Les Contes Fantastiques de Will Murphy - Saison 1 : Feurëlfia

Glinfen

Nous sommes restés un moment à s'observer l'un l'autre sans dire un mot. On ne se comprenait pas, c'était évident. La surprise de cette étrange rencontre étant quelque peu passée, je réfléchissais plus posément. Et ce qui était important là, tout de suite, c'était savoir où j'étais et surtout récupérer ma voiture.

- Bon, vous savez où je peux retrouver la route ?

- Glinfen.

- Quoi ?

- Mon nom c'est Glinfen et vous ?

- Will. Mais ce n'est pas important, je dois absolument retrouver ma voiture !

- Ce n'est pas important ? On peut au moins être agréable non ? C'est incroyable ça !

D'accord, j'étais perdu au milieu d'une forêt et un petit bonhomme lepre... truc était entrain de me faire la morale du haut de ses 30 centimètres, le regard toujours sévère derrière ses épais sourcils roux.

- Bon, très bien. Enchanté Ginfeck...

- Glinfen !

- Glinfen ! Enchanté. Je suis désolé. Désolé d'être aussi nerveux. Désolé aussi de vous avoir comparé à un nain. Je ne sais pas vraiment ce que vous êtes. Je ne sais pas ce qu'est un lepre...

- Un leprechaun ! Et fier de l'être !

- Oui, voilà. Mais là, tout de suite, j'aimerai vraiment retrouver ma voiture. Je l'ai laissée sur la route et maintenant je ne sais plus où elle se trouve. Je suis complètement perdu.

Le lepre... chaun, Glinfen, réfléchit un instant.

- Alors, Monsieur Will. Moi non plus je ne sais pas ce que vous êtes. Même si vous ressemblez un peu à un elfe. Vous en avez la taille en tout cas. Ou bien êtes-vous un magicien ?

- Un... ? Non ! Non.

- Oui, ça me semblait étrange aussi. Bref, ici vous êtes au beau milieu de la forêt de Mauren. Il y a des petits sentiers par-ci par là mais aucune grande route. Et quant à votre "voiture", je ne sais même pas de quoi il s'agit.

Quoi ? Mais de quoi il me parlait ? Il se moquait de moi ?

- La forêt de Mauren ?

Je ne comprenais décidément plus rien. Tout ça était complètement insensé. Je commençai à tourner en rond, cherchant des yeux des réponses qui m'étaient inaccessibles. Je faisais les cent pas, à droite, à gauche, me frottant nerveusement le crâne, certainement sous le regard inquiet du leprechaun. Et ça aussi ! Qu'est-ce que c'était que cette histoire ? Je commençai à me donner des petites claques pour tenter de me réveiller quand Glinfen s'approcha de moi, alerté par un comportement plus qu'inquiétant.

- Écoutez Monsieur Will, calmez-vous ! Vous êtes perdu, d'accord, mais ça ne servira à rien de céder à la panique. On va trouver une solution !

La voix de Glinfen m'apaisa quelque peu, étrangement. Il avait raison. Ça ne servait à rien de craquer. Même si je ne comprenais rien, il fallait que je garde mon calme. Trouver des solutions, oui, je devais me concentrer là-dessus.

- Très bien, soufflai-je. Qu'est-ce que je vais faire ?

- Eh bien, venez avec moi jusqu'à mon village ! Là-bas on pourra certainement vous aider !

Glinfen semblait réjoui à cette idée. Mon immense inquiétude avait fait tomber l'air sévère qu'il arborait depuis le début.

- Ton village ?

- Oui, Laubrunnen ! Capitale des leprechauns ! Un village magnifique, c'est mon père qui le dirige, c'est le chef des leprechauns !

Glinfen était fier de me raconter tout ça. Son visage était bien plus sympathique et bienveillant. J'acceptai sa proposition tout simplement parce qu'il s'agissait de la seule solution proposée jusqu'à présent.

À partir de cet instant, j'essayai de ne pas trop réfléchir à ma situation, de ne pas me poser de question et de simplement poursuivre la route et les diverses solutions qui me seront présentées jusqu'à ce que tout rentre dans l'ordre. C'est plus ou moins ce que j'allais m'efforcer de faire durant pas mal de temps et vous comprendrez assez vite que cet état d'esprit est parfois difficile à garder. Tout ça est absurde, tant pis.

Nous prîmes donc la route. Mon nouvel ami leprechaun (oui, j'ai écrit cette phrase) s'avérait être fort gentil finalement. Il me parlait de son village et de son peuple avec enthousiasme. Quant à moi, je me contentais de l'écouter et d'acquiescer comme si tout était normal.

- Alors comme ça vous n'êtes pas ami avec les nains ? demandai-je alors que nous arpentions la forêt, qui était magnifique ceci dit. J'aurai le temps de la décrire plus tard.

- Non ! Qu'ils restent terrés dans les profondeurs de leurs mines à Gwarld ! Entassés les uns sur les autres ! Mais bon, en même temps, nous ne nous entendons pas non plus avec les autres espèces de Feurëlfia.

- Feurëlfia ? D'autres espèces ?

- Oui ! Feurëlfia, c'est ici ! Enfin partout, c'est mon monde. Et il y a différentes espèces qui le peuplent comme les elfes, les fées, les mages et même des trolls !

Ne pas craquer, ne pas craquer. Je respirai un grand coup, lentement.

- Non mais n'en parlons pas si ça vous dérange, s'inquiéta Glinfen, pas de problème. Parlez-moi de votre monde plutôt !

Tout en essayant de garder la tête froide, je lui racontai quelques détails de "mon monde". Il semblait surpris lorsque j'évoquais les avions, les télévisions ou les téléphones mais il ne me posa aucune question. Il écoutait simplement, un sourire sous sa barbe rousse, l'air intéressé.

Nous passions sur un magnifique petit pont en bois sous lequel courrait une rivière claire et argentée nommée "Thün" apparemment. Nous la longions un moment avant d'arriver au fameux village de Laubrunnen.

C'était un sublime petit village essentiellement construit en pierre et en bois au milieu de la forêt. Laubrunnen s'étendait le long de la rivière et possédait, par conséquent, une multitude de petits ponts en bois tout à fait charmants. Bien entendu, les habitations étaient à peine plus hautes que moi. En traversant le village, je rencontrai plein de petites personnes. Des leprechauns hommes, femmes et enfants. Glinfen les saluait, il semblait tous les connaitre. Mais ces derniers étaient avant tout très surpris par ma présence et m'observaient bouche bée. La plupart d'entre eux étaient roux et tous portaient d'anciens vêtements, souvent à carreaux. Cela me fit penser à ce que j'avais pu lire ou voir dans des films fantastiques au sujet de lutins, d'elfes et autres. C'était seulement à ce moment que je me dis que le nom "leprechaun" ne m'était peut-être pas inconnu. Je l'avais sûrement lu quelque part. Je me trouvait dans un monde fantastique, c'était impossible ! J'étais vraiment entrain de rêver !