Chapitre 4 : Hallelujah ! :

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« You can't travel a path without being the path yourself »

« Tu ne peux pas voyager sur un chemin sans être toi même le chemin. » Bouddha

L'aurore fit son apparition, aussi vite que nos maux de tête, sacrée cervoise ! Même si je pense que ce n'était pas le seul alcool que nous avions ingurgité, cependant, il fallait que je me lève. Mais comment faire, mes jambes refusent de porter mon corps. En plus de ça, j'ai la bouche sèche et la tête qui tourne, elle tourne à une de ces vitesses. J'ai également ma vision qui me trahit, je vois en double, non en triple, peu importe, j'ai envie de gerber. Je me jetai alors, sur la première chose qui me sembla apte à recevoir mes restes. À mon grand dégoût quand je vis que j'avais atterri dans les latrines communes. Rappelez-moi de ne plus jamais, au grand jamais choisir les latrines. Voici donc mon réveil, peu ragoûtant je vous l'accorde. C'est alors que mes oreilles se firent agresser par un lointain et violent : « Bougez-vous ! Même ma grand-mère est plus rapide que ça ! Aujourd'hui, c'est le grand départ ! » Ça ne tenait qu'à moi, j'aurais fait une phrase pour charrier la fameuse grand-mère et son imaginaire rapidité. Mais c'est le grand départ ! Enfin le départ ! Putain que ça fait du bien. Je suis si pressé de m'éloigner des cotes. Rien n'avait plus de grâce à mes yeux que de mettre un terme à cette aventure. Avec mes camarades, on était déjà prêt, on n'avait pas mis longtemps. Notre technique consistait à sauter l'étape de la toilette. Alors certes, on puait, extrêmement fort, je dois bien l'admettre. Mais au moins, comme nous l'avions appris jadis, rien n'était comparable à la puanteur des Français. D'après les rumeurs, les Français sont tellement sales que ce sont les plus grands clients d'encens et parfums venus d'Orient. Ce qui me gonflait également chez les Français, c'est qu'ils se comportent trop, comme de majestueux étalons, fougueux, pleins de gloires et maîtres de tout. Mais au risque de déplaire, pour moi, ils ne sont que des bousiers qui jouent aux étalons. Mais par essence, ce sont des bousiers. Leurs seules fonctions sont de ramasser et remuer la merde partout où ils passent. Cependant, mon esprit fit rapidement volte-face. Je passais en un instant du pessimisme à un amusement extrême, j'avais atteint semble-t-il l'euphorie. Sur le chemin nous menant au port, l'esprit de camaraderie avait atteint son paroxysme. On sautait partout en criant. Will nous racontait ses fameuses blagues cochonnes, qu'il disait avoir gardé au chaud, jusqu'au jour où on reprendrait la mer. On dansait également, en se tenant par les épaules, ou par les bras pour certains. On balançait nos jambes de droite à gauche et puis on effectuait une révérence, qui selon nous ferait frémir de jalousie l'aristocratie anglaise. Puis tout naturellement, il vient un moment plus solennel. On se mit dès lors, à chanter. Pas n'importe quelle chanson, non, là, c'était un chant venu de notre chère Angleterre : « Mini it is while sumer ilast with fugheles song, oc nu neheth windes blast and weder strong, ei ei what this niht is long, and ich with wel michel wrong, soegh and murn and fast. » Cela signifiait : « Que l'été est amusant, lorsque les oiseaux chantent. Ah, mais voilà que la tempête et l'orage arrivent ! Ah, que cette nuit est longue, et je n'ai que souci et tristesse. » Après cette chorale, portait par l'ensemble des hommes composant cette armée, nous reprîmes notre route, avec autant si ce n'est même plus d'engouement qu'à nos premiers pas. Enfin, nous fûmes tout récompensés par la superbe vue de nos bateaux, à quai, se laissant bercer par les petites vagues. On savoura quelques instants la brise fraîche. Hallelujah ! Nous étions arrivés.

Traversée à contre-courantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant