Chapitre 9

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- Et ça ? me propose-t-il en me tendant une boite de maïs.
Je crois qu'il va finir par désespérer. Cela doit bien faire une heure que nous sommes dans le magasin et je refuse tout ce qu'il me propose. Bon, il a quand-même réussi à me prendre des légumes et des steaks végétariens, mais pas grand chose.
Pablo pose la boîte de maïs dans le chariot et nous entrons dans le prochain rayon. Je sursaute lorsque j'aperçois, au bout du couloir, trois filles que je reconnais bien: Maria, Laura et Julia.
J'entraine Pablo dans le rayon de derrière avant de lui expliquer.
- Ce sont mes amies.
Pablo regarde aux alentours puis m'emmène à la caisse.
- On va essayer de se faire discret, dit-il.
- OH MY GOD ! s'écrit une voix.
Je tourne la tête vers la personne: Maria. Et merde... Cette dernière se précipite dans notre direction.
- Pablo Alborán ! J'arrive pas à y croire, je te rencontre dans un supermarché ! Je t'admire trop, t'es talentueux, t'es beau, t'es incroyable, je t'adore !
Puis elle tourne son regard vers moi. Je n'arrive pas à me détendre ; j'ai tellement peur qu'elle m'en veuille. Surtout après le regard qu'elle me lance. Elle semble d'abord extrêmement surprise puis son expression se change en colère. Si elle pouvait me tuer du regard, elle le ferait. Julia et Laura arrivent peu après, toutes deux choquées par la scène. Plusieurs personnes autour de nous semblent aussi très intéressées, ils se concertent, prennent des photos, vidéos. Ma vie est entrain de devenir un cauchemar...
- Désolé mademoiselle, s'excuse Pablo auprès de Maria, mais ce n'est vraiment pas le moment de créer une dispute.
- Ah oui ?! Pourtant pour moi ç'a l'air d'être parfait ! hurle-t-elle.
Pablo laisse le chariot sur le côté et me prend par le bras. Nous sortons en vitesse du magasin et rejoignons sa voiture. Il ne perd pas de temps pour démarrer. Nous arrivons enfin devant chez moi. Pablo semble anxieux. Il y a de quoi. Je pose ma main sur la sienne, aggrippée au volant. Il se détend un peu.
- Je suis désolée pour ce qui s'est passé, lui dis-je.
- C'est moi qui suis désolé, déclare-t-il.
Je le regarde avec incompréhension.
- Je n'aurai pas de problème après ce qui s'est passé, explique-t-il. Mais toi, je crois bien que si. Ton amie, je vois bien quel genre de filles c'est. J'ai peur qu'elle s'en prenne à toi à la fac, ou même sur les réseaux sociaux.
- Je n'ai pas de réseau social.
- Ça ne change rien au fait qu'elle puisse poster toutes sortes de choses sur toi à ton insu.
Là, je commence à prendre peur.
Finalement, j'aurais peut-être dû en parler aux filles avant. Mais je ne sais pas non plus comment elles auraient réagi. Tout ce que je veux, c'est pouvoir m'expliquer avec Maria, je ne veux pas qu'elle m'en veuille.
Pablo et moi restons dans la voiture encore un moment, dans un silence de mort. Il ne doit pas savoir quoi dire, ou alors il est plongé dans ses pensées. Moi, je n'ai juste pas envie de parler. Mais j'aime sa présence à mes côtés.
***
J'ai vraiment peur de croiser le chemin de Maria, mais en même temps, il faut bien que je lui parle. Peut-être que si je discute d'abord avec Laura, les choses seront plus simples. Je sais que je peux avoir confiance en elle. J'entre dans le bâtiment, et rejoins les filles pour notre première heure de cours. Elles m'accueillent toutes deux avec un large sourire.
- Tu vas bien ? me demande Laura.
- Il faut que je parle à Maria, avoué-je. Elle doit comprendre pourquoi je vous ai caché ça.
- Perso, je pense que ça servira à rien, Maria n'est vraiment pas coopérante en général. Quand elle en veut à quelqu'un, c'est pour toujours.
Je lui parlerai quand-même, il le faut. La matinée se déroule plutôt bien, même si notre cours de civilisation m'a littéralement achevée. A plusieurs reprises, j'ai senti des regards se poser sur moi et des chuchotements incessants.
Le midi toutefois, les choses commencent à s'envenimer; Maria s'est installée seule à une table à laquelle nous l'avons rejoins. Mais, lorsqu'elle m'a vue arriver, elle m'a lancée un regard de dégoût avant de discuter avec les filles, en m'ignorant complètement. Ok, ça va être plus compliqué que ce que je pensais...
Bizarrement, aujourd'hui Maria ne prononce pas une seule fois le nom de Pablo.
Le soir, je pars en direction du bar d'Alberto. Ce dernier semble surpris de me voir.
- Tu te souviens de ma décision ? me dit-il.
- Je suis peut-être virée mais j'ai quand-même le droit de prendre un verre, non ? répondis-je sur un ton que j'aurais voulu plus doux.
Alberto me sert un Mojito et retourne à l'arrière du bar. Il n'a pas l'air ravi de me voir ici; ce que je peux comprendre, il a dû perdre plusieurs clients par ma faute. Je n'aurais pas du venir ici; dommage que je ne connaisse pas une boite de nuit dans le coin. Moi, en boite de nuit ? Mais qu'est-ce qu'il m'arrive ! Jamais je n'ai posé les pieds dans une boîte de nuit et jamais je ne le ferai.
Je me décide finalement à rentrer chez moi, au moins là-bas, personne ne peut s'en prendre à moi. Enfin, pas directement du moins...
Lorsque j'allume la télévision, je zappe les chaînes, ne sachant pas trop quoi regarder ; jusqu'à ce que je tombe sur les informations: "le chanteur Pablo Alborán a été repéré il y a quelques jours dans un supermarché de Malaga - ville dont il est originaire - accompagné d'une jeune fille. Ils semblaient très proches l'un de l'autre et ont très vite été repérés". Une vidéo amateur s'affiche à l'écran: je peux me voir aux côtés de Pablo, Maria en face de nous. Ces imbéciles de clients n'ont rien d'autres à faire que de prendre ce genre de vidéos !?
"J'espère que Pablo protégera bien sa petite-amie car elle risque d'avoir des ennuis à venir avec cette fille, et probablement d'autres !"
La journaliste achève son sujet et passe à un tremblement de terre arrivé je ne sais où car j'éteins la télévision au même instant.
Ça n'aurait pas pu arriver à un autre moment ?! J'ai des partiels à réviser moi ! Les contrôles sont la semaine prochaine...
J'envoie un message à Pablo pour le prévenir du reportage, puis me plonge dans mes cours. C'est à ce moment-là que je réalise que je ne sais strictement rien de mes leçons.
Lorsque Pablo répond à mon message, j'en profite pour lui demander de l'aide pour mes révisions. Il ne refusera pas !
Bon, j'aurais pu faire un effort pour réviser avant, mais j'ai été prise dans les événements et le temps passe beaucoup trop vite !
Pablo arrive une bonne heure plus tard, le temps pour moi de ranger quelques peu mon appartement.
- Par contre, commence-t-il lorsque nous nous asseyons.
Je soutiens son regard, pas très rassurée par la suite de sa phrase.
- Je t'aide à réviser à une seule condition: tu changes de musique.
Je pouffe de rire. J'avais oublié que j'étais entrain de l'écouter. Car oui, Pablo m'a prêtée ses exemplaires des albums qu'il a déjà enregistrés. Je les trouve grandioses.
- Quoi tu n'aimes pas ? rigolé-je. Je trouve ça pas mal pourtant !
Pablo s'en va couper la musique de lui-même et remplace son album par un de Daddy Yankee. Très bon choix !
- Du coup, qu'est-ce que tu as à réviser ? me demande-t-il.
Je pose mon paquet de cours sur la table.
- Tout depuis le début de l'année.
Pablo semble soudainement désespéré, mais prend le premier bloc de feuilles et l'ouvre.
- Littérature espagnole, déclare-t-il. C'est parti !
Et nous continuons ainsi toute la semaine. Je ne pourrai jamais assez le remercier.

Ne m'oublie pasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant