Chapitre 9

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UNE LUEUR D'ESPOIR

Un vent fort soufflait sur la petite cour ce matin-là, s'immisçant en un chuintement entêtant dans les multiples brèches de la structure fragile de l'édifice

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Un vent fort soufflait sur la petite cour ce matin-là, s'immisçant en un chuintement entêtant dans les multiples brèches de la structure fragile de l'édifice. Par moment, c'était presque comme si une voix lointaine et mélancolique résonnait autour de moi, semblant venir de partout et nulle part à la fois, me donnant l'étrange impression que le Mausolée lui-même fredonnait une mélodie portée par le vent. Autour de moi, les fines branches des arbres s'agitaient rageusement face à la violence des rafales, laissant s'échapper un tourbillon de feuilles écarlates qui tantôt s'élevaient pour virevolter autour de moi, tantôt retombaient sur le sol, se mouvant en vagues rouges sur les dalles. Mais il en aurait fallu plus pour me décourager. Agenouillée sur le sol, emmitouflée dans une large toge blanche gracieusement prêtée par Naé pour me protéger du froid, je fixais du regard les deux fragments posés devant moi, pleine d'espoir.

Les yeux clos, je tâchai de faire le vide dans mon esprit, me détachant le plus possible de l'environnement bruyant qui m'entourait, jusqu'à éteindre un à un tous les sens qui me maintenaient en contact avec la réalité. Tandis que la sensation du sol rugueux sous mes genoux se faisait de plus en plus abstraite, le hurlement du vent et l'odeur enivrante de la forêt s'estompèrent à leur tour pour ne plus laisser place qu'à un profond néant, insondable, et étrangement apaisant. Je ne percevais plus autour de moi que l'énergie omniprésente émanant des deux pierres posées au sol, tourbillonnant autour de moi à la recherche des parcelles manquantes de son âme, disséminées aux quatre coins du monde.

Ainsi plongée dans l'obscurité la plus complète, le frottement des feuilles sur le sol se trouva rapidement remplacé par le roulement des vagues sur le sable et le fracas de l'écume se brisant contre les rochers. Un vent de fraîcheur me caressa alors les joues, et peu à peu, par-dessus la pénombre, se dessinèrent les contours flous et tremblants d'une étendue maritime qui se déployait infiniment sous mes yeux, sans que nulle terre ne vînt rompre son unicité. Un fort vent marin soufflait, faisant onduler la surface de l'eau dans laquelle ne miroitait que le reflet d'un ciel uniformément bleu.

Je survolais cet océan, à l'horizon ininterrompu et aux profondeurs angoissantes, m'emmenant toujours plus loin dans ce monde inconnu pour moi, lorsqu'une image abstraite prit progressivement forme sous mes yeux. D'abord de simples taches de couleur sans la moindre cohérence, elles se firent de plus en plus nombreuses, de plus en plus précises, et se mirent à confluer jusqu'à dessiner les contours abrupts et rugueux de ce qui m'apparut comme une immense statue de pierre, perchée au sommet d'une portion de falaise escarpée, surplombant majestueusement la mer comme un géant inanimé veillant imperturbablement sur ses terres. Sa silhouette, à la surface noircie par la saleté accumulée et émoussée par le temps et les intempéries, était enveloppée d'un drapé de végétation frissonnant dans la fraîcheur du vent. Il se dégageait de sa posture, de ses bras ouverts sur le monde, de son visage aux traits indéfinissables, une aura de sérénité et de toute-puissance, une impression que rien ni personne ne pourrait s'élever contre lui et mener à la ruine le monde qu'il embrassait de son ombre protectrice.

LYCHÉRIA Tome 2 - Le Mausolée du LoupOù les histoires vivent. Découvrez maintenant