Maintenant que je suis morte, je peux vivre comme je veux.

Chapitre 9 : Organisation et visite

Je suis allée voir ma grand-mère et j'ai fait les courses pour elle et pour moi. Elle m'a demandé pourquoi ma mère ne répondait pas au téléphone et je lui ai dit qu'elle était plus souvent chez son nouveau mec qu'à la maison. C'est tellement plausible qu'elle m'a cru sans poser de question. Qu'est-ce que c'est facile de se débarrasser de quelqu'un et de continuer la vie, en mieux. Parce que, du coup, ma grand-mère m'a aussi donné de l'argent pour que je me débrouille quand je suis seule. Si elle savait !

Rentrée à la maison, je me suis organisée pour passer un week-end comme jamais. Avec une partie de l'argent je suis allée en ville et j'ai flâné dans les magasins. Je n'étais pas à l'aise parce que j'en ai pas l'habitude et que, au début, je pensais que j'avais un gyrophare sur la tête et qu'on voyait que moi. Je me suis vite aperçu que personne me calculait.

Alors, là, je suis en train d'essayer une robe. Une robe neuve. Ce que j'ai jamais eu de ma vie. Je suis dans la cabine d'essayage, je me regarde dans le miroir et pour la première fois de ma vie, je me dis que je pourrais être belle si je changeais deux ou trois trucs, à commencer par ma coiffure, par exemple. Enfin, coiffure : c'est ma mère qui me coupe les cheveux.

Je me souris dans le miroir en m'apercevant de l'erreur que je viens de penser. C'était. Elle fera plus jamais de carnage sur ma tête ! D'ailleurs, elle mériterait que je rentre dans la chambre et que je la scalpe. Elle arriverait en enfer avec une coupe merdique et tout le monde se foutrait de sa gueule.

J'essaye une autre robe. Je préfère celle-là. Je me vois déjà dans la rue, devant toutes les filles du lycée qui, heureux hasard, seraient toutes assises à la terrasse d'un café et qui baveraient de me voir si belle, passer en tenant la main d'Angel. Woaw ! J'éclate de rire dans la cabine. Personne n'en fait cas : ils doivent croire que je suis au tel.

La journée asse et il est temps que je mange une vraie glace. Cette idée me vient parce que je passe devant l'enseigne du vendeur de glaces dont tout le monde parle. Quel délice ! J'en reprends une deuxième. Une troisième. La vendeuse me regarde d'un drôle d'air. On dirait presque qu'elle croit que je sors d'une campagne profonde. Ben. En fait, elle a raison. Il faut que je fasse gaffe. Je peux revenir quand je veux,maintenant. Il ne faut pas que je fasse tout aujourd'hui.

Je mange au fast-food. C'est super bon ! Mais avec les glaces dans le ventre, déjà, je me sens pas top. Il vaut mieux que je rentre. Heureusement que j'ai anticipé,parce qu'avec toute ces nouveautés pour mon estomac, je passe un mauvais quart-heure aux chiottes.

Après une bonne douche, je m'installe devant la télé et je rêve à ma nouvelle vie au lieu de regarder les images. Je comprends que le bruit de fond me rassure. Il est à peine quinze heures. Je zappe comme une folle mais y a rien d'intéressant. En vrai, j'aimerais être avec Angel. J'ai enlevé les étiquettes des nouvelles fringues que j'ai achetées. J'ai de quoi m'habiller qu'avec du neuf.

Je prends mon tel et j'envoie un SMS à Angel.

- Tu fais quoi ?

Au bout de quelques secondes, il me répond :

- Rien

- On se voit ?

- Ok

- Tu viens ?

- Ok 10 mn.

J'ai le cœur qui bat trop fort. On va être que tous les deux, à pouvoir faire tout ce qu'on veut. Sauf que je sais pas ce que je veux. Enfin si ! Mais je sais pas comment on fait, comment on embrasse, comment on fait seulement pour se retrouver dans les bras d'un amoureux. On le demande ? On y va en force ? On attend que le garçon fasse le premier pas ?

Pour l'instant, je m'habille toute neuve. J'ai le cœur qui va lâcher. Je passe devant la tombe de ma mère. Le scotch marron fait un peu louche. Je m'approche de la porte et je renifle. Y a pas d'odeur, c'est l'essentiel. Elle aurait encore été capable de me faire chier après sa mort, la vieille.

Angel tape à la porte d'entrée et mes jambes me portent à peine. J'ouvre. Il est là, souriant et ouvre de grands yeux en me voyant :

— Woaw ! Qu'est-ce que t'es belle !

J'ai envie de pleurer. J'ai du mal à retenir mes larmes. Je crois que c'est la première fois qu'on me dit ça sur ce ton. Il arrête pas de me regarder de la tête aux pieds,il me dévore des yeux, je crois.

— Merci.

Je dois avoir les joues toutes rouges.

— Entre, ma mère est partie chez son nouveau mec et...

Je ne sais pas si je dois lui dire qu'il y a possibilité de rester cette nuit. C'est un peu tôt, non ?Et puis ses parents ne voudrons pas.

— ... elle rentrera pas, cette nuit.

Angel tique. Je pense qu'il a compris que je l'invite à coucher avec moi.