Chapitre 25

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Nathanael regardait la neige tomber, une semaine plus tard, alors que 2019 approchait à grands pas. Les Gilets Jaunes secouaient le pays et lui restait aussi intéressé par ce phénomène que persuadé qu'il ne mènerait nulle part. Comme ceux qui l'avait précédé, Nuits Debout et les autres. Il manquait une personne pour fédérer ces mouvements, une vraie flamme commune à ces colères.

Le réveillon de Nouvel An s'annonçait paisible : Lou venait avec son compagnon, qu'il ne connaissait pas, Clément se joignait à eux, bref soirée entre gens cools en perspective.

Il revint dans le salon. A la télé, un inoffensif documentaire sur les loutres devant lequel Adel sommeillait, installé sur le canapé, emballé dans un plaid. Nathanael vint s'asseoir près de lui. Le soldat avait eu une mauvaise nuit, un peu agitée, réveillant Nathanael en sursaut. Le dessinateur avait bien peiné à l'apaiser, le gardant longuement dans ses bras, caressant son dos jusqu'à ce qu'il se rendorme, ce qui lui avait valu de siester aussi dans l'après-midi pour se retaper un peu lui-même en vue de la soirée.

« Ça va, toi ? »

Adel bâilla, faisant bâiller son mari par ricochet. Nathanael sourit, se resserra un peu contre Adel pour passer son bras autour de ses épaules.

« Toi, tu vas pas tenir jusque minuit, hein... C'est pas grave, dit-il doucement avant d'embrasser sa joue. On essayera de pas faire trop de bruit quand tu seras couché pour pas te déranger... »

Adel ne répondit bien sûr pas, mais il était visiblement plutôt détendu.

S'il demeurait amorphe, le convalescent n'en était pas moins de plus en plus « conscient » pour qui pouvait le voir. S'il réagissait de plus en plus fréquemment aux sons, sursautant aux sonneries de la porte ou des téléphones ou se relaxant à l'écoute de certaines musiques, il lui arrivait aussi de suivre vaguement une silhouette du regard ou même de lever le nez quand certaines odeurs lui parvenaient.

L'équipe médicale trouvait ça très encourageant.

Le documentaire s'acheva sur une belle image de la petite famille de loutres pataugeant dans l'eau et comme ce qui allait suivre était moins sympathique, un documentaire sur les dernières avancées de la police scientifique, Nathanael changea de chaine pour tomber sur un dessin animé qui, lui non plus, ne risquait pas trop de stresser son mari. C'était assez chantant et coloré pour juste les occuper sans heurt.

Clément arriva le premier, vers 18h30, et frappa doucement à la porte, selon les consignes reçues. Nathanael alla l'accueillir et les deux vieux amis s'étreignirent avec chaleur :

« Salut Clem ! Bienvenue !

– Merci, content de te voir, vieux ! Ça va ?

– Ouais, ouais, tranquille, entre vite au chaud ! »

Clément laissa son manteau et son sac dans la chambre d'amis. Il était prévu qu'il dorme là, comme les deux autres, si le besoin s'en faisait sentir, il avait donc prévu quelques affaires. Il avait aussi emmené sa guitare.

Puis, ils allèrent au salon. Clément eut une mimique navrée en voyant Adel, qui, lui, ne semblait pas particulièrement plus stressé de sa présence. Il alla s'accroupir à côté du blessé et tapota son épaule :

« Salut, Adel... Ça fait super plaisir de te voir, on te fera la sérénade tout à l'heure si tu veux... »

Nathanael sourit.

« Bonne idée. Joue-lui un petit air tranquille pendant que je prépare un peu pour tout à l'heure.

– Ah ben pas de problème ! »

Le Petit PapillonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant