Chapitre 12

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Je n'ai pas envie que le week-end se termine.

C'est ce qui me trotte dans la tête depuis vendredi soir. Et c'est ce qui me pourrit le moral. En réalité, ce qui me fait penser ça, c'est vraiment le fait que je vais devoir retourner travailler dès lundi. Et ce n'est pas le travail en lui-même qui me gêne, non, c'est le patron.

— Prends soin de toi, me lança Jimin avant que je ne referme la portière de sa voiture.

Il venait tout juste de me déposer devant chez moi, après un après-midi passé ensemble. Je resserrai les pans de ma veste alors qu'une brise glaciale mordait ma peau avec férocité, emportant dans son sillage les feuilles désormais teintées d'orange.

J'hésite à rentrer tout de suite, ou à profiter un instant de l'air sec de fin d'automne qui me fait plutôt du bien. Quand la voiture de Jimin s'éloigne, le silence qui s'installe autour de moi n'est pas apaisant comme il devrait l'être. Il me semble oppressant, comme si quelque chose ou quelqu'un me guettait dans l'ombre. Je frissonne, pas seulement à cause du froid, mais à cause de cette peur latente qui me ronge de l'intérieur.

Je secoue la tête pour chasser cette sensation étrange et franchis finalement le seuil de ma porte. À peine entrée, j'ôte mes chaussures, les abandonnant maladroitement dans l'entrée, et je me dirige vers la cuisine. La maison est en désordre, signe que maman n'est pas rentrée, mais je n'ai ni l'énergie ni la motivation de tout ranger ce soir.

J'attrape une tasse dans l'évier, la rince rapidement avant d'y mettre un sachet de thé. Le silence de l'appartement, entrecoupé par les bruits de la bouilloire, me parait assourdissant. Je sursaute quand celle-ci fait un bruit assez conséquent pour indiquer que l'eau était assez chaude. J'en verse une bonne quantité dans la porcelaine que je tiens dans les mains et prends direction du salon.

Je m'installe sur le canapé, les genoux repliés contre moi, regardant distraitement l'écran de la télévision que je viens d'allumer sans vraiment faire attention à ce qui y est diffusé. Mon esprit est toujours ailleurs. L'image de mon patron continue de se superposer à mes pensées comme une ombre persistante.

Il faut que je fasse un brainstorming.

Il semble... Lire dans mes pensées, et contrôler les gens. Notamment la secrétaire, et moi. Puisque je n'ai pas oublié que je suis resté coincé un bon moment sur ma chaise quand il me l'a ordonné. Et le fait que je n'arrive pas à parler de ce qu'il se passe dans l'entreprise, me pousse fortement à penser qu'il sait manipuler les esprits, d'une quelconque manière qu'il soit.

Ensuite, et bordel, il était clairement mort sous mes yeux !

Ce trou dans sa poitrine que je revois distinctement, là où son cœur était censé être. Et pourtant son organe était littéralement à côté de lui. Ce n'est clairement pas normal. Un Homme, un humain, ne peut pas revenir à la vie avec le cœur arraché, ça se saurait sinon.

Un frisson horrible remonte le long de ma colonne vertébrale, et je sens la nausée s'installer en moi. Mon estomac se noue, et la tasse de thé dans mes mains me semble soudain trop lourde à tenir. Je respire profondément, essayant de calmer ce malaise qui s'étend en moi, mais l'image de mon patron, de ce corps sans vie, continue de me hanter.

Tout comme ce cauchemar que je fais depuis quelques mois. Je peux... exaucer votre souhait, effectivement. Mais je ne fais jamais rien gratuitement, vous savez ? Cette phrase qui me hante pratiquement chaque nuit. C'est lui, j'en suis sûre et certaine.

Les premières heures du stage étaient prometteuses. J'étais enthousiaste, prête à apprendre. Mais tout a basculé lentement, presque imperceptiblement, jusqu'à ce que je me retrouve piégée dans une toile de malaise, d'insécurité, et de peur. Son comportement, ses insinuations à peine voilées, m'ont mise sur la défensive. Et maintenant, je ne sais plus quoi faire. Partir ? Impossible, il m'en a interdit. Mais rester signifie subir encore cette torture psychologique.

Je prends une gorgée de thé, espérant que la chaleur puisse dissiper un peu l'angoisse qui me serre la poitrine, mais en vain. Mes pensées dérapent. Et si... et si ce n'était pas juste de l'intimidation ? Et si c'était pire ?

L'idée me glace. Je ne veux pas penser à ça, mais c'est comme une évidence qui me frappe de plein fouet. Ce trafic dont il a parlé, ce plan qu'il m'a soufflé à l'oreille en ricanant, était-ce une plaisanterie ? Ou bien était-ce sa manière de me tester, de voir jusqu'où je serais prête à aller ?

Je me lève brusquement du canapé, incapable de rester assise plus longtemps. Je pose ma tasse sur la table basse et laisse mes pieds me guider inconsciemment vers la fenêtre. Dehors, la rue est déserte, éclairée uniquement par la lumière jaune des lampadaires. Tout semble si calme, si paisible. Rien dans cette scène ne reflète le chaos qui tourbillonne dans ma tête. Je me mords la lèvre, sentant mes mains trembler légèrement.

Quand j'y repense, c'est vraiment... Inhabituel. Je devrais faire des recherches. Mais dans quoi est-ce que je m'embarquerais ?

Je me redirige vers la table où repose mon téléphone. Je devrais peut-être appeler Jimin. Mais que pourrais-je lui dire de plus que je n'ai déjà dit cet après-midi ? Il sait que quelque chose ne va pas, mais je ne peux pas lui imposer ça. Il serait furieux, probablement plus en colère que moi. Il chercherait une solution, mais je ne suis pas prête à agir. Pas encore.

En silence, je repose mon téléphone et ferme les yeux, prenant une profonde inspiration. Puis je prends la direction de ma chambre. Il faut que j'en aie le cœur net.

Je pousse la porte de ma chambre, allume la petite lampe de bureau et m'assois devant mon ordinateur portable. Mon cœur bat trop vite, presque douloureusement, comme si une vérité que je n'étais pas prête à découvrir me guettait. Le bruit du clavier résonne dans la pièce tandis que je tape fébrilement : "lire dans les pensées", "contrôler les esprits", "hypnose". Rien de très concluant. Des articles de pseudo-sciences, des forums étranges. Rien qui corresponde réellement à ce que j'ai vécu.

Je me mords la lèvre, frustrée, et change de tactique. Je recherche "mort revenu à la vie", "sans cœur" — une part de moi refuse de croire à ces mots absurdes. Mais pourtant, je l'ai vu. Ce trou béant dans sa poitrine, ce cœur arraché, et lui, debout devant moi, comme si de rien n'était. Je secoue la tête, essayant de ne pas m'attarder sur cette image. Une autre série de résultats surgit à l'écran, cette fois plus inquiétante. Des légendes, des récits... des créatures surnaturelles. Le terme vampire apparaît plusieurs fois. Je fronce les sourcils.

Je clique sur un lien et lis les premières lignes. Vampires : immortels, capables de lire dans les pensées, de contrôler l'esprit de leurs victimes, et surtout... capables de revenir d'entre les morts. Je sens un frisson glacial me traverser. Mes doigts tremblent alors que je continue de lire, la gorge nouée. Hypnose, manipulation mentale, immortalité... Tout semble correspondre.

Je recule légèrement, les yeux fixés sur l'écran. Non... c'est impossible. Ce ne sont que des mythes, des histoires pour faire peur aux enfants, rien de plus. Pourtant, les signes sont là. Et Taehyung... Il correspond à tout cela.

Je ne peux pas continuer à m'auto-persuader que tout va bien.

Parce que rien ne va.

𝐈𝐌𝐏𝐄𝐑𝐎 | kthOù les histoires vivent. Découvrez maintenant