6. Under the masks

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Venise, Italie

Le carnaval de Venise attirait chaque année de plus en plus de touristes curieux. Mais finalement, un carnaval, ce n'est qu'un défilé de personnages grotesques et bariolés qui se suivent sur des musiques fanfaronnantes. Alors aujourd'hui, si vous deviez vous remémorer un carnaval que vous n'oublierez jamais, il y a de fortes chances que vous me répondiez: aucun. Pourtant, ils vont s'en rappeler pendant longtemps de ce carnaval-ci.
Recontextualisons les choses: nous sommes le 4 février 2017 et le défilé bat son plein aux sons des trompettes, des batteries et des xylophones portables. Le but du jeu, c'est qu'il peut y avoir n'importe qui sous ces masques et ces pantins. Un mari responsable, une femme adultère, un tueur en série... et soudain, dans ce chaos organisé, un coup de feu net. Une silhouette masquée et déguisée tombe sur le bitume dans un flot de sang horrifique. La foule paniqua en criant de terreur et en se dispersant comme des animaux effrayés.
La police avait mis quelques minutes à arriver. Elle avait bouclé la zone avec des rubalises et des barrières. Le lieutenant Serena Esposito examina directement le corps après avoir revêtu des gants en plastique. Elle ôta tout d'abord le masque de paon qui recouvrait un visage strié de veines noires. Le trou sanguinolent au milieu du front était bien étrange lui aussi: la blessure était ouverte vers l'extérieur et non l'intérieur comme ç'aurait dû l'être et en plus, elle semblait beaucoup trop propre pour qu'une arme à feu en soit l'origine. En soulevant le corps, Serena ne vit aucune blessure à l'arrière de la tête. La victime était un homme d'une cinquantaine d'années, grisonnant, parsemé de quelques rides. Serena fouilla alors le costume dans son intégralité et trouva le portefeuille appartenant à l'homme.
- Vito Mancini, cinquante-trois ans, dit-elle en lisant la carte d'identité de l'individu. Deux cent soixante-treize Euros et cinquante-trois centimes en liquide. On peut écarter le vol comme mobile.
Elle remarqua une bague en argent à son annulaire gauche. Elle se releva et tendit le portefeuille à l'un de ses collègues.
- Prévenez le contrôle des habitants et demandez-leur où il habitait. Prévenez ensuite sa famille.
- À vos ordres! répondit l'assistant.
Serena s'éclipsa de la scène de crime tandis que les médecins légistes prenaient des photos. Elle repensa alors aux probabilités de l'arme capable de produire une telle blessure et ne trouva rien de concret. Elle détacha alors ses longs cheveux teints blonds et bouclés et alluma une cigarette. Elle avait déjà mal à la tête et se résolut de prendre un bon café. Après son breuvage, elle retourna à son bureau, sa place de travail, grande et spacieuse, munie de tout le confort et l'équipement nécessaire. Après avoir noté le nom de la victime sur le tableau blanc ainsi que le lieu où le cadavre avait été trouvé, elle reçut la visite de l'un des officiers. Il se nommait Alfonso Rizzo et posa sur son bureau un tas de fiches agrafées. Serena le remercia et parcourut les fiches. Elle avait l'adresse de la victime ainsi que l'heure présumée de la mort (qu'elle nota sur le tableau). Elle décrocha son téléphone et appela la famille concernée en essayant d'adoucir ses propos. En quinze ans de carrière, elle avait appris à choisir ses mots. La femme de Vito, une certaine Alicia, s'effondra en larmes à l'autre bout du combiné. Serena leur donna l'adresse du poste et en vingt minutes, Alicia et quelque proches étaient présents. Serena leur posa quelques questions d'usage et Alicia demanda à voir le corps. Serena faillit lui dire non pour la protéger, mais après tout, elle n'avait pas le droit de lui interdire cela. Elle descendit donc à la morgue où le corps avait été emmené pour une future autopsie et Serena annonça gravement que ça n'allait pas être un spectacle très réjouissant à voir.
Quand elle souleva le drap blanc du corps, elle fut la première surprise. Alicia ainsi que les deux parents de Vito qui l'accompagnaient eurent un haut-le-coeur et Serena elle même ne se sentit pas bien. Les veines noires que le cadavre possédait à sa découverte avaient maintenant muté en une espèce d'énorme tumeur palpitante. L'oeil gauche de la victime en était presque sorti de son orbite tant la tumeur avait déformé son visage. Cette fois, elle en était sûre: la blessure n'était pas faite avec une arme à feu banale. Et elle ressentit un frisson lorsqu'elle chercha mentalement les armes capables de faire ça et ne trouva rien du tout.
Elle n'arriva pas à fermer l'oeil de la nuit, ruminant sans arrêt les possibles causes du phénomène. Tandis qu'elle était seule dans le noir, une ombre se dessina sur les murs de son appartement, grande et filiforme. En voyant cet étranger, elle écarquilla les yeux, se redressa dans son lit, son coeur palpitant fébrilement dans sa poitrine. Son visage était caché dans l'ombre mais Serena sentait que la silhouette l'observait.
- Qui... Qui êtes-vous? bégaya-t-elle.
L'ombre ne répondit pas et se contenta de la fixer avant de disparaître comme s'il s'agissait d'une image de vieille télé en noir et blanc.

Little Nightmares Saison 2 (Série)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant