Chapitre 11 : la visite qui fâche et la solution, peut-être

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À peine Angel est parti que quelqu'un frappe à la porte. En tee-shirt, à moitié à poil, je vais ouvrir, persuadée que ça ne peut être qu'Angel à qui je manque déjà. Je crois que je lui aurais tout raconté.

Mais c'est un homme d'une quarantaine d'années, en costard bas de gamme élimé. Il a une mallette qui pend au bout de son bras et un regard vicieux au dessus de son sourire dès qu'il me voit.

— Bonjour Nol.

Je crois que ma bouche reste ouverte plus que je n'aurais aimé tellement je suis surprise. Comment connait-il mon prénom, ce gars ?

— Est-ce que ta mère est là ?

Je tire sur mon tee-shirt en espérant le faire descendre jusque sous mes genoux mais il s'obstine à rester à mi-cuisse. Sinon, il dévoile mes seins.

— Elle n'est pas encore rentrée. C'est pour quoi ?

— Je dois en discuter avec elle. Est-ce que tu sais à quelle heure elle rentre ?

— Non.

— Je pourrais l'attendre dedans ? dit-il en montrant l'intérieur de la maison.

— Non. Je ne fais entrer personne quand je suis seule, c'est plus prudent.

Il me regarde de bas en haut. Je suis certaine que s'il pouvait se jeter sur moi, il le ferait, là, sur le pas de la porte.

— C'est bien, c'est plus prudent.

Il cherche quelque chose dans la poche de sa veste. Il en sort une carte avec les couleurs bleu blanc rouge, sa photo et une inscription comme quoi c'est un inspecteur des affaires familiales ou un truc dans le style.

— Il ne faut pas avoir peur de moi, je suis un employé du gouvernement.

Comme si ça changeait quoi que ce soit.

— Je vois, dis-je.

— Alors ? Je peux attendre ta mère à l'intérieur ?

— Non. Je suis seule et je ne laisserai entrer personne, pas même le président de la république.

Il sourit. Il hoche la tête. Il reluque mes jambes et je sais qu'il m'imagine nue.

— Bien, je repasserai tout à l'heure.

— Des fois, elle rentre pas de la nuit. Elle a un copain et elle dort chez lui.

Il a l'air surpris.

— Ta mère te laisse seule toute le nuit ? Tu n'as que quinze ans, ce n'est pas très prudent. Et puis, dans le dossier, elle a prétendu être célibataire.

Là, je crois que j'en ai trop dit et j'ai gaffé. Je ne sais pas ce que veut ce gars, mais il va certainement venir enquêter et donc, découvrir le corps dans la chambre.

Il doit lire sur mon visage et il sourit encore plus. Il range son insigne.

— Bon. Je passerai demain matin. Tu pourras lui laisser un mot ? Dis lui que c'est important, qu'il en va de l'acceptation de son dossier pour les aides financières.

Il me fait un petit signe de la tête,se tourne à moitié pour repartir et ajoute au dernier moment :

— Et toi, tu ferais mieux de ne jamais ouvrir la porte à quelqu'un dans cette tenue.

Je le regarde partir à pieds :a priori il n'est pas venu en voiture.

Je suis encore sous le choc. Il dit qu'il revient demain. Il vient voir une morte, sauf qu'il ne le sait pas. Je suis grave dans la merde. J'ai envie d'appeler Angel et de tout lui raconter. Mais j'ai peur qu'il fuit et ça, ce serait la pire des choses. Pourtant, j'ai vraiment besoin d'aide. Impossible d'en parler à ma grand-mère.

Je n'ai personne d'autre à qui me confier.

À moins que. Je pèse le pour et le contre. Je vais même m'asseoir sur le canapé en regardant la télé éteinte pour mieux arriver à réfléchir. J'y arrive pas, trop d'idées viennent s'entrechoquer et je suis incapable d'avoir un raisonnement de plus de dix secondes. Au final, j'appelle la seule personne que je crois possible et lui demande si elle peut venir chez moi. Oui, c'est possible. O.K. Je l'attends.

Dès son arrivée, sans même prononcer un mot, je lui ai pris la main, je me suis arrêtée devant la porte de la chambre de ma mère et j'ai enlevé le scotch, tout ça, sans prononcer un seul mot depuis le début.

L'odeur nous prend au nez et nous reculons.

— Merde ! s'exclame Édith tout en mettant une main devant sa bouche. C'est quoi, ça !

— J'ai tué ma mère, dis-je en la regardant dans les yeux.

J'y vois de la terreur et de l'incompréhension mêlées.

— Pourquoi ?

— J'ai pas fais exprès. Elle m'a énervée, je lui ai balancée un vase sur le crâne et elle est morte.

— Ah ben mince !

Elle est blême. Elle s'assoit sur une chaise dans le couloir, à côté d'un meuble sur lequel elle pose son bras.

— Tu as tué ta mère. Mince, alors ! Y a longtemps ?

— Je sais plus, quelques jours.

— D'accord. Je suppose donc que je suis la première à qui tu en parles, c'est ça ?

— Oui.

— Pourquoi moi ?

— Parce que j'ai confiance en toi. On est pas des grandes copines, je sais, mais... voilà, quoi.

— Ouais, dans un sens, ça me fait plaisir, mais bon... Comment tu veux que je t'aide ?

Bien sûr. Elle ne sait pas ce qu'elle fait là. Pourquoi je l'embrouille avec cette histoire qui me dépasse quand je suis seule et qui nous dépasse encore quand nous sommes toutes les deux.

Édith se lève, regarde dans la chambre et voit le corps. Elle recule précipitamment.

— Elle est morte, dit-elle comme pour se persuader que tout ça, c'est vrai.

Je peux la comprendre. Elle doit se dire qu'elle va bientôt se réveiller et que tout va rentrer dans l'ordre.

Sauf que non.

— Il faut appeler la police. Il faut que tu dises ce que tu as fait et...

— J'irai en prison.

On dirait qu'Édith ne voit pas où est le problème, genre « action-réaction ».

— Je veux pas aller en prison.

Elle hoche la tête, semble plonger dans ses pensées et en revient avec une autre expression sur son visage.

— Alors, il faut se débarrasser du cadavre, dit-elle froidement.

Elle sort son téléphone, enclenche le moteur de recherche et prononce : « se débarrasser d'un corps ».

Les réponses affluent. D'abord les séries télévisées, puis un site pas très sérieux, un autre sur Halloween, mais pour finir, alors que je la regarde, sans savoir quoi dire, elle dit :

— O.K. Y a moyen.

Elle lève les yeux, s'approche de moi, me prend dans ses bras et me murmure à l'oreille :

— Tu peux compter sur moi. Je reviens demain soir et on s'en occupe. Essaye de dormir, tu ressembles à un zombie.

Et elle est partie.

J'ai rien compris mais je vais mieux. C'était qui, cette fille ? Sûrement pas l'Édith que je côtoie en cours. Super Édith, peut-être.

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⏰ Dernière mise à jour : Mar 09, 2020 ⏰

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