Chapitre 10 (partie 2)

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Mes mains rangent automatiquement les dossiers que j'ai étudié presque tout l'après-midi pour éviter d'allumer mon téléphone et regarder les messages qu'une certaine personne m'a envoyé. C'est juste nerveux. Quand je suis arrivée au commissariat, j'ai adressé un sourire d'excuse à mes collègues en leur demandant gentiment – enfin, je crois – de ne pas me déranger de tout le reste de la journée. J'avais besoin de me concentrer sur mon travail plutôt que de ressasser ce qui venait de se passait. Car si je faisais ça, j'allais penser à Alexander, j'allais repenser à son corps, son allure, j'allais donc mettre mes nerfs, et mes hormones, à rude épreuve. J'ai donc ressortie tous les dossiers d'affaires non-classées sur lesquelles j'étais avant pour vérifier que je n'étais pas passée à côté de quoi que ce soit. Une m'a rappelée celle de maintenant... Nous n'avons jamais trouvé le coupable et nous n'avions pas beaucoup de suspects et témoins. Le suspect principal était une femme, la sœur de la victime, et comme elle n'a jamais contré nos accusations, nous l'avons arrêtée et cela fait bientôt trois ans qu'elle est dans une cellule. Elle a tenté plus d'une fois de se suicider, de la corde au cou jusqu'à se taillader les veines. Dieu merci, elle a toujours survécu, mais ce n'est pas l'envie qui lui manque d'en finir. J'aimerais la comprendre... je n'y arrive pas. Si elle n'était pas ladite meurtrière, pourquoi ne pas se payer un avocat et faire tout ce qui est dans son possible pour se faire acquitter ? Et à l'inverse, pourquoi mourir si elle est coupable ? Je n'ai jamais compris les assassins qui finissaient par se suicider. Ils tuent de leur plein gré une personne et quand on les arrête, ils pleurent – pour la plupart – et meurent. Autant remettre la peine de mort... Même si soyons honnêtes, une mort contre une mort n'est franchement pas logique. Mais soit...

Et là, ce qui me chagrine, c'est que dans les trois dossiers que j'ai relu, je n'ai rien trouvé. Comme aujourd'hui. Parfois, je me demande si je suis faite pour ce métier. En sept ans de boulot, j'ai échoué un quart de mes affaires. Vous pensez penser que c'est un petit chiffre, mais pas pour moi. C'est énorme ! Et chaque échec, au lieu de me pousser à faire mieux, me démoralise. Je n'y peux rien, j'ai toujours été comme ça. Toujours voir le verre à moitié vide alors que la plupart des gens autour de moi le voient à moitié plein. C'est bizarre pour quelqu'un qui vise toujours la perfection...

Je soupire en balançant le petit tas de chemises en carton dans mon tiroir. Je croise mes jambes, pousse mon postérieur au fond de mon fauteuil et recule un peu. Un crayon à papier dans une main, j'observe mon bureau comme un laser. La peinture blanche du plafond a jaunie à certains endroits à cause de la fumée de nicotine d'Emyl quand il vient me rendre visite. Je lui ai plusieurs fois interdit de fumer au sein du commissariat, d'une part car Matthew ne serait pas content et d'autre part car ses cigarettes me donnent toujours la nausée. Je ne sais pas quel produit il met dedans, mais ce n'est certainement pas du tabac.

Le petit coin au fond de la pièce où reposent deux canapés autour d'une table basse était utilisé, autrefois, pour mes longues soirées ou bien pour prendre le thé avec des visiteurs que je connaissais bien. Aujourd'hui, il sert juste pour la déco, il est très rare que je m'allonge sur l'un des sofa comme je le faisais avant. Bizarrement, mon cerveau préfère s'endormir à même le bureau, pliée en deux sur mon fauteuil. J'ai toujours quelques courbatures après ça, mais rien de bien dérangeant. Je devrais peut-être demander à Matthew de rénover cette pièce, je ne la trouve plus à mon goût.

Les deux grandes fenêtres qui sont censées faire entrer la lumière dans la pièce sont cachées par de grands rideaux couleur prune – que j'ai moi-même glissés pour être tranquille. Dans tous les cas, je suis obligée d'allumer les lampes car, aujourd'hui, il ne fait vraiment pas beau. Les nuages sont gris, presque noirs, signe qu'il va sûrement pleuvoir et peut-être y avoir des orages. L'automne est ma saison préférée. Les feuilles mortes qui recouvrent les trottoirs, les nuances d'orange et de rose dans le ciel le soir, les mille et une étoiles que l'on peut apercevoir la nuit quand le ciel est totalement dégagé... tout ça m'éblouis. Ça m'inspire parfois, ça m'apaise d'autre fois. Ça me rappelle surtout que c'était un soir d'automne que Matthew m'a demandé en mariage. Quand j'y repense, ça n'avait rien de romantique. Nous étions tous assis près de la cheminée chez ses parents quand il a posé un genou au sol. Devant-toute-sa-fa-mille. Je sais qu'il a toujours aimé faire les choses en grand, mais j'aurai préféré qu'il le fasse seulement lorsque nous étions seuls. En plus, ce soir-même, je me suis disputée pour la énième fois avec sa mère. C'était la plus réticente dans sa famille, elle croyait que j'en voulais seulement à son héritage et blablabla... Je ne suis jamais sortie avec Matthew car il était riche, certes son argent m'a beaucoup aidé, mais ça n'a jamais été grâce à ça que je l'ai épousé. Mais après ça, Warren a mi le ola, pour m'a plus grande surprise, et finalement, tout le monde nous a félicité.

Destroy Me : Ton honnêteté contre mon âme (En Pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant