Chapitre 29 - Ne jamais remettre à demain ce que l'on peut faire aujourd'hui.

1.4K 67 0
                                    

Pourquoi j'avais réagi comme ça ? Je n'avais pas à avoir honte. Oui, j'aimais l'homme qui m'avait agressée, ça n'a rien d'étrange ou de gênant.
Bien sûr que si ça l'était, et ce n'est pas seulement parce que tous les américains coincés dans leur routine ennuyante à mourir décidaient que c'était mal, c'était parce que ce n'est pas sain d'aimer une personne qui nous a fait du mal.
C'est ce qu'Anne aurait dû me dire, mais elle ne l'a pas fait.
Est-ce que des journalistes l'ont payée pour qu'elle raconte le contenu de nos séances aux journalistes ?
C'était des cafards prêts à tout alors pourquoi pas ?
Je gagna l'entrée de la prison, passa tous les contrôles pour enfin arriver devant le gardien de prison posté devant le parloir.
- Bonjour, Stella Summers, j'aimerais voir Dean Mackenzie.
Je mis ma carte de visiteur devant ses yeux vides.
- Ça ne va pas être possible mademoiselle.
- Eh pourquoi ?
- Le détenu Dean Mackenzie a été transféré.
- Pardon ? Où ça ?
Mon cœur était sur le point de trouer ma poitrine.
- À l'hôpital.
Puis soudain, il arrêta de battre. Le temps s'arrêta pendant une nano seconde et je compris.
C'était la fin. Je le sentais. Je le savais.
Dean s'était fait battre. A mort. Ils l'avaient eu. Ce n'était qu'une question de temps.
Mes jambes me lâchèrent et sans que je puisse m'en rendre compte mon corps venait fracasser le sol dans un bruit sourd. Les bruits se faisaient lointain et les paupières devinrent lourdes. Peu à peu, je sombrais dans l'obscurité.

- Ça y est, elle se réveille.
J'ouvris difficilement les yeux, tout était blanc mais une tête brune se tenait au dessus de moi.
Aria.
Puis ma mère.
Et ma petite sœur.
Enfin mon père.
Ils semblaient tous inquiets et moi j'étais encore dans une foutue chambre d'hôpital.
Puis je me souvins.
Hôpital.
Dean.
Je sortis de mon sommeil avec violence. Ma respiration était saccadée et le flou se dissipa doucement. Je reprenais mes esprits.
- Calme toi ma chérie.
Ma mère venait de poser sa main sur mon épaule, je me souviens pas de la dernière fois où elle avait été aussi affectueuse.
- Maman il faut que...
Une infirmière traversa à toute allure la chambre d'hôpital.
- Il faut vous reposer Stella.
- Non, je veux voir Dean.
- Qu'est-ce que tu racontes ?
Ma mère était furieuse. L'infirmière se hâta d'injecter un autre produit à l'aide d'une seringue. Et bientôt mes yeux se refermèrent.

J'étais rentrée à la maison depuis deux heures maintenant. J'avais allumé la télévision dans ma chambre, faisant défiler les informations mais aucune ne mentionnaient Dean.
J'étais terrifiée, je ne savais pas ce qu'il se passait et cela m'inquiétait terriblement.
Mon téléphone bipa. Sûrement encore un curieux lycéen qui voulait prendre de mes nouvelles.
Pourtant, quelque chose me dit d'aller voir.
C'est terminé. Il est mort.
Ce message provenait d'un numéro inconnu. Mais qui cela pouvait-il être ?
Il parlait de qui ? Dean ? Non je ne pouvais pas le croire.
Je ne voulais pas le croire.
Qui es-tu ?
Quelques secondes s'écoulèrent. Mon cœur battait tellement vite que ça me faisait mal.
C'est Jordan. Dean s'est fait tuer. Par ta faute.
Non.
Non.
Non.
S'il vous plaît non.
Non. Non. Non.
Ça ne pouvait pas être vrai.
Mes mains se tétanisèrent et mon téléphone s'écrasa sur le sol.
J'avais tué celui que j'aimais.

J'avais supplié Jordan de me donner les informations relatives à l'enterrement de Dean. Il l'avait fait, conscient que son frère aurait voulu que j'y sois, mais il m'en voulait terriblement. Je m'en voulais aussi.
En toute honnêteté, à cette période je ne réalisais pas bien ce qu'il se passait. Je n'avais pas encore admis le fait que Dean avait disparu, pour toujours.
Je n'avais pas réalisé que j'étais en grande partie responsable de sa mort, même si une petite voix venait me le répéter tous les jours, elle s'appelait la culpabilité.
J'étais dans le déni. J'étais tellement instable émotionnellement que mon corps a refusé de me donner une charge en plus. Il a décidé qu'il valait mieux que j'encaisse le coup plus tard, quand j'aurai digéré ce qui s'était produit précédemment.
Il fallait que j'assiste aux funérailles, j'en avais besoin. J'avais besoin de voir son cercueil pour y croire.
Je m'étais simplement vêtue d'une robe portefeuille noire et de chaussures à talons plats. Je ne voulais pas attirer l'attention, je voulais simplement lui dire au revoir.
Je suis montée dans ma voiture tant bien que mal, ces foutus journalistes avaient fait leur retour depuis l'annonce de la mort de Dean.
Nous étions plus les amants maudits. Nous étions plus rien. Mais les médias avaient décidé que « La veuve noire » était le moyen le plus vendeur de me qualifier.
- Vous vous rendez aux funérailles de Dean ? Ses frères seront présents ?
- Stella, portez-vous du noir pour honorer la mémoire de votre bien-aimé ?
Mais qu'est-ce que c'était ces questions ?
Ça en était trop. Je ne pouvais plus supporter leur interrogatoire aussi ridicule qu'indiscret.
Avant d'empoigner la portière de ma voiture, je leur fis face.
- Allez vous faire foutre bande de connards !
Je me rua sur un des journalistes, empoignant son appareil photo.
- Cassez-vous de ma maison bordel !
Face à l'agitation, un policier posté devant la maison vint démêler cette situation épineuse.
J'étais essoufflée et triste. Je voulais juste qu'on me laisse tranquille.
- Est-ce que ça va mademoiselle Summers ?
Le policier avait écarté les journalistes qui me filmaient pour relayer mon pétage de câble. Il se tenait à présent devant moi, une main sur mon épaule.
- Oui ça va merci.
- Vous voulez que je vous accompagne ?
Surtout pas.
- Merci mais ça va aller.
J'ouvris la porte de ma voiture et le bruit du moteur me tira de ma stupeur. Je m'examina rapidement dans le rétroviseur et j'avais les yeux brumeux, hagards, comme si je venais de voir un fantôme.
Je roula aussi vite que je pu jusqu'au cimetière.
Jordan m'avait prévenu qu'il s'agirait d'une cérémonie simple et discrète, sans le corps de Dean.
C'était évident, la police ne le donnerait pas au gang le plus recherché de Californie.
Je n'avais pas besoin de son corps pour lui dire au revoir.
Je les vis, amassés en groupe, dans un coin du cimetière.
Je me joignis à eux, sans dire un mot. Il pleuvait et ma robe fut immédiatement trempée, pourtant je ne sentais pas la pluie toucher ma peau.
Un prêtre ? Enfin je ne sais pas trop ce que c'était mais un homme parlait de Dean, de la mort et bla-bla-bla. C'était assez déprimant. Je ne réalisais toujours pas.
Je ne pourrais jamais lui dire que je l'aime aussi. C'était terminé.
Je décida de le faire. Ici. Dans cette cérémonie.
- Je t'aime, dis-je dans un murmure imperceptible.
J'aurai du lui dire à la prison, mais c'était trop tard.

KIDNAPPÉE Où les histoires vivent. Découvrez maintenant