❥ Jour 5: Proposition

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La porte était là, obstacle infranchissable, imposant toute sa présence au couloir désert dans lequel elle régnait. Il arrivait au bois qui la composait, usé d'avoir reçu trop de coups sur sa dure surface, de grincer et de gémir dans le silence qu'offrait les lieux, la nuit. Et nombre de soldats passaient devant celle-ci, sans se douter que cette porte avait été témoin de bien de scènes au sein du bataillon d'exploration. Supplications, menaces, drames... rien ne lui avait échappé. Et, pourtant, la silhouette qui s'en approcha à grandes enjambées, comme si elle voulait annoncer sa présence au monde entier, ne s'émut guère de tous les souvenirs contenus en ce banal morceau de bois.

Non, elle enfonça plutôt son poing, violemment, à trois reprises, dans la surface de cette porte. Boom. Boom. Boom. Car oui, elle avait besoin de discuter avec le caporal-chef. Et celui-ci se trouvait précisément de l'autre côté.

...

Silence. Gémissement du bois qu'on martyrisait. Nouveau silence. Hansi Zoe ne savait comment interpréter le calme qui régnait dans le couloir depuis que son poing avait rencontré la dure surface de la porte du bureau du soldat le plus fort de l'humanité. Était-ce une de ses nouvelles méthodes pour lui faire comprendre qu'il trouvait sa présence exaspérante et ne voulait point être dérangé ? Le mutisme ? En y réfléchissant, cela faisait très Rivaille Ackerman, comme technique. Sauf qu'il ne devait alors guère connaître l'obstination, la ténacité et l'acharnement qui faisait d'Hansi Zoe l'incarnation même de l'insistance. Voilà quatre jours qu'elle refusait de lâcher le morceau. Ce n'était pas une vulgaire porte fermée qui allait l'impressionner.

Le poing levé, la lunettée réessaya. Avec plus de conviction, cette fois. Boom. Boom. Boom.

Aucune réponse. Énervée, Hansi envoya valser son pied dans le pauvre morceau de bois qui n'avait rien demandé. Vlam.

Sauf qu'aucun son ne venait témoigner de la colère d'Hansi. Nouvelle tentative de la binoclarde. Accompagnée, cette fois, d'un cri de guerre assez fort pour déranger tout le bâtiment. Ahhhhh. Boom. Boom. Boom. Vlam.

Toujours ce silence exaspérant. Laissant exploser sa rage, sa déception, sa douleur, Hansi, oubliant toute dignité, tambourina sans relâche sur cette porte qui la narguait dans toute sa hauteur. Elle enfonçait ses poings meurtris dans le bois. Elle écorchait sa peau sur les retailles de la planche. Elle laissait des traces de semelles bien fraîches sur le pas de la porte. Elle devait parler à Rivaille. Peu importait les expériences, sa paperasse, et toute cette histoire sans queue ni tête. Même la discussion qu'elle avait surprise entre Erwin et lui à son sujet avait perdu tout son intérêt. Des rumeurs couraient. Et elle devait s'assurer que celles-ci étaient fausses. Oui, c'était d'une importance capitale.

Hansi (criant de toutes ses forces, continuant à frapper): Rivaille Ackerman ! Si tu n'ouvres pas tout de suite cette porte, je n'aurai aucune difficulté à la défoncer ! Et ne compte pas sur moi pour ramasser les éclats de bois après ça ! Alors, tu m'entends, ouvre la porte ! RIVAILLE ! J'ai absolument besoin de te parler, ce n'est pas une blague ! Tu m'entends ?! OUVRE LA PORTE ! SINON JE VAIS—
???: Tch.

Hansi fit volte-face, sursautant à moitié. Une silhouette était là, patientant dans son dos depuis peut-être déjà plusieurs minutes. Derrière ses lunettes, elle la détailla de haut en bas, comprenant son erreur. Des cheveux noirs cachant un regard blasé et inexpressif. Une bouche crispée. Et une taille singulièrement petite. Le caporal n'était pas dans son bureau. Il ne l'avait jamais été. Non, car il se trouvait là, derrière elle, clé à la main, une léger soupçon d'agacement dans le regard. Ce fut alors que Hansi comprit qu'elle lui barrait le chemin, et fit un pas de côté, embarrassée.

« Non. » [𝐀 𝐋𝐞𝐯𝐢𝐡𝐚𝐧 𝐒𝐭𝐨𝐫𝐲]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant