Chapitre 30 : Par Oliver Trevino

825 166 10
                                    

J'ai réussi !

Après des heures de travail et une grande quantité de sommeil sacrifiée, j'ai enfin tapé le point final. C'était laborieux, mais donnez-moi quelques encas et une playlist de musique d'ambiance Harry Potter, et rien ne peut m'arrêter. Et Flynn m'a été d'une grande aide. Il me rassurait quand je doutais de mon travail, il était là pour me distraire quand j'avais besoin d'une pause, et il a lu et approuvé la version finale. D'après lui, j'ai fait honneur à son compte Instagram et à ses dessins.

Mon article, intitulé Chaque coup de crayon a sa propre histoire, est prêt à être rendu en mains propres. Je me dirige donc vers le club de journalisme après mon dernier cours de la matinée afin de trouver à M. Klein. Il passe presque toutes ses pauses déjeuner là-bas. D'après lui, c'est parce qu'il aime prendre de l'avance sur ses corrections de copies, mais je pense plutôt qu'il n'aime pas côtoyer ses collègues. C'est compréhensible quand on sait que la plupart des autres profs ont le double de son âge.

Lorsque j'arrive dans la pièce, Emily Paxton est déjà là. Elle discute avec M. Klein à son bureau. Enfin, elle l'a pris au piège en faisant un monologue interminable. Le regard de M. Klein est celui de quelqu'un qui a perdu le fil de la conversation et qui cherche une excuse pour y mettre un terme au plus vite. Je décide de m'approcher pour le secourir.

— Désolé d'interrompre, mens-je. Bonjour. Je voudrais vous remettre mon article pour le concours.

— Bonjour, Oliver, répond M. Klein avec une gratitude assez flagrante. Je suis très content que tu participes. J'ai hâte de lire ce que tu as écrit.

Je lui tends l'exemplaire papier de mon article, et il inspecte rapidement le titre. Il hoche légèrement la tête d'un air approbatif. J'espère que c'est bon signe.

— J'annoncerai le nom du gagnant ou de la gagnante dans trois semaines, dit-il. D'ici là, continuez l'excellent travail que vous faites avec le Longdale Observer. J'ai eu beaucoup de retours positifs sur la dernière édition.

L'espace d'un instant, je me dis qu'Emily va tourner de l'œil. Ce doit être le plus beau des compliments pour quelqu'un qui est si investi dans ce journal. C'est presque touchant de la voir dans cet état. Je dis bien "presque", car connaissant Emily, elle ne va pas tarder à redevenir agaçante.

M. Klein nous invite à quitter la salle, prétextant qu'il a plein de photocopies à faire. J'imagine que c'est sa manière d'échapper à la suite du monologue d'Emily. L'espoir fait vivre, mais il n'est pas toujours très utile.

— Je vous enverrai un mail avec les idées dont je vous parlais, dit-elle alors que M. Klein est déjà presque au bout du couloir. Je les diviserai en plusieurs paragraphes pour que ce soit plus clair.

Je m'apprête à m'éclipser pour éviter un silence gênant entre elle et moi, mais Emily m'interpelle.

— C'est bien que tu aies tenté ta chance, dit-elle. Mais si j'étais toi, je resterais réaliste. Il y a très peu de chance que tu gagnes face aux écrivains plus expérimentés de ce lycée qui participent au concours...

— Ça ne fait rien si je ne gagne pas.

Emily fait un pas en arrière comme si je lui avais mis une énorme gifle.

— J'ai écrit ce que j'avais envie d'écrire, précisé-je. Et je suis fier de ce que j'ai rendu parce que j'ai fait de mon mieux. Peu importe le résultat, je n'aurai aucun regret.

— Je... Eh bien, ce n'est vraiment pas l'état d'esprit d'un vainqueur. Je te croyais plus compétitif que cela, Oliver.

— J'essaye de ne plus me faire un sang d'encre pour les choses que je ne peux pas contrôler. Advienne que pourra.

En prononçant ces mots, je me rends compte à quel point je suis sincère. Faire un travail sur soi-même est une tâche colossale, mais je ne reculerai pas devant ce défi. Emily me fixe toujours comme si je parlais dans une langue étrangère. Je ne perds pas de temps à lui expliquer comment les événements récents de ma vie m'ont ouvert les yeux, car ce serait l'équivalent d'un coup d'épée dans l'eau. Je me contente de lui sourire et de tracer ma route.


Ce sourire n'a toujours pas quitté mes lèvres quand je croise Nora, quelques mètres plus loin. Elle récupère une édition brochée de Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur dans son casier. Lorsqu'elle me voit arriver, elle m'observe pendant un moment, les sourcils froncés.

— Pourquoi es-tu d'aussi bonne humeur ? me demande-t-elle.

— Parce que la vie est belle, Nora !

— Beurk. Va vomir tes arcs-en-ciel un peu plus loin, s'il te plait.

Elle ponctue sa phrase avec un petit coup d'épaule, mais elle a commencé à sourire, elle aussi. Nous nous mettons à marcher en direction de la cafétéria pour retrouver Flynn et Danny. Cette perspective ne fait qu'amplifier ma bonne humeur.

Et tant pis si j'ai l'air d'un imbécile heureux.

Oliver et le mythe du Prince CharmantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant