Dans L'ombre Du Monde

chapitre 8

L'heure de la sortie arrive bientôt et Jimmy vient lui ouvrir, il tient Angel d'une main, la batte électrique collée contre son dos.

- Si tu fais le con. Dit-il. C'est elle qui morfle. Il appuie la matraque un peu plus fortement contre les côtes de la jolie brune. Cette dernière ne peut retenir le grognement de peur qui sort de sa bouche.

Peter se relève difficilement, tend les mains et s'avance douloureusement vers les autres. Ils sont tous accompagnés jusqu'à la petite porte qui les mènent à la coure. Un à un, les enfants sortent et Peter, le dernier, est poussé fortement dans son dos encore stigmatisé par ses mésaventures d'hier dans la salle de bain, provoquant un sursaut et un gémissement de douleur. Affaiblis de n'avoir rien manger en plus, il perd pied et tombe à genoux contre l'asphalte, au milieu des autres enfants paralysés de peur.

Jimmy éclate de rire et referme la porte. Laissant les jeunes gens prendre l'air et Peter souffrir sous le regard angoissé des plus petits.

Rapidement Angel aidée d'une autre jeune fille, vient relever Peter. Toutes deux l'aide à avancer et à s'asseoir dans un coin ensoleillé de façon à le réchauffer un peu. Le héros frissonne malgré lui. Et une migraine s'est installée depuis quelques minutes.

La plus jeune les regarde et les laisse tous les deux alors que le garçon laisse sa tête reposer en arrière contre le mur. Les jambes pliées devant lui, ses avants-bras posés sur ses genoux. Peter se permet de fermer les yeux.

Angel jette un regard à droite et à gauche pour être certaine qu'ils ne sont pas surveillé puis sort de la poche de sa veste zippée une pomme qu'elle a gardé pour Peter ce matin.

- Hey, Peter. Dit-elle tout bas.

Le jeune homme ouvre les yeux lentement et tourne son regard vers son amie. Cette dernière lui pose le fruit dans la main et lui sourit.

Touché, Peter croit un instant qu'il va pleurer tant il est soulagé de pouvoir manger même si ce n'est pas grand chose, sans compter que ce geste le touche énormément.

- Merci Angel. Souffle ce dernier fatigué. T'es vraiment un ange. Rajoute-t-il en souriant légèrement.

- Mange. S'empresse-t-elle de répondre pour cacher sa gêne.

Le fruit est un délice, le jeune homme le dévore en quelques minutes, mais les blessures de Peter ne lui laissent que peu de répit. Il faut absolument qu'il se reprenne. Sinon il ne pourra aider les autres.

Une fois la pomme finit, Angel toujours assise contre lui, sort le téléphone de Jimmy qu'elle a caché dans une de ses chaussettes, bien à l'abri.

Peter le saisit rapidement et le cache avant qu'il ne soit vu. Ici c'est bien trop risqué de le sortir. Qui sait si Jimmy, Diego ou le troisième type ne les surveillent pas à distance. Mieux vaut être prudent. Le jeune homme repositionne sa tête contre le mur, ferme les yeux et expose une nouvelle fois, son visage au soleil timide du matin.

- Peter, j'ai eu vraiment peur pour toi. Ose finalement lui dire la jolie brune. Ce que tu as fait était incroyable mais aussi dangereux. Elle pose ses doigts fins sur le menton de Peter et le force à tourner la tête vers elle.

Il ouvre les yeux et observe ses traits parfaits.

Elle examine attentivement, les sourcils froncés, les bleus et les petites plaies que Peter a sur le visage. Elle glisse son pouce sur la pommette abîmée du jeune héros. Son touché est doux et léger.

Peter déglutit, ce geste le réconforte et l'encourage à la sauver, à les sauver tous. Il ne détourne pas les yeux, toujours silencieux. Curieux et anxieux d'un tel geste. A-t-il seulement le droit à tant de douceur ?

Puis Angel l'examine encore et constate les innombrables blessures que le jeune homme a sur les bras et le torse. Elle voit les brûlures et les hématomes qui barbouille son corps. Les kidnappeurs n'y sont pas allés de main morte.

- Mon Dieu. Souffle-t-elle alors que sa main s'aventure sur le côté du jeune homme. Elle effleure une ecchymose due à la batte électrique. Quand ses doigts frôlent la peau amochée, le jeune homme se tend et ses muscles se contractent provocant un souffle douloureux. Dans son sursaut, il s'empare de la main d'Angel et la serre dans la sienne.

- Ne fais pas ça. Dit-il essoufflé. Ça chatouille. Continue-t-il quand il voit le doute dans les profondeurs sombres de ses yeux noirs.

- Pardonne-moi. Elle lève sa seconde main et la pose sur la joue du jeune homme. Un instant plus rien n'existe autour d'eux. Seul le regard de l'autre compte à ce moment précis. Les deux adolescents se sont rapprochés rapidement. Certainement dû à leur captivité. Mais ici, maintenant, rien ne compte mis à part l'autre. C'est comme s'ils étaient seuls et que rien ni personne ne pouvait les arrêter.

- Angel je...

Il voudrait lui dire, lui expliquer qui il est, qui il est réellement. Lui dire qu'il n'a pas le droit au bonheur, qu'il ne le mérite pas et qu'il est maudit. Que chaque personne qu'il aime s'en va en souffrant. Son père, sa mère, son oncle. Lui expliquer cette culpabilité qui chaque jour lui brûle un peu plus le cœur.

- On rentre bande de merdeux. Hurle Jimmy de l'autre côté.

Les deux jeunes gens sursautent et se séparent rapidement.

C'est un mouvement un peu trop brusque pour Peter qui se plaint dans un halètement.

Angel s'inquiète, mais d'un clin d'œil, il la rassure rapidement. Se tenant le côté endoloris, la belle brunette l'aide à se relever et tous deux rejoignent leur maton.

Jimmy surveille plus étroitement Peter que les autres. Il sait qu'avec lui, ils ont du fil à retordre.

Quand chaque gamin est enfermé dans son compartiment, Peter se pose une nouvelle fois au sol et prend appui contre le lit. Il sort le téléphone de sa poche et l'observe. Il veut joindre Monsieur Stark à tout prix.

Malheureusement, le réseau est inexistant dans sa cellule, les murs sont trop épais et la porte bloque tout de plus la batterie est tellement faible, à peine de quoi passer un appel et il espère, être localisé. Le jeune homme regarde sa porte de façon à être certain de ne pas être pris la main dans le sac.

Il le déverrouille et remercie silencieusement cet imbécile de Jimmy de ne pas avoir mis de code pour accéder à l'écran d'accueil.

Peter pouffe d'un rire contenu quand il voit la photo de fond d'écran. Ce type n'est qu'un gros beauf. Le jeune homme accède au clavier et tape le numéro pour l'enregistrer et être prêt le moment venu. Il devra téléphoner une fois dehors. Il cache le portable derrière sa chasse d'eau quand une conversation lui parvient aux oreilles.

- Avancée ? Demande Diego. Mais à quand ?

- Dans deux jours. Lui répond John. Ça devient trop risqué. Ce gosse nous mène la vie dure et je n'ai pas envie d'en chier avec les acquéreurs.

- Comment ça va se dérouler alors ? Demande Jimmy.

- Les acheteurs seront là d'ici peu. Nous devons préparer la marchandise. Rétorque le boss. Ces gosses doivent être impeccables.

Peter fronce les sourcils, s'il doit agir, il doit le faire demain au plus tard sinon les choses risquent d'être compliquées.

Le soir venu, il est comblé quand il a droit à un plateau comme tous les autres. Il va pouvoir se rassasier et reprendre des forces. Bien sûr, ce n'est pas un repas gastronomique, loin de là, mais une pomme en presque trente-six heures, bien qu'heureux qu'Angel lui ait offert, n'était pas suffisant.

À la pensée de la jeune fille son cœur se gonfle d'une bouffée d'air pur. Comme il aurait aimé la rencontrer dans d'autres circonstances. Peut-être osera-t-il l'inviter au cinéma après tout ça ? En a-t-il seulement le droit ?

La nuit tombe une fois encore et un jour de plus s'éteint oubliant ces enfants prisonniers loin des leurs.