⚜ Chapitre 6 - Attendre le noir ⚜

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   La nuit est douce, froide mais douce. Les résidents comme les emprisonnés de Fontainebleau sont bercés par le bruit constant du passage du vent dans les arbres.

Même si certains son mieux installés que d'autres...


La chambre de pierre et de tapisseries en tout genre était plongée dans le calme de la nuit depuis plusieurs heures déjà, l'invité venu de Moscou y sommeillait sans grande difficulté dans les matelas les plus confortables.

Enfin, jusqu'à un moment où, au beau milieu de cette nuit silencieuse, un grincement est venu le tirer hors de son sommeil. Étonnant, d'abord parce que cette pièce nécessitait une clé pour venir à bout de la porte, ensuite parce qu'une nouvelle qui n'attend pas l'aube n'est jamais bonne.

Alors, attendant que l'intrus parle ou avance dans l'ombre, Russian Empire sortait sa main pour se munir de la dague présente sous son lit (un besoin pour un tsar qui n'est pas aimé de tous). Les pas de l'inconnu s'approchent lentement mais avec sureté du russe quand ce dernier faisait mine de dormir encore.

Et là, contrairement à toute attente, l'être caché par le noir n'attend pas d'aller plus loin que le bord du lit pour bondir sur le slave. Ce dernier amène sa lame au cou du suspect en une fraction de seconde. Ses yeux s'habituent encore un peu plus à l'obscurité et commencent à distinguer le visage de l'homme assis sur lui à ce moment ; un bleu sombre, un blanc fier et un rouge pourpre. Il n'avait que des bas blancs et un bandage qui traversait le haut de son torse.

"Франция ? (Frantsiya ?)"


Aucune réponse. Le dit français traine maintenant une main sur le poignet du russe qui n'attend pas avant de la repousser violemment. Il tente de se lever de son lit malgré le poids sur lui et manque le sol à nouveau, angoissé par les agissements si soudains et intrusifs de l'autre pays.

Russian Empire entend ensuite une voix un peu plus grave que celle d'habitude du petit français. Encore à moitié couché comme une bête sur les draps, il lui dît :

"Russie,  Russie ! Voyons, pourquoi tu as encore peur de moi ? Donne-moi le couteau.

- Н-Нет ! (N-Net !)

- Que crains-tu, mon ami ? Que je te fasse du mal ?

- ( soupire ) Bien."


Peu sur de lui encore, Russian Empire se devait tout de même de réagir : il agrippe l'épaule de France et par excès de colère, un petit agacement incontrôlable, enfonce ses ongles dans sa peau. Mais le révolutionnaire n'est pas dérangé pour autant, il se contente de rire alors que son allié tente plusieurs fois de lui parler avec le regard inscrit dans celui de l'autre.

Tout d'un coup, la lame du russe se retrouve dans la main du français et ce dernier, maintenant armé, se lève à son tour du lit et se défait de l'emprise du plus grand.

France essaye enfin de porter un coup. Il lève sa main armée mais le russe se presse de lui attraper les avant-bras et se met en tête à tête avec l'empereur de France. Il retourne à un ton ferme comme s'il grondait un enfant :

"Je vais te conduire à ta chambre pour ne pas que tu fasses plus de dégât, mais je ne vais pas laisser les choses se passer comme ça, à aucun moment. Demain, tu la libères et-"


Un bruit sourd les interrompt, les deux tournent leur regard vers la fenêtre de la pièce car le son semble venir de dehors.

"Un canon ? À un tel moment ?"


Russian Empire restera encore sans réponse parce que le français est parti à une vitesse qu'on ne peut décrire vers les couloirs. Le grand slave jette un regard à gauche, à droite de la pièce et se convainc enfin de se préparer pour lever ses hommes.

Et ils devraient l'être, en effet l'ambiance dans les sous-sols se fait entendre à tous les étages sans parler du vacarme grandissant dehors.


En une demi-heure après le premier son de canon, France était déjà dans sa tenue de général de division et discutait avec un chef de brigade juste devant les cours de la grande résidence, s'interrogeant sur ce qu'il se passait. Pour faire court, parce qu'il fallait faire court, des soldats inconnus avaient infiltrés les rues de Paris et s'en suivit la Grande Cour où ces inconnus on ouvert le feu. Ils ont vite été abattus, n'étant venu à bout que de deux français alors qu'ils étaient cinq à cet endroit.

J'ai réussi à la faire partir, mais pour combien de temps ?

On ne sait encore de quelle origine ils sont, on sait en tout cas que, d'après les éclaireurs, deux régiments de trois douzaines d'hommes chacun sont encore libres dans la ville et cause la terreur, et ce n'est pas tolérable. France exige quatre troupes pour prendre en tenaille les deux régiments, ordre exécuté dans les temps qui suivent.

Et pendant ce temps, il retourne aux bagnes des sous-sols. Son impatience grandit, il espère une chose. Une. Alors, il descend les escaliers de pierre noire du plus vite qu'il peut mais ses pas se freinent aux dernières marches, il lâche sa lame, lève les bras en signe de paix et son visage déterminé se défait pour venir à une expression neutre.

N'abandonne pas...

Il peut ressentir les fusils pointés sur lui et le regard méprisant du grand vétéran en face de lui, celui d'Austria. Elle le toisait du regard en gardant ses épaules droites et son buste relevé, contrairement à la prisonnière libérée qu'elle tenait par le poignet : Prussia.

Des secondes passèrent dans le silence et la tension la plus totale jusqu'à ce que l'autrichienne ordonna aux quelques soldats présents autour d'elle de sortira alors que le français baisse enfin les bras, elle s'avança ensuite elle-même vers lui qui était dans un état de transe, tenant toujours la germaine abattue avec elle.

Tête haute, aucun sourire, elle lui dit d'un air le plus formel :

"France, tu ne peux continuer comme ça, mentir à tous, y compris toi. Je la ramène, tu uses comme tu veux de tes sentiments mais tu n'useras pas des siens sans conséquences."


Bouge... Elle ne sait pas, personne ne sait ! Fais-le pour nous !

France se retourne vers les deux femmes qui l'avaient laissé là, un rictus se dessine sur ses lèvres alors qu'il se penche d'un mouvement robotique. Il récupère, avec lenteur et sureté, la dague de Russian Empire et avance à son tour lentement vers les deux autres qui étaient déjà assez loin, laissant derrière lui quelques gardes français peut-être encore en vie. Malheureusement pour eux, l'empereur est déjà parti pour retrouver quelqu'un.

En espérant, bien-sûr, qu'il n'était pas dans le coup...

Au cœur de l'EmpereurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant