Paralysie

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Hannah se préparait. Aujourd'hui, elle prenait son poste dans les forces spéciales. Elle n'avait même pas pu parler à Erwin de cet inconnu qui la tracassait.
Erwin l'avait pitché sur sa réelle mission. Obtenir des informations, et surtout concernant le mur et la famille royale. Elle devait tirer profit de tout ce qu'elle pouvait apprendre; documents secrets, conversations entre hauts gradés, rumeurs, etc... Erwin voulait un rapport complet toutes les semaines, puisqu'elle avait un jour de libre hebdomadaire.
Erwin avait voulu infiltrer quelqu'un d'autre dans le bâtiment des forces spéciales, mais il n'avait pas réussi.

« Tu seras toute seule, cette fois. Alors ne tente rien de stupide. »

Elle ferma son sac, et se dirigea vers le bureau d'Erwin. C'est lui qui devait l'emmener au QG des forces spéciales, puisqu'il connaissait l'endroit. Il avait lui aussi un rendez vous là bas.

En arrivant dans le couloir de son bureau, Hannah entendit des voix. Ça se disputait. Elle s'approcha doucement, pour savoir ce qu'il se passait, et resta paralysée par le son de sa voix.

« Comment tu peux l'envoyer là bas, sans aucun support, aucun soutien ? Si il lui arrive quelque chose, si tout ça est un stratagème pour t'atteindre toi, si ils lui font du mal, si ils essaient de lui soutirer des informations sur ce que tu fais ici ?! »

C'était Livaï. Hannah ressentit une vague de soulagement l'envahir. Elle ne l'avait pas vu depuis longtemps, et elle commençait à sérieusement s'inquiéter. Elle se sentait rassurée de savoir qu'il allait bien.
Mais ce sentiment s'envola presque aussitôt, laissant place à l'amertume qu'elle avait toujours quand elle pensait à lui. Ce poids qui l'enchaînait, comme une malediction, destinée à aimer un homme qu'elle ne pouvait que détester, elle ne voyait plus que ça quand elle pensait à lui. Elle ne voyait plus que les pleurs ; les cris, la stupeur qui l'avait prise à la gorge ce jour là.
Elle soupira. Elle était fatiguée de le détester, mais elle ne pouvait se résoudre à en faire autrement. Elle poussa la porte.

« Ce n'est pas ton problème, dit elle en le foudroyant du regard.
- Elle n'est pas prête pour ce genre de mission, dit Livaï à Erwin, choisissant d'ignorer complètement Hanna.
- Livaï, stop, cria t-elle. Tu n'es pas mon responsable, alors arrête. Erwin me fais confiance. Et ce n'est pas à vous de discuter ce genre de choses, caporal. Maintenant, si vous voulez bien nous excuser, nous sommes attendus. Major, je vous suis. »

Livaï regarde Hannah fixement, d'un regard noir comme le charbon, et sorti de la pièce sans un mot. Hannah aurait voulu lui parler de la « fameuse soirée », mais elle ne voulait pas aborder le sujet comme ça. Il fallait qu'elle ait une vraie discussion avec lui, tôt ou tard, pour lui expliquer qu'elle était désolée de son comportement déplacé, et que ça ne se reproduirait plus, et qu'il valait mieux pour eux deux qu'à l'avenir ils s'en tiennent à des relations purement professionnelles. Elle avait répété tout ça dans sa tête, plusieurs fois. Elle n'attendait que le bon moment pour les sortirs, toutes ces paroles sages.


Erwin et Hannah venaient d'arriver dans les quartiers des forces spéciales. Un jeune soldat vint les accueillir.

« Bonjour, Major, mademoiselle. Vous êtes attendus. Major, vous connaissez la route, et vous mademoiselle je vais vous demander de me suivre. »

Hannah lança un dernier regard inquiet à son mentor, qui la rassura en lui faisant un petit sourire en coin. Elle suivit le jeune soldat dans de longs couloirs, tous joliment habillés. Les forces spéciales étaient bien les petit chouchou du gouvernent, on pouvait le remarquer rien qu'à la richesse des apparats de leur QG.
Le jeune soldat s'arrêta devant une porte sur laquelle était gravé un petit triangle, suivi de deux lettres « S.V ». Il toqua, et ouvrit la porte aussitôt.
Hannah ouvrit la bouche, mais aucun son ne sortit. C'était lui, le commandant qu'elle devait assister ?
Il leva la tête, et se mit à sourire.
« Et bien, entrez, mademoiselle. Vous vous prénommez Hannah n'est ce pas ?
- O-oui m-monsieur, bégaya t-elle en entrant.
- Appelez moi Stefan. Commandant Stefan. Vous pouvez nous laisser, Caelan.
- Bien sûr, commandant, répondit le soldat avant de sortir en fermant la porte. »

Hannah était assise devant son bureau. Il l'a regardait, l'air amusé. Elle essayait de cacher au maximum sa stupeur, mais son regard inquiet n'échappait pas à ce Stefan. Il se leva, fit le tour du bureau, et s'assit sur celui ci, à quelques centimètres d'Hannah.

« Vous avez l'air effrayée, Hannah. Je vous effraie ? Dit il en allumant une cigarette.
- Non, mon commandant. Je vais parfaitement bien.
- Bien. Vous avez un joli visage. Ne l'enlaidissez pas avec ces sourcils froncés.
- Bien, mon commandant.
- Vous avez été l'assistante du major Erwin il me semble, n'est ce pas ?
- Oui, mon commandant.
- Pourriez vous me détailler à quoi consistait cette assistance.
- Je m'occupais de la paperasse administrative, des recherches, du recrutement, de l'élaboration des missions, de planifier des réunions, de la logistique. Tout ce qui pouvait alléger la charge de travail du major, mon commandant.
- Bien, bien. Sachez qu'ici les choses vont fonctionner autrement, Hannah. Vous avez l'air tout à fait compétente, et c'est ce pourquoi je vais être exigeant avec vous. Votre bureau sera accessible depuis cette porte, dit il en désignant la porte jusque à la droite de son bureau. Bien sûr vous commencerez par beaucoup de paperasse. Et nous aviserons.
- Bien, mon commandant. Je m'y met de suite. »

Il sourit. Elle ne savait pas trop pourquoi, mais cela la mettait un peu mal à l'aise. Cet étrange sentiment qu'elle avait eu au bal, celui de se sentir en sécurité et à sa place, avait disparu. Maintenant elle ne ressentait que de la peur. Son regard était très froid, malgré le fait qu'il souriait constamment. Cela expliquait peut être pourquoi ce sourire était si dérangeant.
Elle s'apprêtait à se lever pour se diriger vers son bureau, quand il s'approcha subitement d'elle, se retrouvant à quelques centimètre de son visage.

« Une dernière chose. Je sais que vous vouez une loyauté aveugle pour le major. Il vous a beaucoup aidé n'est ce pas ? »

Le sang d'Hannah se glaça. Comment pouvait-il savoir ce genre de choses ?
Elle hocha la tête, trop tétanisée pour parler.

« Cette loyauté, aussi louable soit elle, est une entrave à notre coopération. Je traite parfois des sujets sensibles, ici. Si ils arrivent, par hasard, aux oreilles de votre cher major, cela serait vraiment déplorable. Pour moi, mais surtout pour vous. »

Hannah continua d'hocher la tête, une goutte de sueur froide coulant dans sa nuque.

« Bien. Nous sommes sur la même longueur d'onde. Je vous laisse. Les papiers que vous avez à traiter sont déjà sur votre bureau. »

Il quitta la pièce, laissant Hannah seule. Elle se remit à respirer, s'étouffant presque. Elle sentait que tout ça n'allait pas se finir bien. Mais elle ne pouvait pas faire marche arrière. Et même si elle le pouvait, elle ne ferait pas. Erwin lui avait appris une chose ; une seule, dont elle avait besoin de se souvenir pour arriver au bout de cette mission. « L'humanité ne se sauvera pas sans faire de sacrifice. »
Il l'avait envoyé ici, c'est qu'il savait qu'elle pourrait lui apporter quelque chose. Elle devait lui ramener juste une information, une seule qui fasse la différence. Qu'importe le prix.

LivaixOc HannahOù les histoires vivent. Découvrez maintenant