Kagami • PLK

3 • Five stars

Mathieu Pruski

Mon téléphone sonne dans la poche arrière de mon jean pour la troisième fois en à peine une minute me faisant soupirer, excédé de ne jamais pouvoir être tranquille rien qu'une journée.

J'essuie mes mains pleines de cambouis sur un chiffon et réponds sans regarder qui s'acharne malgré mon évident manque d'intérêt.

— Allô ?

— J'ai le temps de me faire kidnapper six fois avant que tu daignes décrocher, imbécile !

— Pas de risque Alicia, personne n'est assez cinglé pour enlever une chieuse comme toi.

— Enfoiré, tu ferais mieux de ramener ton cul ici avant de finir sous terre.

— Merci pour cette invitation chaleureuse mais je suis dans l'obligation de décliner.

— Je vais annuler ta tournée, tu vas voir si tu déclines.

— Abus de pouvoir !

— Si c'est Antoine qui doit te faire bouger, ce sera moins plaisant.

— Conspiration wesh !

— Tu crieras au complot plus tard Mathieu. Enfin si t'es encore en vie d'ici là.

— C'est bon, j'arrive. Mais c'est Lisko qui m'a déposé au garage, je dois l'attendre.

— Je sais très bien où t'es. Je suis là dans cinq minutes, bisous.

La brune raccroche aussitôt, me laissant perplexe. Alicia n'a pas le permis et c'est tout juste si elle accepte de conduire une voiturette de golf. Alors à moins qu'elle ait décidé de venir jusque Clamart à pieds, j'ai du mal à l'imaginer débarquer d'un moment à l'autre.

Je lave mes mains avant de me réchauffer dans le sweat que j'avais enlevé en priant pour que l'air glacial qui règne ne finisse pas par tuer le peu de poumons qu'il me reste.

Je comptais vraiment profiter de ce samedi pour mettre le taf entre parenthèses. Filer un coup de main au garage me permet toujours de souffler un peu tout en me rappelant que c'est pour ne plus trimer que je me donne autant dans le son. Et surtout, j'avais prévu de demander à mon frère s'il voulait qu'on se fasse un truc ensemble ce soir. Mais puisque la voiture de Ken vient de se garer sur le parking, je suppose que je vais devoir reporter ma proposition.

— J'y vais chef, j'ai fini la 206 du fond, elle devrait repartir comme si de rien n'était.

— Merci Mathieu, fais attention à toi.

— Toujours.

Il me fait un rapide signe de tête et je me tire au moment où son client arrive. Rien n'a vraiment changé, pas même mon anonymat auprès des fidèles de mon ancien boss. Il semblerait seulement que le meilleur mécano de ce garage ne soit plus de l'équipe.

Les cheveux longs que j'aperçois à travers la vitre teintée ne sont certainement pas ceux de Ken. Le grec à beau se prendre pour une tête à coiffer, il ne m'a pas encore parlé de poser des extensions. J'en conclus donc qu'il a chargé sa femme de me récupérer. Content de la revoir, je m'engouffre dans l'habitacle de la caisse avec un sourire franc aux lèvres. Mais la gueule crispée face à laquelle je me retrouve le fait disparaître très vite.

— T'es pas la go de Nek toi.

— Bien joué Sherlock. Ceinture.

Son ton sec me file la chair de poule. Bordel, quelqu'un a vraiment pondu une môme aussi infâme que celle-ci ?