Eòlach

Chapitre 17 - Quand le passé vous rattrape

Shain sentit un frisson glacial parcourir son échine. Ivan était déterminé, désespéré, et dangereux. Acacio, bien que choqué par la vision de son père maltraité, se ressaisit, prêt à combattre pour leur vie s'il le fallait.

— Nous ne sommes pas responsables de vos tragédies, déclara Acacio d'une voix ferme. On ne vous connaît pas, alors comment on pourrait être responsable de la disparition de vos filles.

— Ton père me connaît, alors ne faites pas les innocents !

Acacio regarda son père, lui demandant silencieusement si c'était la vérité. Millian fit non de la tête, réfutant les affirmations de son kidnappeur.

— Ton armée a envahi et rasé mon village lors de la Guerre des Cendres. Il ne restait plus rien après votre passage. Et tu oses dire que tu ne te souviens pas de moi.

— Nous étions en guerre, répondit difficilement Millian.

— Ce n'était pas une raison pour tuer autant des nôtres. Beaucoup ne voulaient pas se battre mais ils y étaient obligés sinon leurs familles étaient massacrées. Ils vous auraient suffi de les faire prisonnier. Et tu as tué mes filles qui n'avaient rien demandé.

— J'admets avoir fait beaucoup de victimes sur le champ de bataille, haleta le directeur, mais jamais je ne m'en suis pris à des civils. Je n'attaquais pas les villages, ou j'organisais des assauts-éclaire pour capturer ceux qui n'avaient pas fui loin des combats pour justement ne pas tuer. Si un soldat n'avait plus l'envie de se battre, je l'assommais et le faisais prisonnier. Chacun de mes hommes devait suivre ces règles au risque de se voir sanctionner sévèrement.

Ivan ricana, un son dépourvu de toute chaleur humaine.

— C'est facile pour vous de dire ça ! Vous n'avez jamais ressenti ma douleur ! Vous n'avez jamais perdu un être qui représentait tout pour vous !

Acacio repensa à sa mère, morte en mission alors qu'il n'avait que 2 ans. Il ne se souvenait pas vraiment d'elle, mais elle lui avait toujours manqué. Il aurait voulu connaître cette femme forte qui avait choisi de donner sa vie pour protéger la paix. Les histoires qu'on lui avait racontées semblaient des fragments d'un rêve lointain. Elle était décrite comme une sorcière émérite, capable de maîtriser des sorts complexes pour défendre ceux qui ne pouvaient pas se défendre eux-mêmes.

Le souvenir d'elle était comme une étreinte chaleureuse dans les moments difficiles. Sa perte précoce avait laissé un vide, une absence qui persistait à travers les années. Acacio s'imaginait souvent les conversations qu'ils auraient eues, les leçons qu'elle lui aurait enseignées sur la magie et la vie.

Le regard d'Acacio se durcit alors qu'il repensait à Ivan, perdant sa propre famille dans cette guerre qui  fait des millions de victimes sur tout le continent. Il pouvait comprendre la douleur de la perte, mais il avait toujours refusé de laisser cette douleur se transformer en une rage destructrice avec le temps.

Shain, bien conscient des tensions qui montaient, s'interposa avec calme, cherchant une solution « pacifique » dans cette confrontation avec Ivan qui semblait inévitable. Elle devenait un écho des tragédies passées et des choix qui se présentaient maintenant.

— Ivan, vous n'êtes pas le seul à avoir vécu des moments difficiles pendant la guerre. Mais attaquer des innocents qui n'étaient même pas nés au moment des faits et torturer un ancien général après plus de vingt ans ne résoudra pas vos douleurs passées. Nous ne sommes pas responsables des actions de l'armée à l'époque de la Guerre des Cendres.

Acacio, bien qu'inquiet pour son père, ne montra aucune faiblesse. Il se tint aux côtés de Shain, prêt à les défendre tous les trois si nécessaire.