Les Contes Fantastiques de Will Murphy - Saison 1 : Feurëlfia

Les inlendis

Nous décidâmes de laisser Danaginn seul un moment. Les inlendis nous proposèrent de passer la nuit avec eux, dans leur campement. Nous acceptâmes, n'ayant rien prévu pour cette nuit. Bien entendu, je devais traduire une grande partie des discussions entre les leprechauns et les inlendis. Je ne comprenais pas comment je pouvais parler différentes langues sans m'en rendre compte. Je ne l'entendais pas moi même. Apparemment les leprechauns et les fées partagent la même langue. Cependant, toutes les autres créatures ont leur propre langage. Les inlendis avaient quelques notions de la langue du petit peuple et celle des elfes mais sans plus. Bref, encore une chose étrange qui se rajoutait à la longue liste. Si tout traduire m'était pénible au début, il s'avérera que pouvoir communiquer avec différentes espèces sera très utile pour la suite. C'était déjà un petit peu le cas puisque nous avions appris où se dirigeait la couronne. Les inlendis nous accompagneraient le lendemain jusqu'au Loch des Combes où nous prendrons une embarcation jusqu'à la ville abandonnée des Costes, d'après ce que j'avais compris.

Danaginn, après un long moment de recueillement, fit un grand feu et incinéra la fée en silence. Après cela, il vint avec nous et nous nous dirigeâmes vers le camp des inlendis. Nous ne connaissions Danaginn que depuis peu et pourtant, nous pouvions comprendre sa douleur.

Nous arrivâmes assez rapidement au camp qui se trouvait en bordure de la forêt des Serres. Un feu fut allumé et on nous servit à manger. Nous discutâmes avec un dénommé Óralfur. Il s'avéra que les inlendis étaient fort sympathiques. Ils n'avaient pas de lieu d'habitation fixe. Ils vivaient en bivouaquant ici et là. Ils n'avaient pas non plus de chef, il y avait simplement différents camps d'inlendis un peu partout mais surtout en forêt. Ils se définissaient comme les enfants de la terre. Ils vivaient en communion avec la nature. Durant tout ce temps, Danaginn resta dans son coin, le visage sombre.

- Alors, fit Óralfur en allumant une magnifique pipe en bois. Parlez-moi un peu de vous. Quelle est cette histoire de couronne, comment se fait-il qu'une fée se retrouve avec des leprechauns et surtout, qui êtes vous ?

La question s'adressait bien évidemment à ma personne.

- Eh bien, répondis-je. Pour résumer, je ne viens pas de ce monde. Je suis apparu comme ça dans la forêt de Mauren où j'ai été recueilli par les leprechauns. Une poignet d'entre eux et moi avons été capturés par les fées car ils pensaient que nous avions volé la couronne de leur reine. Glinfen, qui est le fils du chef des leprechauns, a suggéré qu'il s'agissait d'un acte commis par un gobelin. Alors le roi Elsarinn nous a envoyés avec son fils sur les traces du gobelin. Mais nous venons d'apprendre que c'était finalement une fée à l'origine du vol et qu'il voulait la revendre à des nains. Piégée par les gobelins, la fée s'est faite tuer et trois gobelins sont partis vendre la couronne à sa place. Nous devons maintenant les rattraper.

- Je vois. Il s'agit là d'une histoire particulièrement déroutante. Et quel est votre rôle à vous exactement ?

- Moi ? Rien du tout. Je voudrais simplement rentrer chez moi. Je suis ballotté à droite à gauche sans savoir quoi faire.

- Qu'est-ce qui vous empêche de partir ? Vous êtes libre d'aller où vous le souhaitez maintenant.

- Pour aller où ? Je ne connais rien de ce monde. Ça fait seulement deux jours que je suis à Feurëlfia. Je ne sais pas qui pourrait m'aider alors je ne fait que suivre ces leprechauns pour le moment, ainsi que la fée en piteux état là-bas.

- En seulement deux jours il vous en est arrivé des choses ! Cela fait des siècles que l'on n'a pas vu pareil comité. Des leprechauns, des fées, des inlendis ensemble ? Non, je ne me souviens pas que l'on m'ait raconté un tel événement depuis la chute des anciens.

- La chute des anciens ? Ce sont les mêmes anciens que ceux représentés sur les pierres là ? Je ne me souviens plus du nom.

- Les Prophètes de Mëos ! m'aida Glinfen à qui, comme pour Laufern, je traduisais toute la conversation.

- Ah ! s'exclama Óralfur. Vous avez vu les Prophètes ? Oui, c'est bien ceux-là.

- Folshean, un vieux sage leprechaun, nous en a brièvement parlé, expliquai-je. Il a dit que le Conseil des Anciens était formé des meilleurs mages au temps où la paix régnait entre les espèces.

- En effet, mais ils n'étaient pas seuls. Il y avait un autre groupe que l'on nommait le Haut Conseil. Il était composé de différentes personnes et, d'après ce que l'on raconte, c'est eux qui faisaient régner la paix sur Feurëlfia. On les appelait les Protecteurs, le Conseil des Anciens les soutenait. Enfin, nous avons très peu de trace de ces histoires.

- Mais comment ont-ils disparu ? Il ne reste aucun d'entre eux ?

- Il y aurait eu un événement que l'on appelle la Chasse. C'est elle qui aurait précipité la chute des anciens et du Haut Conseil. Un Protecteur se serait rebellé ou bien un mage, peut-être les deux, ça dépend des versions. Bref, tous les Protecteurs ainsi que les mages du Conseil des Anciens ont été pourchassés et certainement éliminés. On ne trouve aucune trace écrite de ces événements, ni même sur les Protecteurs ou le Conseil des Anciens. Tout a dû être brûlé. Il ne s'agit désormais que de légende que l'on raconte au coin du feu, comme nous le faisons maintenant.

- Et depuis, les espèces se font la guerre ? Pour quelle raison ?

- On ne sait pas. On ne sait plus. Les différentes espèces ne se comprennent plus. On tient nos distances les uns avec les autres. Nous autres inlendis, nous avons toujours été un peuple à part, vivant en ermite dans la forêt. Nous échangions très peu avec les autres Feurëlfiens. Pourtant, nous accueillions jadis n'importe qui qui souhaitait passer un moment avec nous. Nous sommes un peuple très ouvert. Mais depuis très longtemps, plus personne ne vient partager notre feu. Mis à part vous. Le seul endroit où l'on trouve encore différentes espèces se côtoyer est la ville d'Ildirion. C'est un peu la capitale commerciale de la région. Auparavant, il s'agissait de la capitale culturelle. Toutes les espèces échangeaient entre elles. Désormais, elles ne se voient plus que pour des raisons commerciales, des échanges économiques.

- Je comprends, c'est dommage.

- Mais vous êtes là aujourd'hui. Quand l'éclaireur nous a rapporté qu'il avait vu une grande personne avec une fée et des leprechauns, personne ne l'a cru. Qu'importe votre rôle là dedans Will, vous et vos amis êtes entrain de changer les choses.

- Le destin, conclut Laufern.