Les oiseaux virevoltent l'air affolés comme s'ils avaient peur des masses grisâtres et assombries qui surplombaient leurs têtes,une petite fraicheur fatale faisait craqueler, de temps en temps ,de pauvres dents faisant ainsi une parfaite symbiose avec cet air novice ponctué d'une certaine curiosité, d'une incertitude, d'une peur.
Les étudiants allaient et venaient, les nouveaux bacheliers aussi.Mais ,d'une
certaine façons, les uns se distinguaient des autres.Les étudiants semblent avoir plus d'aise,ils se retrouvent, se sautent dessus ,rigolent, mangent sans gêne, se racontent des anecdotes, vont à la bibliothèque, y entrent et ressortent sans qu'on leur indique la porte de sortie tandis que les NB (nouveaux bacheliers) ,tous sur leur trente et un, regardent la bâtisse avec émerveillement, demande à tout bout de champs le lieu où a lieu la visite médicale, esquivent maladroitement ceux qui proposent des photos-minutes, oublient soit leur numéro d'identifiant, soit un dossier à fournir ,s'affolent au point de fondre en larmes ,s'assoient par terre à cause de la longueur de la fil et du soleil qui se lève et qui commence à faire des siennes, s'énervent à cause de la banalité de la visite médicale, demandent où sont les toilettes, où trouver à manger et ces étudiants accompagnants qui leur courent après et dont les t-shirts sont marqués "accueil nouveaux bacheliers " ne les laissent pas du tout neutres, presque tout le monde les reconnait. Mais surtout, sur leurs visages, se lit la peur de l'inconnu, de l'avenir car le public n'a pas une très glorieuse réputation, le taux de chômage n'aidant pas.C'est aussi valable pour les étudiants, presque tous les étudiants, en tout cas ceux qui sont sûrs qu'ils ne peuvent compter que sur eux pour voir pointer l'horizon de la réussite.Les moins réalistes viennent, la confiance débordante ,croyant déjà réussir leur parcours universitaire car jusque-là ils ont toujours cartonné, ils sont sûrs de leurs choix.Les plus déséquilibrés doutent de leurs choix encore et encore et finissent par se motiver eux-mêmes ou aller la chercher. Les plus pessimistes envisagent déjà leurs échecs et prévoient des formations à suivre dans le privé ou trouver du travail quelque part. Ceux qui se les jouent activistes ,eux ,n'ont de yeux que pour les amicales et pleines d'autres catégories. Naturellement, il se peut qu'une personne appartienne à plusieurs de ces catégories.Une tape à l'épaule me fit émerger de ma profonde observation. Je fis volte-face et fis face à un accompagnant au regard de son t-shirt.
-Excusez-moi! Vous êtes nouvelle ?Demande t-il.
-Oui monsieur !
-Vous avez déjà fait votre visite médicale ?
-Oui ,c'est fait! Merci !
-Si vous avez besoin d'aide,n'hésitez pas à venir vers nous.
-En fait, mon seul souci est que mon téléphone refuse de télécharger mon certificat d'inscription et j'ai bien peur qu'il ne soit demandé au moment de l'inscription pédagogique.
-Suivez-moi, on va voir ça ensemble.Il marche, traverse de petites ruelles, moi sur ses pas, me demandant si c'est une université ou une ville. Arrivés devant ce qui semblait être un immeuble où il est marqué "pavillon A", il s'est arrêté et s'apprêtait à prendre les escaliers quand, dubitative,je lui lance:
-Où est-ce qu'on va?
-Dans ma chambre !S'exclama t-il avec tout le naturel du monde.
-Allons plutôt nous assoir sur un banc public !Nous nous sommes finalement posés sur une sorte de monument. Il m'a avoué que c'était effectivement un monument bâti en hommage à un martyr,il a été tué par balle, par un policier lors d'une manifestation .Il gisait par terre, dans un bain de sang et des années après, la tâche de sang était toujours là car pour eux, l'effacer serait effacer le souvenir douloureux de cet évènement tragique.Il nous représentait tous,tous autant que nous sommes.Fruit d'une injustice avait été sa mort, victime d'une injustice il a été. Et pourtant ,il ne réclamait que son droit, il ne faisait que servir un politicien aux discours patriotiques, aux promesses savoureuses, croyant servir le peuple.Que leurs morts ne fussent point vaines, que le diable ne prit point note de leurs agissements, que les forces de désordre fussent emportées par de forts tourbillons,comme par magie, que le pays se débarrassât de l'ensemble de ses ordures les plus abjectes. Finalement, ils ont décidé d'en faire un mémorial. Comment vous expliquer la négativité qui s'est soudain emparée de moi?L'ambiance morose que je percevais,tout d'un coup,dans chaque geste?
Ensuite, il a voulu que j'essaie de télécharger mon certificat sur son téléphone pour voir si ça marchera mais ,ayant ouïe dire que certains sauvegardaient les mots de passe des NB afin de pouvoir illicitement voter pour leur amicale, j'ai refusé d'y entrer le mien.Il m'a trouvée difficile et je lui ai fait savoir que c'était de la vigilance. Il m'a donné des conseils sur les études universitaires comme ils le font tous et, tout en le remerciant, je pris congé.
Il y a de ceux qui profitent qu'on soit novice dans quelque chose ou quelque part pour en profiter et nous faire passer pour des cons mais il y a aussi, et c'est ce qui est le plus captivant, ceux qui aident sans rien attendre en retour ,sans arrières pensées.Mention spéciale aux accompagnants et amicales qui,depuis le début,ont été et sont toujours là. Ils nous ont accompagnés de la période de la pré-inscription à nos jours.Comment retrouver mes repères ?Quelle voie emprunter? Voilà que j'avais honte d'apostropher à nouveau quelqu'un pour lui demander le chemin mais je n'eus point le choix.Je trouvai une belle dame au sourire radieux que je saluai et lui demandai le chemin de la sortie et lequel bus prendre pour me rendre aux Parcelles Assainies. Elle se moqua un peu sur le fait qu'elle savait que j'étais nouvelle et me montra du doigt une allée appelée "couloir de la mort" ,allée qui me mènerait à la sortie, allée qui me mènerait chez moi.
Tout au long, je me demandais pourquoi ce nom pour ce chemin.Était-il dangereux ?
Ma raison, pour ne pas que ma tête explose,m'a donné une explication à ce nom.Explication à laquelle je préfère me tenir.Le couloir de la mort ne finissait pas. Je marchais encore et encore. Certains marchaient droit devant eux et sûrement tandis que d'autres déviaient, entraient dans des bâtiments ou s'arrêtaient pour rigoler avec d'autres.
J'en ai déduit alors que cet endroit est l'image parfaite de la vie estudiantine .
Le couloir de la mort est ce qu'il est parce qu'il peut ,aussi long soit il,aussi bien engendrer une réussite qu'un échec ou bien même un retard.Et la plupart du temps, il conduit à l'échec car il faut de la patience et de la persévérance pour arriver à bout.
Ceux qui marchent droit devant eux et qui restent concentrés symbolisent la réussite car ils suivent un but bien précis: arriver à la rive.Ceux qui déviaient, l'échec.Car ce sont ceux qui,à cause de la liberté que leur offre la vie étudiante, sombrent dans la mer de tentations et foutent leurs vies en l'air.
Ceux qui s'arrêtaient,incarnent le retard.Car à force de se consacrer à des futilités, ils reprennent des années, perdent donc du temps et des années de salaires, ont des chances minimes d'être sélectionnés en master.
Le chemin sera long et tortueux. Accompagnez nous sur ce petit voyage qui sera décisif dans l'évolution de notre vie.Car ce qui est sûr, c'est que nous verrons des gens qui arriveront à la rive,certains vont se noyer et d'autres auront beaucoup de difficultés à s'en sortir.
Vendredi 02 septembre 2022
02h30
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Dans les coulisses de l'université Cheikh Anta Diop de Dakar
MaceraCeci est une œuvre assez expérimentale, comme dans la plupart des œuvres.L'histoire, dans sa fiction, est d'une profonde réalité. Des scènes vécues, des vies (histoires) racontées , des sourires échangés, des peines ressenties, de la vivacité, de la...