J'empruntais encore une robe à Claire: la violette en soie. Celle-ci était d'un autre style que la verte, mais je l'aimais bien. Ma cousine me coiffait et me maquillait. Je me laissais faire entre ses mains expertes. Comme les autres fois, je ne regrettais pas. Claire avait un don pour ces choses féminines. J'avais menti à ma famille, leur disant que j'allais à une soirée de criquet avec les Lockwood. Évidemment, mes parents avaient acquiescé, mais mon frère demeurait suspicieux. Je devais faire taire ce mensonge afin qu'il ne découvre rien. Bart est très insistant et intelligent, il va mener sa petite enquête jusqu'à trouver ce qu'il cherche.
•••
La pièce où le bal se déroulait était tout simplement somptueuse. Mon regard se perdait dans ce décor luxueux. Je cherchais du regard Alaric, mais il n'était nulle part.
-Il doit être dans la salle de jeu, me murmura Claire.
-Claire, c'est le temps de faire bonne impression, mon enfant, ordonna d'une voix absente Mme Lockwood.Elle avait déjà une flûte de champagne dans la main. Cela me pinçait le coeur de voir la soeur de mon père ainsi. Elle était si radieuse avant son mariage, disait mon père. Claire retenait de sa mère. Je m'éloignais de Mme Lockwood avec Claire. Elle ne semblait même pas se soucier de notre départ peu subtile.
-Le vois-tu ? Je dois lui parler.
-Oui, répondit ma cousine.
-Où donc ? m'acharnai-je.
-Ici, dit une voix masculine derrière nous.Tétanisée, je me tournai vers lui. Alaric Quinn se tenait fièrement devant nous. Son regard brillait d'un certain amusement. Il portait un second habit noir avec, pour seule couleur, une cravate blanche. Ses cheveux sombres étaient bien placés, pas une seule mèche rebelle. Comme à chaque fois que mon regard se posa sur lui, mon coeur défaillit.
-Lady Lockwood. Lady Arabella Lockwood.
Il nous salua d'un signe de tête poli. Nous fîmes de même.
-J'ai cru comprendre que l'on me cherchait, reprit-il en posant ses yeux d'un gris profond sur moi.
-C'est exact, dis-je. J'aimerais vous parler en privé si cela ne vous dérange pas.Il me détaillait. Mes joues s'empourprèrent. Mais pourquoi, diable, je réagis autant ?!
-J'en serais honoré. Avant cette discussion palpitante, j'apprécierais une danse avec vous.
Il me présenta sa main. Je jetai un regard à ma cousine, mais elle m'encouragea à y aller. De plus, il aurait été impoli de ma part de refuser la demande d'un duc. Je reportai mon attention au duc et pris sa main. Ses doigts resserrèrent leur étreinte. Une douce chaleur envahit ma cage thoracique. Il me guida jusqu'à la piste où une valse commença. Allez, je suis capable. Claire et moi dansions la valse tous les jours lors de notre adolescence. Les souvenirs me revinrent. C'est simple. Sa large main se plaqua contre le creux de mon dos. De l'autre, il prit mes doigts dans sa paume chaude. Je plaçai nerveusement ma main droite sur son épaule. Au son de la musique, nos corps bougèrent en harmonie. Il était un danseur aguerri. Je m'étonnais de ne pas lui écraser les orteils.
-Vous m'avez l'air plus vieux. Pourrais-je savoir votre âge ?
Ma question le fit sourire. Apparemment, à chaque fois que je me voulais impolie et indiscrète, cela l'amusait fortement. Je commençais à comprendre que je devais m'y prendre d'une autre façon pour qu'il me repousse.
-J'ai vingt-trois ans. Merci de votre intérêt.
-Pourquoi êtes-vous si acharné à mon sujet ? Vous pouvez avoir n'importe quelle autre fille de bonne famille.
-Ne vous est-il jamais venu à l'esprit que c'est vous que je désire ? répondit-il en haussant un sourcil.
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Le Mensonge d'Arabella
Storie d'amoreFrance, 1805 Ce n'était censé qu'être un petit mensonge. Me faire passer pour une fille de bonne famille lors d'une soirée mondaine afin de tenir compagnie à ma cousine était son idée. Et j'ai accepté. Cependant, lorsque je rencontre le duc de Harco...