8 (suite)

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Cette nuit-là fut l’une de plus longue que j’eus à passer. Sa présence m’avait replongé encore plus loin, dans des souvenir que j’avais enfoui très loin, des souvenir d’une vie qui ne m’appartenait plus.

Flash-back

Lorsque mon réveil retentit, un large sourire fendit mes lèvres. L’odeur qui baignait dans ma chambre était l’odeur agréable du neuf, cette odeur qu’on aime sentir en ce jour spécial, le jour de son anniversaire. Un peu trop précipitamment, je quittai le lit pour me jeter sur le gros paquet qui m’attendais sur le tapis recouvert de confettis. Sur l’emballage, il y avait un petit mot : « fait toi belle ma chérie parce que ce soir, on sort faire la fête et ce, ou tu voudras ». Thomas qui s’attendait bien avec ma mère a dû lui donner ce cadeau pour qu’elle me le remette en surprise. Le paquet contenait une magnifique robe bleue avec des escarpins assortis. Thomas a toujours eu bon gout.

Ma mère fit irruption dans ma chambre, tenant entre ses main un autre paquet avec un gâteau a l’air succulent.

- Joyeux anniversaire ma fille

- Merci ma petite maman

- Tu as vu le cadeau de thomas ? il a passé les derniers mois à essayer de nous convaincre ton père et moi pour te laisser sortir ce soir, alors tu as intérêt à bien te tenir

- Oh merci maman, tu es adorable

- Je ferais tout pour les dix-neuf ans de ma fille.

Elle me prit dans ses bras et me remit son cadeau, à savoir, une jolie pochette qui irait bien avec les vêtements de thomas.

La nuit tombée, je n’arrivais pas à croire que mes parents me permettaient de sortir de nuit avec un garçon. Je me trouvais particulièrement belle, remplie d’émotion positive et aussi prête à affronter la vie. Je me suis senti grandir, presque invincible grâce a tout l’amour que je ressentais et que je recevais. Sur le pas de la porte, ma mère me regardait avec un sourire attendris, remplie de joie et de fierté.

- Tu es si belle ma fille

- Merci maman

- Thomas semble être un bon garçon, mais la confiance n’exclue pas le contrôle ma fille, soit prudente et n’oublie pas tes valeurs.

- Je n’oublierai pas maman

- Tiens, c’est un cadeau pour toi. Elle me tendit un petit écrin noir qui luisait à la lumière.

- C’est un vieux cadeau que m’avait fait ton papa, je voulais te le donner car pour moi il représente l’amour. Tu es l’amour de ma vie chérie, tu es mon plus grand trésor.

Le bijou qu’elle venait de de me remettre était une fine chaine en or agrémenté par un petite pierre en diamant. C’était si délicat, si magnifique.

- Merci beaucoup maman

- Tu le mérite chérie, allez, ton prince est déjà arrivé, soit sage et rentre avant l’aube

- Promis maman.

Si je savais que cette nuit était la dernière ou ma mère me prendrai si tendrement dans ses bras protecteurs, je ne l’aurais jamais laissé, je ne serai jamais sorti.

Fin du flash-back

Le matin, je me sentais faible, incapable de me lever, et pour la première fois depuis que je travaille au centre de santé, je fis un appel pour prévenir de mon absence, prétextant un mal de ventre atroce. Après les inquiétudes du docteur, ses nombreux conseils sur le repos, je pu enfin raccrocher et essayer tant bien que mal de me reposer, mais en vain. Cette visite incongrue avait eu un impact désastreux dans ma vie qui l’était depuis longtemps déjà, c’est le genre de visite que l’on se passerait bien d’avoir, même après cinq ans. Je pris l’initiative au cours de la journée de me préparer un bon petit plat vite fait, que je pris devant la télé, sans trop regarder. Cette journée qui était censé être de tout repos, se passa dans un grand brouillard, ou je me sentais oppressé d’un poids invisible. Je me sentais mal, sans savoir pourquoi. 

Dans la soirée, alors que le vent devenait de plus en plus chaud, je pris la route, sans savoir ou aller en écoutant de la musique sur un IPod offert par Eloïse. J’aimais beaucoup le slow, que parfois je faisais des nuits blanches à en écouter. Quand mon esprit me revint, j’étais sur la place, il était près de 21heure et les gens se pressait de rentrer, pour retrouver leurs familles. Assise sur le banc, j’observais distraitement les gens s’agiter, aller et venir, sans pour autant prêter attention à qui que ce soit, sans me prêter la moindre attention.

- Mademoiselle l’infirmière ?

Je venais d’entendre cette voix emmêlée aux parole de la chanson de Whitney Houston que j’écoutais. Pensant à une hallucination, je pris une grande inspiration, puis je fermais mes paupières déjà lourde suite aux nombreuse insomnie dont je suis victime pour mieux savourer cette soirée.

- Vous m’écoutez ?

Cette fois, il venait de frôler mon épaule, ce qui me fit une grosse décharge électrique. Cette sensation de picotement que parfois je ressentais lorsqu’il me regardait, venait de se décupler en un simple frôlement. J’ouvrit mes yeux, puis les plongea dans ceux, toujours imperturbable du patient de la chambre 4.

- Excuser moi, je vous ai vu de loin et j’ai vraiment eu du mal à croire que c’était vous, j’ai voulu en avoir le cœur net.
Ses paroles toujours englouti par la voix de Whitney m’arrivais comme dans un songe. Il faisait noir, mais j’étais déjà en train de me noyer dans l’océan de ses yeux si peu ordinaire.

- Vous m’écoutez ?

Je pu néanmoins trouver le courage, sans pour autant avoir la force de détourner mon regard, de retirer mes écouteurs. Il me fit un sourire si radieux qu’en l’espace d’une petite seconde, j’en avais oublié tout. Absolument tout ce qui se passait autour de moi.

- Oui je vous écoute

- Je peux m’asseoir ?

- À votre aise.  Il prit place à mes coté, non sans faire craquer tous les os de ses jambes bruyamment.

- Je suis tellement fatigué, il y a eu un chargement important à la librairie et il fallait tout répertorier ensuite mettre tout ça dans les rayons… comment allez-vous ?

- Euh… ça va merci, et vous ? votre mémoire ?

- Je me rappel toujours de vous, c’est le plus important.

Un long silence s’en suivit, ou j’essayais de trouver une excuse pour m’extirper de cette position désagréable dans laquelle je me trouvais. Assise à la place publique, la cuisse d’une inconnue frôlant dangereusement la mienne que je me débattais à mettre hors porté. Supporter sa présence était une chose, mais supporter de le toucher, c’était impossible.

- Vous saisir est vraiment un dilemme, je n’aurais d’ailleurs jamais cru vous rencontrer ici

- J’avais besoin d’air

- Je comprends, le centre est parfois si oppressant, que dire pour vous qui y travailliez

- Oui c’est parfois dur

- Mais vous aimez votre travail, vous y êtes tous les jours

- Vous m’épiez ? la question qui au début était lancé comme une blague pris une allure plus sérieuse lorsque je lu l’embarras sur son visage.

- Je ne vous épie pas, mais il est vraiment difficile de passer à côté de vous sans vous remarquer. Votre aura est attirant je crois.

- Vous allez vous remettre à philosopher ?

- Je ne prendrai pas le risque de vous perdre alors que je vous ai si prêt, s’il faut que je me taise, je le ferai. Je me contenterai de me délecter de votre présence à la fois si glaciale et pourtant si apaisant…

- Vous recommencez

- Pardon.

L’envie de m’échapper avait déserté de mon corps. Je prenais à mon insu plaisir de la situation, avoir de la compagnie, sortir de ma petite bulle inconfortable un moment. J’avais envie de faire la conversation pour une fois, essayer quelque chose de nouveau, d’inhabituel…

- Comment ça se passe votre nouvel emploi ?

Comme à chaque fois que je parlais, il eut une expression de surprise sur son visage, puis son petit sourire en coin réapparut, laissant libre cour a sa petite fossette

- Je m’y plais bien, je suis dans un univers que j’apprécie, et ça m’aide beaucoup pour la mémoire. D’ici là j’aurais ma paie et je pourrais régler la moitié de ma facture au centre. Avec l’autre moitié, je trouverai un autre logement le temps de finir ma dette financière au centre. Je ne veux pas rester un fardeau indéfiniment…

- Je ne pense pas que le docteur vous considère comme un fardeau, il y en a eu beaucoup comme vous et vous n’êtes sans doute pas le dernier.

- Je sais mais je ne veux pas dépendre de lui comme ça, et ne me sortez pas l’une de vos remarques sur l’égocentrisme ou autre… je ne veux vraiment pas abuser de sa générosité alors que j’ai le moyen de me débrouiller.

- D’accord, faite à votre aise, au centre vous serez toujours le bienvenu

- Oui je le sais, merci encore

- Je vous en prie. Et votre mémoire ? aucun autre souvenir ?

Encore surpris, il se décala un peu plus pour pouvoir me regarder en parlant, m’offrir la torture de ses yeux clair et perçant.

- Si, je me suis souvenu des plein des choses depuis notre dernière entrevue.

A l’évocation de ce jour, un autre vent de nostalgie s’empreint de moi mais celui-ci diffèrent des précèdent, me fit comprendre que ma mémoire avait enregistré des nouveau souvenir, très diffèrent de d’habitude.

- La même nuit, je me suis souvenue de mon prénom, mais rien d’autre… à partir de là je fais souvent des rêves ou les gens m’appel par mon prénom, mais je ne sais pas de qui il s’agit. Des rêves, parfois des cauchemar… tout me semble si flou, si emmêlé, mais ça vous le savez déjà.

- Je suis ravie que ça s’arrange un tant soit peu pour vous.

- Merci, j’espère que tout ira bien… que faites-vous ici ? c’est loin du centre, vous ne pouvez pas en revenir, en plus vous êtes vêtue… différemment.

- Je… je n’étais pas au centre aujourd’hui, je ne me sentais pas bien alors…

- Vous m’aviez dit tout à l’heure que ça allait, qu’est-ce que vous avez ?

- Je vais bien, j’ai eu un coup de fatigue, c’est tout.

Il plongea à nouveau ses perles dans mes yeux, cette fois ci j’y décela une inquiétude qui avait l’air sincère, vraiment sincère.

- Vous devez vous ménager mademoiselle l’infirmière, vous avez l’air si fatiguée…

- Je vous ai dit que ça allait.

- Je sais, mais je le dis quand même, prenez soin de vous.

- Vous… vous vous inquiétez pour… moi ?

- Bien sûr, comme je vous l’avait dit dernièrement, vous avez l’air de vous soucier plus des autres que de vous-même. Il faut bien que quelqu’un se préoccupe de vous, et moi, je le fais.

- Vous n’avez pas besoin de…

- Je sais, je le fais quand même.

Prenant le risque, je remis mes yeux dans le siens, histoire de vérifier si l’emprise était toujours d’actualité, hélas il l’était toujours.

- Vous ne m’avez jamais appelé Michael comme les autres, pourquoi ?

- Ça ne vous va pas.

Il partit dans un fou rire incontrôlable. Parfois son insouciance me faisait penser à un enfant. Il avait l’insouciance d’un enfant.

- Vous êtes vraiment sérieuse ? pour vous quel prénom me conviendrai le mieux ?

- Je ne suis pas doué pour les devinettes

- Allez, laisser aller votre imagination, free your spirit mademoiselle l’infirmière

- Je… je n’en sais rien, Julius, Peter ?

- Julius ? ce n’est pas un nom de chat ça ?

- Je vous avais dit que je suis nulle

- Ce n’est pas faux en tout cas… de son petit rire, il me regardait en s’empêchant de sourire de plus belle.

- D’accord c’est bon, je vais vous le dire. Je m’appelle Nath

- Celui-là vous va beaucoup mieux.

- Merci

- Je… je crois que je vais rentrer

- Déjà ?

- Demain je dois être au centre de bonne heure

- Le docteur Brad comprendra si vous êtes en retard…

- Je ne veux pas être en retard

- D’accord, laisser-moi vous raccompagner

- Ce n’est pas la peine

- Je sais, je vous le demande quand même
Il avait remarqué l’effet qu’avait ses yeux sur moi et il en jouait. Il n’avait qu’à me fixer avec cette intensité et j’en perdait tous mes moyens.

- D’accord.

Sur la route, aucun de nous ne parlais. Moi, encore une fois je ne savais pas quoi dire, évitant de dire une bêtise, je préférais me taire. Lui, il regardait à droite et à gauche, comme s’il découvrait à peine l’endroit. Un peu pour casser le silence, je lançais sans réfléchir :

- Vous n’êtes jamais venu par ici ?

- Non jamais, je ne connais que le chemin du centre a la librairie.

- Et comment vous allez rentrer alors ?

- Je vais me débrouiller, ne vous en faites pas.

- D’accord

- Vous habitez où ?

- A la pension de Mme Gervey

- C’est où ?

- On y va, vous le saurez…

- Vous y vivez depuis longtemps ?

- Depuis mon arrivé ici

- Qui veut dire ?

- Depuis assez longtemps…

- Vous êtes donc une enfant du monde qui vit à Norway depuis assez longtemps…

- Vous comprenez vite

- Tout ce que je comprends, c’est qu’il y a un gros mystère qui plane au-dessus de vous mademoiselle Orianne

- Il n’y a aucun mystère, vous voulez chercher des histoire-là ou il y en a pas.

- Je ne cherche aucune histoire tranquillisez-vous, j’aimerais simplement vous connaitre, j’aimerai devenir un simple ami

- Je crois que vous feriez mieux de vous arrêter ici, merci

- Je ne voulais pas vous offenser

- Vous ne l’avez pas fait

- Je suis désolé, d’accord je ne vais plus insister, je ne vous le demanderai même plus. Laisser-moi vous raccompagner j’aurais l’esprit plus tranquille

- Il n’y a pas de malfrat dans ce village

- Certes, mais la confiance n’exclut pas le contrôle.

Cette phrase, la typique de ma mère venait de me heurter le cœur si violement que je me sentis vaciller. Je perdis l’équilibre, mais me ressaisit quand je vis approcher des bras velus et légèrement musclé

- Ne me toucher pas…

J’avais réagi avec tellement de force qu’il avait eu un mouvement de recul, ne comprenant pas l’excessivité de ma réaction.

- Ça va ?

- Oui ça va

- Vous en êtes sûr ? vous avez failli vous évanouir

- Non ça va, il faut que je rentre dormir

- D’accord laisser-moi vous aider

- C’est bon je peux marcher toute seule, ne vous inquiétez pas

D’un air de méfiance, il rétracta ses bras et pris une distance que je jugeais convenable. Cette fois le silence fut notre partage jusqu’à la pension ou d’un signe de la main, je lui dit au revoir. De la fenêtre de ma chambre, je le voyais regarder dans la direction des escaliers, comme s’il hésitait à les gravir. Malgré moi, je ne pus que constater combien cet homme était attentionné.

La Maladie d'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant