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Une fois arrivée au centre, je sentais le courage qui m’habitais me lâcher peu à peu, comme un noyé manque progressivement d’air au fond de l’océan. Vous êtes prisonnière de votre propre amertume. Ces mots, comme pour me rappeler à l’ordre m’empêcha de me raviser. Il était hors de question que je continue de porter ce poids en moi. Je n’avais pas envie de continuer à m’autodétruire. J’avais envie d’avancer, de progresser, de renaitre de mes cendres, être une nouvelle personne.

A la réception, toutes autres infirmières étaient ravies de me revoir, pensant que je venais pour reprendre le service. Lorsque je les vis tous aussi enthousiaste à l’idée de me reprendre, je constatais que je comptais pour certaine personne, que sans le savoir, je m’étais fait une nouvelle famille, des personne qui se souciait de mon bien-être. Dorénavant, je n’étais plus aussi solitaire que je le pensais.

- Infirmière Orianne, comment allez-vous ? qu’est-il arrivé à votre poignet ?

- Je vais bien merci Rita, ce n’est rien, un malheureux incident alors que je faisais le ménage, mais ce n’est rien de grave.

- Le docteur Brad nous a dit que vous étiez malade…

- Ça va, Rita… mais est-ce que vous pourriez me rendre un petit service ?

- Quelle question, bien évidemment.

- Bien, je voudrais voir une patiente admise ici la nuit dernière… Calister Kabu

- Oui nous l’avons reçu hier, elle est dans un sale état, nous avons déjà contacter l’hôpital ou elle est prise en charge en ville… c’est une femme riche, l’ambulance va arriver d’un moment à l’autre.

- Mais… quel… elle a quoi ?

- Elle a un cancer de l’utérus en phase avancé…

Je ne pensais pas qu’entendre  pouvait me faire un tel choc, mais cette nouvelle eut sur moi l’effet d’une douche froide. Alors c’était ça. La raison pour laquelle elle avait parcouru tout ce trajet en voiture, une route couverte de terre jaune, pour venir me faire culpabiliser sur son sort ? Alors que Rita me faisait part de son diagnostic, je me demandais s’il en valait vraiment la peine que je franchisse la chambre des urgences qu’il y avait devant moi. Tu es esclave de ta propre amertume. Sans hésitation, je poussais la porte et mon cœur se serra encore. Je ne savais pas quelle réaction avoir face à cette scène que j’apercevais. De beaucoup plus près, on voyait qu’elle avait énormément perdu des cheveux, et que son teint blafard était dû à une anémie. Elle me fit de la peine. Lorsque la porte se refermait derrière moi, elle papillonna des yeux, puis capta enfin les miens. L’effet miroir me rappela mon enfance, combien de fois j’y avais lu de l’affection, de la tendresse, de l’amour.

- Ma… chérie…

- Ne parle pas. Tu es…malade

- Oh, pas tant que ça tu sais, j’ai vécu beaucoup pire.

- Hm, c’est depuis quand ?

- Ma fille…

- Ecoute, je suis venue ici pour essayer de te donner une chance. Bon, pas seulement à toi, mais aussi à moi, beaucoup plus d’ailleurs alors s’il te plait, sois bref mais clair.

- Il a vraiment fallu de cette maladie pour avoir un peu de ton temps…

- Ecoute Calister, ce n’est pas par plaisir, ni par courtoisie que je suis là. Je pense que cette discussion est nécessaire pour essayer de passer à autre chose. Donc je veux et j’exige que tu m’explique. Que tu me dises pourquoi…

A mes derniers mots, ma voix se brisa, mais aucune larme ne dévala mes joues. Je devais rester forte. Après cette entrevue, une femme nouvelle sortira de cette chambre, une femme qui n’a jamais exister auparavant. Alors les doutes, les craintes, je veux bien les laisser derrière moi, parce que j’ai choisi d’avancer désormais.

La Maladie d'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant