Chapitre 3

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La première fois que je l'ai vu pleurer fut un jeudi. Il pleuvait énormément, mais je ne pouvais pas ne pas aller le voir, c'était tout bonnement inconcevable. J'avais donc entrepris un sprint mémorable de ma fac, jusqu'à l'hôpital, perdant mes poumons au passage.

Une fois arrivée et mon souffle repris, je m'étais dirigée vers la chambre de mon bonhomme. En ouvrant la porte, je l'avais vu recroquevillé sur lui même. Cette vision m'avait brisé le cœur, et j'avais alors accouru pour le prendre dans mes bras.

- Je te manque tant que ça bonhomme?

L'ombre d'un sourire traversa son visage déformé par la tristesse.

- Pourquoi tu viens me voir tous les jours ?

Sa question me surprit.

- Pourquoi pas ?

- Tu peux vivre toi, alors profites en, vis, au lieu de t'enfermer ici et de mourir avec moi.

Je ne m'étais pas attendue à ça, et je dois avouer que pendant une bonne minute je n'avais pas su quoi répondre, il ne semblait pas comprendre a quel point il m'était important d'être à ses côtés. Chaque jour, chaque moment passé avec lui m'était indispensable.

- Mon petit Nono, je suis exactement là où je devrais être, à tes côtés, tu ne te débarrasseras pas de moi comme ça.

Il avait alors reniflé d'une manière qui était toute sauf élégante avant de me lancer un léger sourire adorable, une moue qui lui était propre, innocente et adorable.

Je me souviens l'avoir accompagné pour son habituelle chimiothérapie et dans ses moments la Nono devenait une toute autre personne. Il ne riait plus et se contentait de fixer un point imaginaire à l'autre bout de la salle blanche.

J'avais alors pensé que la décoration était bien fade pour une aile pédiatrique. Cette pièce en plus d'affaiblir mon petit Nono, lui donnait le moral a zéro, l'air y était oppressant, sans vie, la lumière ne passait que par quelques pans des rideaux. Excédée, j'avais fini par ouvrir les rideaux, sous l'œil curieux du garçon. J'avais alors extirpé un stylo de mon sac et Nono semblait comprendre ce qu'il me passait par la tête;

- On va jouer a un jeu ?

J'avais alors acquiescé, et nous avions joué comme les deux enfants que nous étions.

- C'est quoi ton plus grand rêve ?

Je me souviens avoir répondu sans réfléchir

- Voyager, je veux voir le monde, découvrir des coins de paradis et trouver un endroit où je me sentirai chez moi.

Mes yeux s'étaient instinctivement fermés, rêvant à cet endroit où je serai apaisée, où je trouverai un équilibre.

- Et toi mon Nono ?

Il me répondit d'un air penaud.

- Vivre.

Ma respiration se coupa, et je me sentis alors atrocement mal, je venais d'étaler mes rêves de voyages alors que la seule chose qu'il connaissait et qu'il ne connaîtra jamais, c'est sa chambre d'hôpital. Ne sachant pas quoi dire, j'avais juste passé un bras autour de son épaule, le serrant contre moi. C'est alors qu'il commença à parler, et je ne sais pas si ces mots m'étaient adressés ous'il essayait simplement de se convaincre.

- Je sais que je ne devrais pas me plaindre, que des enfants meurent de faim, sont maltraités dans le monde, mais je veux vivre, pas passer mon temps entre ces murs.

Sa voix n'était plus qu'un murmure.

- Tu as le droit de te plaindre Nono, ce qui t'arrives c'est pas anodin, plains toi, râles, pleures, moi je serais la pour t'épauler.

BROTHEROù les histoires vivent. Découvrez maintenant