mes potes quand la sonnerie a retenti. Je me suis donc dirigé vers la salle du cours suivant.

{...}

Fin de journée, fin des cours, je suis rentré chez moi, j'ai mangé mon éternelle amie la pomme et je me suis réfugié dans ma chambre. Mon père n'est pas là et ma mère est dans son bureau en pleine écriture je pense.

En parlant d'écriture, je m'assois sur mon lit pour continuer Clair Obscur, le fameux journal de Sahara.

Enfant abandonnée, enfant perdue
J'ai échappé au piège qui est la rue

Jolie femme m'a adoptée
A l'orphelinat même, elle est venue me chercher
En France, elle m'a emmenée

Elle m'aimait, je l'aimais
De tout mon cœur mais le sien a lâché
Loin de moi, une maladie l'a emportée
Dix ans plus tard, je me suis encore sentie abandonnée

Bouleversant. Elle a raconté comment elle est arrivée en France avec cette dame qui l'avait adoptée mais qui a malheureusement perdu la vie à cause d'une maladie, tout ça sous forme de poème, c'est tellement jolie la façon dont elle arrive à raconter ce qui lui est arrivé sous cette forme. C'était peut-être son moyen à elle de ne pas se laisser submerger par ses émotions en les ordonnant en poèmes écrits dans un journal pour les canaliser en quelque sorte.

— Chéri ?

Ma mère venait de pénétrer dans ma chambre.

— Euh, tu ne toques pas ?
— Ah si, j'ai toqué trois fois mais tu ne répondais pas.

Sans doute.

— Hypnotisé par ce carnet je suppose.

Je ne réponds rien. Son regard se pose sur Clair Obscur puis sur moi.

— Non, tu ne le liras pas, maman.
— Qu'est-ce qu'il y a de si secret dedans ?
— Pourquoi tu insistes ?
— Parce que tu es plongé dedans H24, je veux savoir. Tu oublies que je suis écrivaine.
— Tu ne vas quand même pas voler les écrits d'une personne ?
— Quoi ?! Non ! Jamais ! Ce n'est pas un livre ?
— Non, ce sont les écrits d'une personne.
— Vraiment ? C'est Linda ? Elle veut se faire éditer et demande d'abord au fils d'une écrivaine ce qu'il en pense ? lance-t-elle avec un sourire malicieux.
Non, t'y es pas du tout.
— Mais dis-moi alors.
— Non. Pas pour le moment.
— Ah donc tu vas me le dire plus tard ?
— Si tu me harcèles comme ça, non.
— Ok, dit-elle en faisant la moue.

Au même moment, mon père entre dans ma chambre.

— Oh, il y a une réunion de famille sans moi.

Ma mère et moi levons les yeux au ciel.

— Bah super l'accueil, dit-il. Je te rappelle que tu as sport ce soir, p'tit bonhomme.

Je hausse un sourcil, "p'tit bonhomme" ?! J'ai plus 5 ans !

— Bon ok le surnom j'aurais pu éviter.
— J'te le fais pas dire, soufflé-je entre mes dents.
— Mais bref, tu as basket, t'as oublié ?
— Non non , j'allais me préparer.
— Ou alors tu es fatigué, mon chou ?
— T'inquiète pas maman, je pète la forme !
— Tu veux que je t'accompagne ?
— Non, je peux y aller seul.

Elle me regarde avec insistance.

— T'inquiète pas maman.

Elle acquiesce et quitte ma chambre.

— Quand c'est maman qui donne des surnoms, ça ne riposte pas, marmonne mon père.

Ma mère revient en le regardant de travers puis repart.
Mon père lève les mains en l'air innocemment et hausse les épaules. Je rigole de la situation puis il quitte ma chambre à son tour.
Je suis assez perturbé par tout ça mais je trouve quand même la force d'aller au basket. C'est ma passion depuis que j'ai sept ans et je m'y plais bien dedans. Je ne compte pas abandonner.





À suivre
...

S A H A R A | Clair ObscurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant