Livre 3 Chapitre 44

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                                                                                 6 ans plus tard

                                                                                        Arlun


Du revers de la main, je m'essuie le front en poussant un soupir de fatigue et pose doucement la hache au sol en regardant le soleil à son zénith.

-Pff, je suis exténuée... Je vais faire une t'ite pause moi... Je souffle en baissant les yeux vers le haut tumulus de Björn que je distingue à travers les fourrés de l'île Munsö. C'est plus de mon âge de couper du bois, tu sais... De toute façon, y'a plus tellement de choses qui sont d'mon âge ! J'ajoute désabusé en secouant doucement la tête, sentant mon dos irradié douloureusement. Pas grave, je demanderai à Biarni ou à l'un des garçons lorsqu'ils viendront me rendre visite. Peut-être bientôt j'espère... J'ajoute en me dirigeant d'un pas lent vers le banc de bois posé juste à côté de la porte d'entrée.

Je m'y laisse tomber et un long moment, observe en silence le ciel bleu puis le lac Mälar où quelques canards nagent tranquillement avant de me remettre à parler. Depuis la mort de Björn, j'ai pris l'habitude de discuter tout haut, comme si je lui parlais à lui, comme s'il était toujours à mes côtés. Peut-être pour briser cette solitude que je ressens parfois, peut-être aussi pour souffrir un peu moins. Car son absence à laisser un grand vide en moi, l'impression de n'être plus entière. Et même si la douleur s'en est allée, la tristesse demeure toujours. Et l'envie de vivre s'amenuise avec les jours qui passe...

-Cela fait bien trop longtemps que je n'ai pas vu au moins l'un des nôtres... Je soupire en sentant une vague de tristesse m'envahir. La dernière fois, c'était juste avant que l'hiver ne s'installe, il y a six mois il me semble... Oui, six mois. Mais avec cette foutue guerre... Pff, c'est bien une idée d'homme ça, la guerre ! Oui, je sais, j'aurais pût retourner vivre à Uppsal quand le fils d'Harald à décider d'envahir la Suède il y a deux ans, mais tu connais mon avis sur la question...

C'est peut-être un entêtement stupide, mais j'ai toujours refusé de quitter l'île de Kungsberga... Sûrement parce que je ne voulais pas être loin de Björn, ne serait-ce que pour quelques jours... Sûrement aussi pour ne plus voir les malheurs de ce monde souvent causé par la cupidité des hommes...

Je ne suis sortie de cette île qu'une seule fois, pour le couronnement d'Henrik...

C'était trois mois après la mort de Björn... Mon fils était venu me chercher pour que j'assiste à son sacre et pour que je transmette mon rang à Frigg, comme le voulait la tradition. Il faisait froid ce jour-là, les chemins étaient détrempés par les pluies automnales et alors que nous venions de retrouver le continent, j'étais montée à ses côtés dans la petite carriole qu'il avait emmenée exprès. Avec douceur, Henrik avait déposé une épaisse peau sur mes épaules avant de faire avancer la monture. Tout le long du chemin qui avait duré un jour entier, j'ai eu la tête posée contre son épaule, le questionnant tout bas sur le reste de notre famille, sur ses enfants, sur le royaume. J'appréciais la beauté des paysages qui défilaient autour de nous, j'appréciais sa présence rassurante, sa force tranquille et même ses silences...

Notre arrivée au château fût l'occasion de retrouvaille joyeuse emplie de larmes de joie et souvent de tristesse. Les miens me manquaient horriblement, je leur manquais terriblement, mais malgré leur insistance, je ne me voyais pas revenir vivre ici, en ces lieux où je voyais Björn partout. Chaque recoin, chaque objet me rappelait son absence douloureuse... Et puis, j'étais bien sur mon île à veiller sur lui...

Le couronnement commença alors que le soleil était à son zénith et je me revois, debout devant l'estrade à tenir la main des deux plus jeunes enfants d'Henrik et de Frigg, Cyrid et Astrid. Devant moi sur ma gauche, Ida aux côtés de Fadlân qui tenait la petite Aya dans ses bras. Juste derrière, Biarni entouré de ses deux femmes, portant le petit Björn qu'il avait eu avec Freyda. Et juste devant lui son cadet, Anund, l'un des fils de Gisela. Sur ma droite, Ragnhild et Lothar qui tenaient la main de la douce Helgi et devant eux, les quatre inséparables. Signe, Arslanthor, Erik et Elma. Ceux-là étaient toujours fourrés ensembles à faire toutes les bêtises les plus inimaginables les unes que les autres... Et juste derrière moi parmi les conseillers du défunt roi, Elke, devenue une belle jeune femme. La petite malheureuse que nous avions côtoyée le temps d'une journée, lors d'un rassemblement aux Dises était devenue une grande dame. Elle abordait sur le sein gauche la magnifique fibule qu'Henrik lui avait offerte des années auparavant et j'avais appris avec une joie sincère qu'elle s'occupait d'un lieu consacré aux enfants en la ville de Sigtuna. J'étais fière qu'elle parmi tous les autres poursuive mon action...

Elsker Nord (L'amour du nord)       Livre 2 et Livre 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant