Un souhait

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Et encore une semaine épuisante de travail venait de s'écouler. Se balader dans des ruines, génial, mais expliquer l'histoire des lieux à des touristes blasés ou désintéressés, les gamins bruyants qui faisaient tout sauf respecter les traces d'une civilisation ancestrale ? Très peu pour elle. Pourtant, c'est ce qui semblait avoir été la norme pour Shula cette semaine. Avec un soupir exaspéré, elle fouilla dans son sac dans l'espoir de retrouver les clefs de son appartement. Une tâche herculéenne avec le fourbi et l'apparent espace infini de l'objet ; ça lui donnait un peu l'impression d'être Mary Poppins, une pensée positive après une journée définitivement frustrante.

Enfin, elle put entrer chez elle.

À peine la porte refermée, elle s'empressa d'enlever ses chaussures, dégrafer son soutien-gorge et de retirer l'élastique qui tirait douloureusement sur son cuir chevelu. Ah, elle pouvait respirer.

Travailler comme guide touristique dans les ruines de Carthage était passionnant. L'histoire vivante, les soupirs d'une culture riche et prospère... C'était son rêve depuis qu'elle était tout petite.

Shula s'arrêta soudain, les larmes aux yeux. Elle posa le verre qu'elle venait de poser sur ses lèvres ; ses mains tremblaient trop. Pourquoi penser à son enfance, à sa famille était-il encore si douloureux ?

Non. Non, elle ne repartirait pas dans cette direction. Elle s'en était sorti ! Elle avait réussi à se reconstruire, elle avait une nouvelle vie... Elle... elle...

Elle inspira profondément, encore tremblante, puis expira, les yeux fermés. Elle pria Allah de lui accorder sa miséricorde et de lui permettre d'affronter cet obstacle. Elle ne flancherait pas. Elle ne le pouvait pas.

Une fois qu'elle arriva à se calmer, Shula engloutit l'eau qui restait dans son verre. Elle n'avait pas faim, alors elle décida de se préparer pour la nuit – malgré le fait qu'il n'était que dix-huit heures – et, une dernière sourate répétée, s'allongea. Elle était tellement fatiguée qu'elle s'endormit au bout d'à peine cinq minutes.

*

Elle venait de sortir de l'université quand elle entendit le bruit des avions qui survolaient régulièrement la région. Ce qui ne l'était pas, c'était le sifflement qui suivit. Shula leva les yeux juste quand une explosion retentit. L'onde de choc la propulsa en arrière, la détonation hurla dans ses oreilles, avant que tous les sons ne disparaissent, si ce n'était un bruit aigu et continu.

Quand la fumée se leva assez pour qu'elle voie ce qui se passait, elle se releva et avança avec précaution vers le quartier où se trouvait sa maison. Elle sentit une petite main dans la sienne. Son regard se posa sur sa petite sœur, Hayat, qui lui sourit. Elles continuèrent leur route.

Finalement, la fumée et les débris étaient retombés. Le calme était revenu. Trop calme. Personne dans les rues à part les deux sœurs, pas de cris de détresse, de personnes ensanglantées. C'était étrange.

Shula fronça les sourcils, avant de se retourner une fois de plus vers sa petite sœur, pour voir si elle allait toujours bien.

Elle était toujours là, la petite Hayat. À ses côtés. Mais ses vêtements étaient déchirés, ensanglantés et les yeux de la petite fille étaient vides.

- Pourquoi tu les as laissés me faire ça, grande sœur ? Pourquoi tu m'as pas sauvée ?

*

Un cri déchirant brisa le silence nocturne. Shula se redressa dans son lit, haletante et en pleurs. Des frissons lui parcouraient le corps, ses vêtements lui collaient à la peau.

Rencontres mythiquesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant