ROUGE VELOURS ✧ JIKOOK (TOME 1)

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J'écoutais Jungkook raconter l'une de ses fabuleuses aventures d'enfance dans les terres isolées d'Australie, tout en dégustant sagement ma soupe de poulet au ginseng. Il n'arrêtait pas de parler, comme s'il avait décidé d'avaler une cassette avant de venir me voir.

Lorsque Jungkook avait garé sa Capri sur le parking du restaurant, j'avais cessé de respirer. De mauvais souvenirs avaient refait surface, mais il les avait chassés en ouvrant la portière pour me tirer de là. En deux temps trois mouvements, il s'était engouffré dans l'auberge rénovée. Trop décontenancé, je n'avais pas tout de suite remarqué que notre serveur s'était adressé à nous en coréen. J'avais lu le menu et m'étais enfin rendu compte que Jungkook m'avait emmené dans un restaurant asiatique qui concoctait plusieurs plats typiques du continent. Les plats coréens étaient écrits en anglais et dans ma langue. Une photo accompagnait leur nom, et je n'avais même pas eu besoin de les lire pour commander mon repas.

Jungkook était soulagé. Quant à moi, je n'en étais pas moins touché par son attention.

Avait-il voulu se rattraper ? La première fois, il était évident qu'il n'aurait jamais pensé que je réagirais de cette manière. Moi-même, je m'étais demandé pourquoi avais-je tant stressé. Peut-être avais-je eu peur de le décevoir.

Je ne voulais plus y penser de toute manière.

Notre serveur revint nous voir pour nous déposer un immense bol de nouilles au sarrasin. Je le remerciai, excité à l'idée d'y goûter, et il ne put s'empêcher de commenter la tenue du couple de la table voisine. Jungkook et moi-même étions réceptifs à ses blagues malicieuses, bien que méchantes. En même temps, le couple avait un comportement exécrable à l'égard du serveur qui se pliait en quatre pour noter tout ce que l'homme commandait et tout ce que la femme renvoyait en cuisine. Ils devaient être riches et bien payer, ce devait être la seule raison qui les protégeait d'une exclusion.

Je ne me plaignais pas le moins du monde de mon repas, il était sacrément bon. Jungkook était du même avis. Il n'arrêtait pas de détailler la composition moléculaire des sauces qu'il choisissait pour assaisonner ses côtes de porc. J'ignorais s'il énonçait des termes scientifiques par hasard ou s'il avait totalement raison.

Ma curiosité finit par l'emporter :

« Tu veux devenir chimiste plus tard ? »

Il aspirait une énorme bouchée de nouilles et mit un certain temps à l'avaler.

« Non, je préfère la biologie, répondit-il.

- Quelle horreur. »

Il éclata de rire.

« Ce n'est pas si effrayant que ça ! Il y a beaucoup de travail, mais j'aime beaucoup ce que j'apprends.

- Tu veux être médecin ?

- Non merci, ça ira.

- Dommage, tu aurais pu me faire un prix.

- Si je travaille dans un labo, je ferai passer tes analyses en priorité. » promit-il.

Jungkook m'expliqua qu'il suivait ce cursus à l'université depuis deux ans et qu'il allait entamer sa troisième année. Il avait beaucoup hésité. Il ne savait pas quoi faire de sa vie, puis avait découvert ce monde, qui paraissait si indéchiffrable à mes yeux. Je ne sais pas s'il s'agissait d'un rêve, peut-être que la musique surpassait cet engouement autour de la science. Il était passionné, néanmoins. J'étais heureux d'apprendre qu'il ne s'ennuyait pas, ses compétences ne seraient que décuplées s'il aimait ce qu'il faisait.

Jungkook monologuait sur un tas de sujet dont je ne saisissais pas le sens, butant sur la moitié des mots car il ne connaissait pas leur traduction en coréen. Alors je faisais un effort pour le suivre. J'étais certain que le sujet était intéressant, mais il me demeurait inaccessible malgré mes quelques connaissances acquises en la matière, grâce au collège et au lycée.