« La fourrure de la peur »

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D'eux, Peter ne voit presque rien. Leurs chaussures, tout au plus. Leurs visages, s'ils daignent le surélever. Le reste de leurs corps, s'il prend la peine de se tordre le cou. Mais il n'en ressent jamais le besoin.

Disparaître dans les hautes herbes dès que Percy le dépose dans le jardin, ne même pas dépasser les gnomes de jardins avec qui il partage son nouveau territoire, tout ça devrait l'intimider, le pousser à reprendre sa cavale, à partir se retrancher dans ces terres de honte où déambulent les autres âmes reniées. Les premiers jours, il avait songé à le faire. À continuer de courir. Quand la paume de Charlie Weasley l'avait soulevé, interrompant son sommeil à l'ombre d'un fourré pour assouvir une curiosité enfantine, il avait failli le mordre et s'enfuir pour se terrer sous une meule de paille jusqu'à ce que la nuit tombe. Le morceau de fromage qu'il lui avait donné l'avait fait renoncer à ses envies. Il n'avait pas mangé depuis plusieurs jours et avait parcouru bien trop de kilomètres depuis Londres pour refuser de la nourriture gratuite.

Il s'était retrouvé confié à Percy avant d'avoir eu le temps de se remettre de ses émotions pour réfléchir et c'était alors que le petit garçon réfléchissait au nom qui lui convenait le mieux qu'il avait vu l'exemplaire de la Gazette du Sorcier posé sur la table. Cela n'avait pas été facile mais, après s'être juché en deux bonds adroits sur l'épaule de Bill, il avait fini par discerner le fait divers qui faisait les gros titres.

— C'est atroce, avait déclaré Molly peu de temps après, confirmant ce qu'il avait compris de sa brève lecture. Faire ça à ces pauvres Londubat, jusqu'à l'aliénation...

Une indignation égale se reflétait sur les visages d'Arthur et de Bill. Les autres, trop petits pour comprendre, avaient reporté leur attention sur lui, et, tandis que Charlie lui caressait la tête et que Percy demandait à sa mère s'ils pouvaient le garder, il avait compris.

Les Weasley n'avaient aucune idée de qui il était. Personne n'avait aucune idée de qui il était. Il avait regardé le doigt manquant à sa patte, avisé l'édition de la Gazette qu'Arthur feuilletait malgré Molly qui lui interdisait de se fasciner pour les détails sordides. Et il avait décidé qu'il resterait. Il avait tous les outils en mains. Une couverture parfaite, la baguette cachée dans le cimetière de Loutry Ste Chaspoule, une famille de sorciers prête à l'accueillir qui lui permettrait de saisir les occasions qu'il y avait à saisir.

D'eux, Peter ne voit presque rien. Leurs chaussures, tout au plus. Mais, de lui, eux ne voient vraiment rien. Un doigt, son nom gravé sur une tombe et un poil ras qui, lorsqu'il avait encore le loisir de se comparer à James et Sirius, l'avait complexé, voilà la poudre qu'il leur a à tous jetée au visage et qui, depuis, les aveugle.


J'ai choisi le titre de chapitre en 2017 et je vous avoue qu'il n'est plus franchement adapté... Au début, je voulais décrire le moment où Peter tue les Moldus, mais à la réflexion je me suis dit que ce n'était pas le plus pertinent et je me suis rabattu sur le moment où il a décidé de rester chez les Weasley. Je n'ai pas changé le titre parce que le meilleur truc qui me venait, c'était « La carapace poilue » et que, bon... Non, quoi.

Growing EvilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant