𝙲𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 35

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Lukas : 

 Une cigarette à la main, un verre dans l'autre. Un gobelet de café, le quatrième de l'après midi. Le café qui a soudainement remplacé l'alcool. Mais j'ai toujours cette fâcheuse addiction à la cigarette, ce petit boudin de tabac et de composants chimiques qui me crame les poumons... Je regarde ce paquet de Winston. "Fumer Tue"... Tu m'étonnes ouais... 
La drogue pour moi, c'était mal. Lorsque j'ai commencé à fréquenter des gens pas très potables, je ne savais même pas ce qu'était un joint, je ne savais pas ce pouvait faire une cigarette, je ne savais pas que l'alcool avait cet effet... 

Combien de fois me suis-je retrouvé à 2 heures du matin, perdu, retrouvé seul à une table de je ne sais quel endroit paumé, là, à rêver de mon ancienne vie lorsque la famille était au complet, lorsque je me demandais encore si j'avais une valeur, complètement déconnecté, hors ligne, glissant quelque part loin du monde en essayant de mettre le point sur l'endroit où je me trouvais. dans l'oubli, tapis dans l'ombre d'un endroit que je redoutais, d'un endroit que j'ai souvent qualifié d'échappatoire temporaire, une trêve dans le temps, une trêve dans ma vie, une trêve de ce que j'étais devenu. 

Un buveur insolite, fourbe, trompeur, assez con pour tourner le dos à mon propre père qui avait besoin de moi, assez rancunier pour ne pas pardonner à celle qui m'a donné la vie, assez brutal et infecte pour blesser la fille qui m'a apporté tant d'aide rien qu'en me regardant. 

J'ai souvent imaginé, un verre de scotch à la main, être comme dans les films, que je voyais souvent. Être comme Clint Eastwood, fumant une cigarette, ou encore Sylvester Stallone... Ironie du sort... On a le même nom de famille... 
J'imaginais que, comme dans les films, j'allais me sentir bien après un verre, deux verres, trois... Et que mes complications allaient vite s'évaporer, comme ça...

Mais non... L'alcool n'est pas la réponse, il fait seulement oublier la question... 

2 heures du matin, une heure qui me hantera toujours, une heure insupportable, destinée aux alcooliques, buvant sans cesse dans l'espoir d'oublier une personne qui a pris le large, une heure destinée aux poètes et écrivains écœurés, aux sentiments anesthésiés, écrivant en étouffant leurs larmes et leurs peines, aux personnes seules sur un toit, songeant à l'impossible, à l'interdit... Aux personnes déchues, souffrant du rejet de la société en vu de leur aspect ou de leur erreurs. Car oui, tout le monde notice nos erreurs, mais jamais nos peines, nos larmes ou nos souffrances.  

Pendant que je sombre une nouvelle fois, pendant que je me remets en question, pendant que je regarde l'horizon, fumant cette cigarette qui, je laisse me fumer comme le plus gros des imbéciles, Lindsay a fini sa journée, elle roupille tranquillement dans sa chambre, elle est sortie, elle vit sa vie, elle a "rendez vous" avec quelqu'un, elle se fout de ma gueule et y prend plaisir, elle sait parfaitement que je n'aime pas ça, que je hais ça. 

Je n'en reviens pas de parler comme un poète alcoolique qui vient de perdre quelqu'un, les rebondissements de ma vie me font perdre la boule... 
J'ai refusé d'aller voir mon frère en taule, je refuse toujours autant de le voir. Peut-être que infime partie de moi-même me supplie de jeter l'éponge. Une autre, plus grande, me dicte d'oublier son existence. 
Comment oublier l'existence d'un frère ? 

Le soleil s'est couché, il y a de cela quelques heures, j'ai entendu Lindsay rentrer. Ses petits pas dans le couloir, elle avait l'air contente. Contente... 
Elle est directement allée dans sa chambre, je l'ai entendue s'emmitoufler dans sa couette... J'aurais tant aimé être là pour lui lancer un oreiller dans la figure, ou encore pour la serrer dans mes bras et lui dire à quel point je suis désolé pour la deuxième fois cette semaine... 
Je l'ai entendue parler à Brenda en riant... Le rire... Que j'aimerais rire moi aussi...

♡♡♡

— Lukas ? Cria la voix de Franck. Viens-là mon garçon j'ai quelque chose à te montrer. 

A mesure où il prononce sa phrase, je sens la voix se rapprocher. Malgré que la porte de la chambre soit entrouverte, il toque. Je me penche du balcon :

— C'est ouvert. 

J'entends le grincement de la porte, il la referme derrière lui et pénètre dans le balcon par la baie vitrée :

— Est-ce que... Tout va bien ? Dit-il en posant une main sur mon épaule. Cela va bientôt faire 3 heures que tu es là... 

— Ouais t'inquiètes pas, tout va bien. 

Il s'appuie contre le bas mur en bois en regardant le ciel dégradé bleuâtre :

— Je sais que ça va mal et que vous êtes en froid, toi et Lindsay... Ecoute je comprends tout à fait tes réactions et quelque part, je te comprends, vraiment. Dit-il comme s'il essayait d'enterrer des souvenirs. 

— C'est-à-dire ? 

— J'ai moi aussi vécu à peu près les mêmes péripéties quand j'étais jeune, je suis passé par-là mais ça ne m'a pas empêché de changer et de faire ce qui me semblait bon. 

— Je n'ai pas envie de changer ce que je suis. Lançai-je sèchement. 

— C'est ce que tu penses, Lukas. Dit-il en se retournant vers moi pour ensuite se redresser. Bon descends, je t'attends dehors, j'ai un petit cadeau pour toi.

Il s'en va sans dire un mot de plus. Je me relève donc et pose mon gobelet sur la table basse. Je referme la porte de la baie vitrée et referme les rideaux blancs avant de sortir de la pénombre, je descends les marches éclairées et arrive à l'enceinte de la villa, je traverse ensuite le salon pour me retrouver devant la porte que je pousse pour sortir, vu qu'elle n'était qu'entrouverte. 

En descendant les quatre marches de marbre, je vois Franck devant une Porsche noire, Porsche que je n'ai jamais vue auparavant dans la maison... Lindsay a une Maserati, L'autre aussi... Valentýna, elle, a une Mini Cooper, et Franck a une Mercedes et une Jaguar, de Luxe bien sûr... J'en déduis qu'il a rajouté une voiture à sa collection de bagnoles à prix exorbitants. 

— Wow. Dis-je en suivi d'un sifflement. Magnifique bagnole, félicitations Franck. Dis-je impressionné. 

— Pourquoi me félicite-tu ? 

— Bah pour ta nouvelle voiture. dis-je bêtement. 

— Elle n'est pas pour moi Lukas, je l'ai achetée pour toi. 

Les mots qu'il vient de dire me renversent littéralement :

— Tu peux répéter ? 

— Comme ça, plus de problèmes pour aller au lycée, tu es autonome et responsable, tu payeras toi-même l'essence et l'entretien. Dit-il joyeusement. 

— J'peux pas accepter... Nan sérieux... Et puis Jay passe souv... 

— Je ne veux rien entendre jeune homme, c'est un cadeau, ne refuse pas... S'il te plaît, ça me fait plaisir. 

Il me tend les clés de la luxueuse voiture, qui sont attachées à l'aide d'un ruban décoratif comme pour les cadeaux qu'on offre. 

— Je crois que tu as ton permis... N'est-ce pas ? Dit-il alors que j'admirais mon reflet sur le capot parfait. 

— Ouais je l'ai passé y'a un an. 

— C'est parfait, je te laisse te familiariser avec la bête. Dit-il en soulignant sa phrase d'un rire, qui est effectivement contagieux. 

— Au fait... Dis-je alors qu'il s'apprêtait à partir. Merci de penser à moi, de cette façon... 

Il m'offre son plus beau sourire et un clin d'œil avant de partir dans la maison, j'ouvre la portière de la voiture pour m'y installer. 

Je n'aurais jamais cru avoir une voiture un jour, encore moins une Porsche... 

à suivre...

𝟓 𝐌𝐈𝐍𝐔𝐓𝐄𝐒 𝐀𝐖𝐀𝐘© [𝚃𝙴𝚁𝙼𝙸𝙽𝙴]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant